Interview

Le titre leur a échappé : Gilles Villeneuve, le fantastique

Gilles Villeneuve a tant marqué les esprits que nombre de fans de Formule 1 pensent encore aujourd'hui que le Canadien figure dans la liste des pilotes ayant remporté la couronne mondiale. Pourtant, sa meilleure position au général fut bel et bien la seconde, obtenue en 1979, à mi-chemin d'une carrière F1 trop courte ayant duré de 1977 à sa tragique disparition, en 1982. René Arnoux se souvient de la vista, de la prestance du caractère et du pilotage de Gilles Villeneuve dans un témoignage émouvant.

Auteur de 67 départs en GP, Gilles Villeneuve a remporté six courses et est monté sur le podium en 13 occasions. Son palmarès, acquis au cours d'une carrière disputée avec McLaren puis Ferrari, compte aussi deux poles position et huit meilleurs tours en course. Que ce soit en course ou simplement sur un tour de sortie ou d'essais, Villeneuve régalait les observateurs par un sens de l'attaque tout simplement sans compromis. C'est à son très proche ami René Arnoux que Motorsport.com a demandé de se souvenir du parcours de ce Champion sans couronne s'il en est.

"Gilles Villeneuve était vraiment mon meilleur ami. Pour moi, ce n'était pas un pilote de course : Gilles était un acrobate. Il m'a dit une fois : 'René, tant que tu as un volant et des freins, tu peux tout ajuster'.

Vous vous souvenez de son gros accident à Imola [en 1980] ? J'étais terrifié car quand j'ai vu sa voiture, le moteur, la boite de vitesses et une roue étaient chacun à un endroit différent, avec le châssis au milieu de la piste. Après la course, j'ai immobilisé mon auto devant le garage Renault et je suis allé directement au box Ferrari. J'ai vu Gilles et lui ai demandé si ça allait, et il a dit : 'Oui, oui, je vais bien'. Et juste après : 'Je suis content' ! Quand il a dit ça, j'ai trouvé sa réponse vraiment incroyable. 'Pourquoi es-tu content ?', lui ai-je demandé. 'Parce que j'ai eu un accident à très haute vitesse et que le châssis, là où j'étais installé, était intact' ! C'était du Gilles tout craché !

Quand il décidait d'y aller à fond, il le faisait, sans savoir ce qui arriverait après.

René Arnoux

Une autre fois, alors que nous étions ensemble à Watkins Glen, je lui ai demandé : 'Tu prends le virage avant la ligne de départ/arrivée à fond ?' Il s'agissait de quelque chose de très difficile. Il a répondu que non. Puis il m'a demandé à mon tour si je le faisais et j'ai aussi répondu que non, que je relâchais un peu avant de réappuyer à fond. Puis il m'a dit : 'Hummm, mais en pneus de qualifications, je vais essayer !' Quand il a dit ça, je me suis dit que j'allais assister à quelque chose de vraiment spécial. On a commencé les essais officiels à une ou deux heures, et trois minutes avant la fin, je suis arrivé sur cette grosse inclinaison et j'ai vu la Ferrari écrasée dans le mur, avec Villeneuve qui traversait la piste en courant vers le box.

Les garages Renault et Ferrari étaient très proches dans les stands et après avoir fini mes essais, je suis directement allé voir Gilles. 'Que s'est-il passé, c'était possible à fond ou pas ?' Et il a fait : 'Non, c'est impossible'. C'était encore totalement du Gilles Villeneuve ! Quand il décidait d'y aller à fond, il le faisait, sans savoir ce qui arriverait après.

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Dur avec la mécanique

Le problème avec Gilles, c'est qu'il était toujours rapide, extrêmement rapide. Maintenant, la F1 est différente, on change de pneus tous les dix tours ! Avec Gilles, le problème est qu'il demandait le maximum de l'auto à chaque boucle. Il arrivait souvent à la fin avec la voiture en mauvais état : freins, pneus, boite de vitesses, tout ! Mais il continuait à être rapide dans ces conditions, même si, bien sûr, il perdait en performance.

Sa victoire à Monaco avec la voiture turbo [en 1981] n'a rien eu de facile. Il y eut une autre course fantastique cette année-là, à Jarama. Il allait un peu plus vite que tous les autres avec le turbo dans la grosse inclinaison avant la ligne droite. Tous ceux qui avaient le moteur à aspiration normale étaient coincés derrière Gilles. C'était très difficile, mais il l'a gagnée.

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Ni calculs ni compromis

Je crois qu'il ne pensait pas au championnat du monde ; seulement au moment présent. Il était proche de Scheckter lorsque Jody a remporté le titre en 1979. Mais mon impression est que si Gilles était arrivé sur la dernière course avec une chance de victoire au championnat du monde, il n'aurait pas ajusté ses performances à la manière de Prost, de Piquet ou moi-même. Il aurait voulu terminer devant tout le monde.

C'était son tempérament, son caractère. Gilles était comme ça. Tout le monde, y compris le Commendatore [Enzo Ferrari] adorait Gilles, parce qu'il était justement comme ça. C'était un homme gentil et une personne véritablement fantastique."

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