Portrait

Ce qu'il faut savoir sur Ryō Hirakawa, nouvelle recrue de Toyota

Pour les amateurs de sport automobile japonais, l'arrivée de Ryō Hirakawa dans la Toyota GR010 Hybrid #8 en WEC est loin d'être surprenante. Mais pour ceux qui ne connaissent pas le pilote, la décision de Toyota peut sembler étrange.

Ryo Hirakawa, KeePer TOM'S GR Supra #37

Photo de: Masahide Kamio

En effet, Kazuki Nakajima avait encore les épaules suffisamment solides pour accompagner Sébastien Buemi et Brendon Hartley quelques saisons de plus au volant de la GR010 #8. Mais le constructeur japonais commence à préparer l'avenir : en plus de la "promotion" de Nakajima au poste de vice-président de Toyota Gazoo Racing Europe, Kamui Kobayashi se voit confier un double rôle assez inhabituel de pilote-team principal cette saison.

La retraite de Nakajima, 37 ans, et l'arrivée de Ryō Hirakawa, de dix ans son cadet, est l'aboutissement d'un projet ayant vu le jour fin 2019, lorsqu'un autre espoir chapeauté par Toyota, Kenta Yamashita, participa à une saison complète du WEC, chez High Class Racing en LMP2. Rob Leupen, le directeur d'équipe de Toyota, avait donné le ton en décrivant Yamashita comme "l'héritier de Nakajima" après des débuts impressionnants au Mans l'année suivante.

Mais la crise sanitaire a rendu impossibles les allers-retours perpétuels entre l'Europe et le Japon, poussant Yamashita à faire un choix. Et celui-ci est tombé sur la Super Formula. En conséquence, une opportunité s'est présentée pour Hirakawa, qui avait déjà l'expérience des courses d'Endurance en Europe car Toyota l'avait envoyé participer à la saison 2016 de l'European Le Mans Series en vue d'un engagement dans une troisième TS050 pour les 24 Heures du Mans 2017. Finalement, Yuji Kunimoto l'a coiffé au poteau.

Après ce rendez-vous manqué, Hirakawa a accumulé les succès chez lui, au Japon. En compagnie de Nick Cassidy, il a remporté le titre Super GT avec l'équipe TOM'S en 2017. Trois ans plus tard, sa double campagne en Super GT et en Super Formula aurait sans doute dû être récompensée par deux sacres sans une certaine malchance. Mais qu'importe, les performances du Japonais cette année-là l'ont aidé à attirer de nouveau l'attention de Toyota.

Hirakawa a longtemps mené le championnat de Super Formula en 2020 mais le Japonais s'est incliné face à Naoki Yamamoto

Hirakawa a longtemps mené le championnat de Super Formula en 2020 mais le Japonais s'est incliné face à Naoki Yamamoto

Et le timing était parfait : avec le départ de Yamashita, Toyota avait un poste vacant dans sa liste de pilotes de développement, et Hirakawa était le candidat numéro un. Invité à essayer la GR010, au mois de juin à Portimão, le pilote a été contraint de manquer la manche de Sugo en Super Formula, signe qu'il s'agissait d'une évaluation sérieuse. D'autres sorties à Barcelone, en septembre, et à Bahreïn, en novembre, ont fini de convaincre les dirigeants de l'équipe.

Originaire de la préfecture d'Hiroshima, dans l'ouest du Japon, Hirakawa est un personnage discret et quelque peu sérieux, même s'il a un bon sens de l'humour. Les nombreuses saisons passées aux côtés de pilotes étrangers en Super GT, ainsi que ses deux années en ELMS en 2016 et 2017, lui ont permis de parler couramment l'anglais, ce qui a toujours été un point noir pour Yamashita.

Honnête sur ses lacunes, Hirakawa a admis qu'il avait connu de grandes difficultés à se montrer compétitif au volant de la GR010, étant plus lourde et ayant moins d'appui que les voitures de Super GT.

"J'ai simplement essayé de piloter sans penser aux changements que je devais faire dans la voiture", s'est souvenu Hirakawa lors d'un entretien avec Motorsport.com. "Il y a tellement de manières d'améliorer la voiture lorsque l'on roule mais je ne les ai pas trop exploitées. C'était assez étrange parce que je pensais que je faisais ce qu'il fallait faire mais j'étais lent. Donc, j'ai paniqué et je me suis dit : 'Qu'est-ce que je dois faire ?' C'est peut-être pour ça que j'étais un peu intimidé [par les autres pilotes]. Je pensais qu'ils allaient simplement me voir comme un gars lent."

"Je ne savais pas quoi demander, après avoir comparé les données… Des choses comme freiner plus tôt ou plus tard, je peux le comprendre, mais pour pouvoir comprendre certaines choses, il faut poser des questions. À ce moment-là, je ne le savais pas et cela me rendait timide, je pense. Et il y avait la pression de savoir qu'il y avait une grande opportunité pour moi."

"Une fois que l'équipe a pris sa décision, elle m'a vraiment aidé. À Bahreïn, après la décision, ils ont essayé de m'aider sur ces choses-là et j'ai grandement amélioré mes performances. J'ai senti que j'étais dans le même rythme que les autres pilotes mais je suis sûr que ce sera différent en course parce qu'il y a du trafic et qu'il faut se battre. Je dois m'entraîner davantage sur les doubles relais avec les mêmes pneus tout en gardant le même rythme, et à changer les réglages de la bonne manière."

Si les voitures Hypercar sont nouvelles pour Hirakawa, les courses multiclasse en Endurance ne le sont pas. Le Japonais peut en effet compter sur son expérience en Super GT, forte de 58 courses, sept victoires et 21 podiums. Un palmarès loin d'être ridicule dans un championnat ralentissant les pilotes les plus rapides pour entretenir le spectacle.

Et n'oublions pas ses deux saisons en ELMS, entre 2016 et 2017, qui se résument à trois victoires en neuf courses et à deux participations aux 24 Heures du Mans dans la catégorie LMP2, avec TDS Racing.

Hirakawa et ses équipiers étaient bien placés pour la victoire au Mans en 2016 mais un accident au petit matin les a mis hors course

Hirakawa et ses équipiers étaient bien placés pour la victoire au Mans en 2016 mais un accident au petit matin les a mis hors course

"Je pense que le Super GT vous prépare plutôt bien pour le WEC", a-t-il précisé. "Le plus difficile, c'est de prédire le comportement de certains pilotes [au moment de leur prendre un tour]. En Super GT, vous pouvez le deviner selon le pilote ou la voiture, donc je dois l'apprendre en WEC également."

"Quand j'ai couru en ELMS, je n'ai jamais eu des difficultés avec le trafic, grâce au Super GT. La deuxième saison [en 2017] était la première année pour la nouvelle voiture [l'Oreca 07] et j'ai dû faire beaucoup d'économies de carburant, ce qui était nouveau pour moi. Cela a été la seule grande différence avec le Super GT, en plus du fait que nous avions des couvertures chauffantes [celles-ci sont interdites en Super GT, ndlr] et que je devais apprendre de nouveaux circuits, ce qui est bien plus intéressant que de rouler sur les mêmes pistes chaque année [au Japon]."

Certes, Toyota demeure le grand favori pour la couronne mondiale et pour la victoire au Mans cette année, toutefois il y aura une certaine pression sur Hirakawa. Le Japonais devra prouver qu'il a sa place dans ce championnat et dans cette catégorie, d'autant plus que son équipage, au volant de la voiture #8, a une revanche à prendre.

"La lutte sera toujours intense entre les deux Toyota mais je pense que [2022] sera une année d'apprentissage", a estimé Hirakawa. "Je veux m'améliorer autant que possible cette année pour être prêt pour 2023, lorsque les autres constructeurs arriveront. Je pense que c'est une bonne chose que je rejoigne le WEC au moment où la concurrence se renforce. Après 2017, ce n'était qu'un championnat Toyota [en LMP1] et c'était facile pour Toyota de gagner mais, au lieu de cela, je reviens au bon moment. Beaucoup de constructeurs arrivent et le WEC va devenir plus populaire. C'est ce que j'attends le plus."

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