Pourquoi Ducati n'a jamais douté de Pecco Bagnaia

Ducati a remarqué que Pecco Bagnaia avait quelque chose de spécial bien avant ses débuts en MotoGP. La marque a continué à croire en lui dans les moments difficiles et plusieurs déclics ont permis à l'Italien de récompenser cette confiance en 2022.

Francesco Bagnaia, Ducati Team, est le Champion du monde 2022

Photo de: MotoGP

Pecco Bagnaia a connu une carrière en dents de scie, des petites catégories jusqu'au MotoGP, alternant entre victoires et chutes y compris en 2022, ce qui ne l'a pas empêché de décrocher le premier titre mondial d'un pilote Ducati depuis 15 ans. La marque de Borgo Panigale avait tour à tour misé sur Valentino Rossi ou Andrea Dovizioso pour retrouver le premier plan, mais elle regardait aussi du côté des plus petites catégories et l'abnégation de Bagnaia en Moto3 a suscité son attention dès 2016.

"Nous l'avons signé avant qu'il gagne le titre [Moto2]", a rappelé Davide Tardozzi, team manager de l'équipe Ducati d'usine, dans le podcast officiel du MotoGP. "Notre décision était basée sur ses courses en Moto3. C'est là que nous avons compris qu'il pouvait être un top pilote. Il n'a jamais abandonné. Avec Mahindra, il montait sur le podium dans des courses comme Aragón où [cette moto] n'était clairement pas la meilleure. Il aurait pu facilement renoncer et dire : 'J'ai 10 ou 20 km/h de moins que les autres motos, je ne peux rien faire avec de longues lignes droites de 1,2 km'. Ça nous a montré qu'il pouvait faire un gros step, et il l'a fait."

Ducati et Pramac ont annoncé la titularisation de Bagnaia pour la saison 2019 dès le mois de février 2018, avant le début de sa campagne victorieuse en Moto2. Ses performances cette année-là n'ont fait que conforter le clan italien dans son choix, mais Tardozzi a surtout pu constater le potentiel de la recrue quand il a pris le guidon de la moto.

"Il a été titré en Moto2 mais j'ai réalisé que Pecco était un pilote de pointe au premier test en Malaisie. Après, il a eu un an et demi difficile mais à son premier test, il avait montré des choses qui ne sont pas possibles pour un rookie s'il n'est pas un pilote de pointe, rapide. Nous nous sommes donc rendu compte à ce moment-là qu'il avait du potentiel. C'est pour ça que même après un an et demi de hauts et de bas, de soucis et de mauvais résultats, nous l’avons gardé. Il avait le potentiel, il fallait juste trouver une solution et lui donner une moto pour montrer ce potentiel, et c’est ce qui s’est produit."

Francesco Bagnaia, Pramac Racing

Après de simples découvertes en 2016 puis fin 2018, Pecco Bagnaia a impressionné Ducati au test de Sepang en février 2019

Comme l'a souligné Davide Tardozzi, Pecco Bagnaia a mis du temps à confirmer ces promesses en MotoGP. Arrivé dans le championnat en 2019, comme Fabio Quartararo et Joan Mir, il n'a pas connu la réussite immédiate du Français, en pole à son quatrième départ et sur le podium à son septième, ni celle du Majorquin, titré dès sa deuxième saison. Bagnaia n'a décroché qu'un seul top 5 en 2019, ce qui a nécessité une première introspection.

"Les saisons 2019 et 2020 ont été vraiment difficiles", a reconnu Bagnaia. "En 2019, j'ai débuté la saison dans le conte de fées du titre de 2018, et du test aussi parce que je n’y avais fait absolument rien et pourtant j'étais très rapide. C'était incroyable sur le moment mais quand on est arrivés à la première course, je n'étais pas performant, j'étais derrière, j'avais beaucoup de mal, je tombais beaucoup. J'ai enchaîné quatre ou cinq courses avec des zéros pointés, des chutes."

"À cette époque, j'étais très frustré, très en colère, très démoralisé. J'ai essayé de progresser. On a eu une grosse réunion chez Ducati, pour comprendre mes erreurs, pourquoi j'étais lent. Cette approche a commencé à me permettre de progresser. Dans les dernières courses de la saison [2019] – à part à Valence où j'ai essayé de faire un front flip mais où je l'ai manqué ! [sic] –, j'ai progressé dans mes performances : j'ai fini quatrième à Phillip Island et j'ai été performant en Malaisie mais j'ai eu des soucis en course."

Des déclics en 2020 et en 2021

La saison 2020 de Bagnaia a été perturbée par une fracture de la jambe, mais il a commencé à briller avec un podium à Misano – alors que sa blessure l'empêchait encore de marcher correctement. Il restait cependant très loin du niveau nécessaire pour jouer le titre : "2020 a été une année à oublier pour tout le monde, ce n'était pas la meilleure pour tout le monde entre les quarantaines et tout ce qu'il s'est passé."

"J'ai décroché mon premier podium mais je me suis aussi cassé le tibia et j'avais beaucoup de mal à m'entraîner. Dans la deuxième moitié de la saison, j'étais très en difficulté parce que je n'avais pas de force, je n'étais pas prêt pour les courses et j'avais beaucoup de mal à être performant, en pneus froids notamment ; j'avais peur de tomber à cause de ma jambe, parce que je pense que les problèmes n'ont été réglés que l'an dernier. Ce n'était pas la meilleure [année] pour moi."

Tardozzi estime cependant que cette période a marqué un tournant pour Bagnaia, avec ce premier trophée glané à Misano, et une semaine plus tard un premier tour en tête sur le même circuit... conclu sur une chute, ce qui allait illustrer les mois suivants mais pas entamer la conviction de Ducati en son talent.

"Sincèrement, sa progression a été un peu ralentie par des blessures. Une des mauvaises choses qui se sont passées, c’est qu'il s'est cassé la jambe à Brno [en 2020], or je pense que ça aurait pu être la course où il était prêt et qu'en Autriche, à la course suivante, il aurait pu monter sur le podium. Mais ensuite, dès son retour d’opération, il a été deuxième puis il est tombé à Misano lorsqu’il était en tête. Il n'a jamais été dixième ou 12e : [depuis] il a toujours été sur le podium... ou à terre !"

Francesco Bagnaia, Ducati Team, Marc Marquez, Repsol Honda Team

Pecco Bagnaia a remporté sa première victoire en MotoGP au GP d'Aragón 2021

Tardozzi omet quelques mois où l'inconstance était encore de mise pour Bagnaia, qui a encore vu l'arrivée deux fois hors du top 10 en 2020, et en effet cumulé des chutes. L'année suivante, pour son arrivée dans l'équipe officielle, le pilote italien est devenu un candidat régulier au top 5 et même au podium, et a par la suite connu un déclic avec son premier succès au GP d'Aragón 2020, en contenant Marc Márquez, même si cela n'a pas gommé les chutes qui ont poussé Bagnaia à se remettre à nouveau en question.

"Entre les six dernières courses de l'an dernier et celles [jusqu'à la Malaisie], soit 24 courses, regardez les résultats : il en a gagné dix et il a fait quatre autres podiums, ça veut dire qu’il a fini plus d'une course sur deux sur le podium", a souligné Tardozzi. "Oui, il a fait des erreurs et nous devons travailler là-dessus, mais c'est un top pilote, ça ne fait plus aucun doute." 

"Il croit plus en lui [aujourd’hui]", a ajouté le dirigeant. "L'an dernier, quand il est tombé à Misano avec Marc Márquez qui l'attaquait fort, ça faisait un mois qu'il gagnait des courses, depuis Aragón. Il a franchi un cap. Depuis le premier test en Malaisie en 2019, nous avons toujours su qu'il pouvait être très rapide, mais il lui a fallu un an et demi pour le montrer." 

Bagnaia confirme avoir senti une évolution en 2021, qui a fait de lui un véritable prétendant à la victoire : "2021 a été l’année pendant laquelle, tout en n’étant pas un pilote complet, j'ai commencé à comprendre que j'étais capable de gagner. Je ne me suis pas battu pour le titre parce que Fabio a eu une saison incroyable l'an dernier, mais j'ai essayé de me relancer et j'ai fini deuxième, alors c'était déjà bien. Cette année, au début c'était problématique parce que j'avais pour ambition de gagner et que la moto n'était pas prête à le faire. Mais on a énormément travaillé pour être performants." Au point d'être désormais au sommet du MotoGP.

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