Montjuïc Park, la folie d'une époque résumée en un circuit
Bien avant que la F1 n'établisse ses bases espagnoles sur le moderne circuit de Montmeló, l'étape catalane du calendrier se déroulait sur le circuit urbain du Montjuïc, un parc de Barcelone qui offrait un tracé effrayant.
Photo de: Sutton Motorsport Images
Le Circuit de Barcelona-Catalunya, actuel théâtre du Grand Prix d'Espagne de F1, a été construit en 1991 en marge des Jeux Olympiques de Barcelone de 1992. La piste, située à une demi-heure de la ville, a servi à l'épreuve cycliste sur route lors des Jeux, mais l'objectif était évidemment d'y accueillir la F1, ce qui fut fait dès le mois de septembre 1991. Une grande partie des infrastructures de ces mêmes JO fut installée sur la colline de Montjuïc, où quatre éditions du GP d'Espagne se sont déroulées entre 1969 et 1975.
Le parc surplombant la ville a joué un rôle crucial à plusieurs reprises dans l'Histoire de la cité, avec notamment l'Exposition Internationale de 1929, et il devait également accueillir une compétition alternative aux Jeux Olympiques de Berlin de 1936, pour faire front contre Adolf Hitler, mais celle-ci fut annulée à cause de la guerre civile ayant éclaté entre-temps. En sport automobile, Montjuïc a également organisé quatre éditions du Grand Prix de Penya-Rhin, entre 1933 et 1936, le dernier étant remporté par Tazio Nuvolari.
Après la Seconde Guerre Mondiale, le circuit de Pedralbes accueillit le GP d'Espagne, puis fut retiré du calendrier après l'accident des 24 Heures du Mans 1955, car jugé trop rapide et donc trop dangereux. Dans les années 1960, c'est vers Madrid que le Grand Prix d'Espagne de F1 avait lieu, sur le circuit de Jarama, avant que Barcelone ne propose d'organiser sa course en 1969, avec l'objectif de jouer l'alternance entre Jarama et le nouveau circuit urbain de Montjuïc.
Celui-ci avait tout pour offrir un spectacle incomparable. Se frayant un chemin sur la colline historique, le tracé de 3,79 km alternait les lieux emblématiques et les panoramas exceptionnels avec des virages à couper le souffle. Le paddock était situé vers l'ancien Stade olympique, construit pour l'Expo de 1929 et pièce centrale de la rébellion barcelonaise contre les JO organisés par Hitler en 1936.
Après la ligne droite ondulante et une épingle très serrée, le circuit amorçait une descente vers la célèbre fontaine située au pied de Montjuïc, avant un passage devant le musée Poble Espanyol, lui aussi vestige de l'Exposition Internationale de 1929. Après une longue remontée en courbe, les pilotes retrouvaient la ligne droite de départ/arrivée. Mais outre cet aspect très intéressant de circuit urbain rapide, la piste, et en particulier dans ce dernier secteur très rapide, était extrêmement dangereuse. Pour ajouter aux risques de ces portions rapides, elles étaient bordées d'arbres et ces derniers n'étaient séparés des monoplaces que par de simples rails de sécurité.
Et ce danger, qui a épargné la F1 là-bas en 1969, 1971 et 1973, s'est rappelé au souvenir de tous de la pire des manières en 1975, créant avant même le début du week-end un débat sur la sécurité. Plusieurs pilotes ont protesté auprès des instances dirigeantes après qu'une inspection du circuit a montré que les rails de sécurité n'étaient pas correctement montés. Les accidents violents de François Cevert et Helmuth Koinigg, tous deux décédés à cause de rails de sécurité en 1973 et 1974 à Watkins Glen, étaient encore à l'esprit du paddock, qui s'inquiétait du manque de sérieux des installations du circuit de Montjuïc.
La Fédération Internationale du Sport Automobile (FISA) décida d'exiger des corrections de la part des organisateurs, mais celles-ci étaient succinctes et la première séance d'essais libres fut annulée, tandis que peu de pilotes décidèrent de prendre la piste lors de la seconde. Les ajustements effectués le vendredi soir par les organisateurs avec l'aide de mécaniciens des équipes n'étaient pas plus satisfaisants pour les pilotes, et après seulement trois tours le samedi, Emerson Fittipaldi mit pied à terre et partit à l'aéroport. Des menaces de poursuites judiciaires furent lancées par les organisateurs, la rumeur d'une saisie des monoplaces par la garde civile circula dans le paddock, et malgré l'absence du Champion en titre et un vote défavorable des pilotes, la course ne fut pas annulée.
Et c'est le dimanche que les pires peurs du paddock devinrent réalité, lorsque Rolf Stommelen perdit l'aileron arrière de son Embassy Hill, l'envoyant immédiatement dans les rails. Cinq spectateurs, dont un photographe et un pompier, furent fauchés par la monoplace et tués sur le coup. Cette tragédie scella le sort du circuit et la F1 ne revint plus à Montjuïc. La F1 retourna à Jarama puis à Jerez, avant de trouver son circuit espagnol fétiche en 1991 à Montmeló. Montjuïc reste aujourd'hui l'un des endroits les plus emblématique de la ville et un circuit au charme inégalé, mais la Formule 1 n'y avait tout simplement pas sa place.
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