Bagnaia et Petrucci ne voulaient pas disputer la course

Danilo Petrucci s'est senti "sale" en disputant le Grand Prix d'Italie quelques heures après le décès de Jason Dupasquier. Pecco Bagnaia a également éprouvé de grandes difficultés et les deux hommes se demandent si la course aurait été maintenue si c'est un pilote du MotoGP qui avait été touché.

Danilo Petrucci, KTM Tech3

Danilo Petrucci, KTM Tech3

Gold and Goose / Motorsport Images

C'est le cœur lourd que les pilotes du MotoGP ont disputé la course au Mugello, deux heures à peine après avoir appris le décès de Jason Dupasquier des suites des ses graves blessures, conséquences de l'accident de samedi en Moto3. Danilo Petrucci a confié qu'il aurait préféré ne pas disputer ce Grand Prix par respect envers le Suisse.

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"C'était une course très difficile, mais pas pour des questions sportives", a déclaré le pilote Tech3. "Sur le plan humain, je ne me sens pas vraiment 'propre.' On roule sur une piste où il y a environ 24 heures, une personne comme nous est morte. Pour moi ce n'est pas très bien. On ne peut pas dire qu'on s'arrête pour une journée. Je me suis senti un peu sale de faire ça, de penser que quelqu'un comme vous, un pilote comme moi n'est plus de ce monde."

Pecco Bagnaia partage cette opinion. Le pilote Ducati a pris la tête au départ mais il a chuté dès le deuxième tour et il a reconnu avoir éprouvé de grandes difficultés à maintenir sa concentration. Lors de sa visioconférence avec les journalistes, il a demandé à ne pas évoquer sa course, ses pensées étant entièrement tournées vers Jason Dupasquier.

"Si c'était déjà dur hier, aujourd'hui c'était impossible", a résumé Bagnaia. "J'ai appris la nouvelle au sujet de Jason à la fin de la course Moto3 et avant le départ de la course Moto2. À partir de là, c'était impossible de penser à la course. Je commençais à me concentrer, mais après la minute de silence, rien, c'était impossible. J'ai pris un bon départ, j'étais devant, mais quoiqu'il en soit, finir premier ou dernier n'aurait rien changé aujourd'hui. C'est probablement l'une des pires journées de ma vie. Je n'ai rien apprécié aujourd'hui. Je leur ai demandé de ne pas faire la course aujourd'hui. Pour moi, ce n'était pas correct."

Pecco Bagnaia s'interroge également sur l'importance que donnent les instances dirigeantes au décès de Jason Dupasquier. Pour l'Italien, la course aurait été annulée si l'accident avait concerné un pilote de la catégorie principale : "Je sens que si c'était arrivé à un pilote du MotoGP, on n'aurait pas fait la course. Je ne suis pas content de cette journée, je ne suis pas content de la décision prise par quelqu'un de nous laisser faire la course après une telle nouvelle. Peu importe si je suis tombé. Je pense juste à lui, à sa famille. On a perdu un pilote de 19 ans, donc c'est très dur à accepter. C'est dur d'accepter la décision prise par quelqu'un de nous laisser rouler aujourd'hui."

Des propos appuyés par Danilo Petrucci, qui juge anormal que le week-end ait repris son cours dès l'instant où Jason Dupasquier a été transféré vers l'hôpital : "On a compris que la situation était très grave dès hier. Clairement, personne ne voulait dire la vérité, mais on avait compris la situation. Dans ce cas, je me demande toujours si on aurait continué comme ça si c'était arrivé à un pilote du MotoGP. Est-ce une vie différente parce que c'est un pilote du Moto3 ? Est-elle moins importante ? Je ne le pense pas."

"Hier, on a remis nos combinaisons, on a vu l'hélicoptère quitter la piste et trois minutes plus tard, on était en piste, comme si personne n'était tombé, personne ne savait, rien ne s'était passé. Imaginez si ça avait été un pilote du MotoGP. Je ne pense pas que c'est une vie moins importante parce que de l'extérieur, on ne voit pas les humains, mais sous la combinaison, sous le casque, il y a d'abord une personne, et ensuite un pilote."

"Le plus dur c'était hier, quand on a vu un corps sur la piste et que trois minutes après, on a rouvert la piste et qu'on est repassés à l'endroit où il y avait un pilote", a ajouté Petrucci. "On parle de sécurité, de tout, mais trois minutes plus tard, il y avait déjà un drapeau jaune et rouge [indiquant un manque d'adhérence], parce que peut-être qu'ils ont dû utiliser des choses pour enlever le corps. Et on passe comme d'habitude... C'est dur à comprendre quand on met sa combinaison et qu'on roule à 350. Aujourd'hui, ça aurait peut-être été mieux d'avoir une journée pour penser à lui."

Petrucci et Bagnaia regrettent de ne pas avoir été consultés

Ryusei Yamanaka, coéquipier de Jason Dupasquier, et Thomas Lüthi, qui en était proche, n'ont pas pris le départ des courses du Moto3 et du Moto2 aujourd'hui, mais Danilo Petrucci regrette que les dirigeants des trois catégories n'aient même pas demandé aux pilotes s'ils souhaitaient un maintien des épreuves ce dimanche : "Personne n'a proposé une réunion pour dire 'L'un des nôtres n'est plus avec nous, peut-on discuter pour savoir s'il faut continuer à faire ça ?' Personne ne nous l'a demandé."

"Au moins, peut-être qu'organiser une réunion, partager les opinions et les commentaires, aurait été mieux", a-t-il précisé. "Je ne le connaissais pas personnellement, mais si j'avais été l'un de ses proches, je pense que je n'aurais pas pu rouler. Je ne sais pas si on peut penser à la moto, à la course, au MotoGP, au Moto3, aux pneus, à la performance, ce genre de choses... Comme je l'ai dit, je me suis senti assez sale aujourd'hui."

Bagnaia s'est également rendu sur la grille de départ à contrecœur :"Après l'annonce, j'ai dit à Davide [Tardozzi] que je préférais ne pas faire la course aujourd'hui. Mais c'est notre travail et il faut le faire. Mais dans de telles conditions, je pense que c'est très difficile. En 2016 déjà, quand nous avons perdu Luis [Salom], c'était la même chose pour moi, parce qu'on avait fait une minute de silence. Aujourd'hui, j'étais dans la même situation, c'était très dur de contenir mes larmes pendant la minute de silence. C'était très difficile aujourd'hui."

Les pilotes ont également été troublés par le faible délai entre l'annonce du décès de Jason Dupasquier et la course, ainsi que par la minute de silence respectée sur la grille 15 minutes avant le départ. Fallait-il trouver un autre moment pour rendre hommage au pilote disparu ?

"C'est très dur de gérer une situation de la sorte, presque impossible", a estimé Bagnaia. "L'hôpital a l'obligation de faire une annonce quand quelqu'un décède, donc on était dans une situation très difficile. Mais ce que je n'accepte pas, c'est qu'on ait fait la course aujourd'hui, aussi parce que je pense que si c'était arrivé à un pilote du MotoGP, on parlerait de lui et pas de la course, parce qu'on n'aurait pas fait la course."

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