Analyse

Technique - Les écuries recherchent la limite absolue des freins

Ce week-end à Bahreïn, les freins des monoplaces de Formule 1 vont faire face à l'un des défis les plus relevés de la saison.

Les freins de la Mercedes AMG F1 W06

Photo de: XPB Images

La combinaison entre la température élevée, le grip accru provoqué par la chaleur et les gros freinages qu’impose le circuit de Sakhir complique le fonctionnement des freins lors de ce Grand Prix.

La situation sera rendue encore plus complexe par la restriction des conversations radio entre les stands et les pilotes. Ainsi, les ingénieurs ne pourront plus avertir leurs pilotes que la température de leurs freins devient anormalement élevée, sauf si le problème peut les conduire à l’abandon.

En Australie, un petit débris s’est logé dans une des écopes de freins de la Mercedes de Nico Rosberg. La température des freins a grimpé et l’écurie a songé à lui demander de s'arrêter. Mais l’Allemand a très bien géré la situation, et a finalement réussi à gagner la course. Cet événement prouve que la puissance et l’endurance des freins sont devenues des éléments clés de la performance générale d’une F1.

Les écuries exigent désormais que les fournisseurs de freins percent 1200 trous de refroidissement dans les disques. Ce qui était exagéré il n’y a pas si longtemps est ainsi devenu la norme.

Des progrès incessants

Kimi Räikkönen, Ferrari SF16-H avec la protection du cockpit type "halo" bloque ses roues au freinage

À une certaine époque, les équipes munissaient leurs voitures de disques, d’étriers et de plaquettes normales d’un équipementier et disputaient des Grands Prix. L’arrivée sur le marché des disques en carbone a révolutionné la F1. Le poids de l’ensemble de freinage a chuté de 20 à 6 kg, et la performance pure a nettement progressé.

Dans le but de contrôler les coûts, la FIA a imposé des limites de taille, de matériau et de forme aux différentes pièces, ce qui a conduit à une amélioration significative du rendement des disques de freins.

Les équipes se sont vite rendu compte que si les disques avaient besoin de moins d’air pour être refroidis, ce flux pouvait alors être détourné à des fins aérodynamiques.

Trouver la température idéale

Un frein de Sauber C34

Pour être efficace, un disque de freins doit fonctionner dans une fourchette de température précise. S'il est trop froid, le disque ne génère aucune friction. Au début de la zone de freinage, la température du disque doit se situer entre 350 et 600°C.

S’il dépasse cette température, il commence à s’oxyder. Il perd de sa densité et, lors des freinages, sa température ne cesse d’augmenter et l’usure n’est plus gérable. Il est toutefois difficile de maintenir le disque dans cette fourchette de température.

Andrea Algeri, responsable des freins pour la F1 et les monoplaces chez Brembo, précise : "Au cours des dernières années, nous avons atteint la limite de résistance du disque de frein, ainsi que le poids minimum et la solidité des étriers. Alors nous étudions maintenant le refroidissement de tout cet équipement."

Des trous, encore des trous

Comparaison des disques de freins

La règlementation fixe le diamètre maximal du disque de frein et son épaisseur. Les ingénieurs ont ainsi vite compris qu’une façon efficace d’accroître la surface de refroidissement du disque était de percer des trous d’évacuation d’air.

Il y a de cela vingt ans, chaque disque possédait environ une trentaine de gros trous percés radialement. Mais au cours des dernières années, non seulement le nombre de trous a augmenté, mais ils sont devenus beaucoup plus petits.

"Il y a cinq ans de cela, nous avions entre 70 et 100 trous de refroidissement. Aujourd’hui, nous en sommes à 1200", explique Algeri. "Les trous sont d’un petit diamètre afin d’accroître la surface de matériau en contact avec l’air. Cela résulte sur un meilleur refroidissement, un meilleur contrôle de la température du disque et une diminution du poids."

Cette augmentation du nombre de trous percés provient de deux facteurs : des écuries ont exigé ce développement des trous de refroidissement et les équipementiers ont été capable d’usiner les disques de telle façon.

"Les écuries ont beaucoup poussé pour ce développement", ajoute Algeri. "Mais de notre côté, il nous a fallu trouver les bonnes machines pour percer ces trous, car plus ils sont petits, plus c'est difficile de les faire. Le composite carbone-carbone est un matériau assez tendre, c’est vrai, mais percer de longs trous d’un diamètre de 2,5 mm avec un seul outil n’est pas simple. Nous avons dû investir beaucoup d’argent afin de développer cette technologie."

"Nous avons commencé par des trous de 4,5 mm de diamètre. Puis nous sommes passés à 4 mm, puis à 3 mm, et finalement nous parvenons à percer des trous de 2,5 mm, ce qui semble être la limite. Cela aura nécessité pas mal de temps."

Trouver la limite 

De la fumée sort d'une roue de la Red Bull Racing RB12

En F1, les ingénieurs sont d’éternels insatisfaits et ils poussent les équipementiers à innover encore. Toutefois, il y a un équilibre précaire à trouver. Comment percer plus d’un millier de trous sans affecter la structure du disque ?

"Nous devons imposer une limite aux idées fantaisistes des ingénieurs de F1 !", plaide Algeri. "Les idées qu’ils proposent pour refroidir les freins sont souvent très bonnes, mais elles ne tiennent pas compte de la résistance des disques et de leur usure. Les ingénieurs veulent des disques avec plein de trous, mais veulent que l’usure n’excède pas 0,5 mm. Ce type de disque ne serait bon que pour les premiers essais libres, car il faudrait les changer immédiatement après. Il faut parvenir à un compromis entre poids, usure et durée de vie du disque."

Actuellement, les disques de frein possèdent environ 1200 trous de refroidissement, ce qui semble être la limite. Cependant, les voitures de 2017 seront plus rapides au tour, ce qui exigera probablement un freinage plus efficace. Il faudra donc munir ces F1 de freins encore plus performants, et mieux refroidis.

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