Analyse

Comment Ferrari a discrètement résolu son problème moteur

La forme fluctuante de Ferrari dans la dernière partie de la saison 2022 de Formule 1, surtout entre les courses de Mexico et d'Abu Dhabi, a mis en lumière la gestion des performances moteur par la Scuderia face à ses difficultés techniques.

Les dégâts du feu sur la monoplace de Carlos Sainz, Ferrari F1-75

Photo de: Andy Hone / Motorsport Images

La question de la gestion du moteur V6 turbo hybride Ferrari est devenue prégnante très le premier tiers de saison, notamment lorsque Charles Leclerc a subi deux défaillances qui lui ont coûté, à minima, une nette chance de victoire lors des Grands Prix d'Espagne et d'Azerbaïdjan. L'abandon spectaculaire de Carlos Sainz en Autriche n'a fait que renforcer les craintes autour de l'unité de puissance.

Il avait fallu à l'époque diminuer un peu la puissance du bloc, le temps de rechercher des solutions. Mais après la fin de saison, Mattia Binotto, alors encore à la tête de l'équipe, avait tout de même reconnu que lors de quelques-unes des dernières courses de l'année, l'écurie avait dû à nouveau abaisser la performance moteur face à la crainte d'autres pannes : "Nous avons dû légèrement réduire la puissance. Oui, c'est ce que nous avons dû faire", avait ainsi lancé le technicien italo-suisse.

Cela était particulièrement vrai lors des courses de Mexico et de São Paulo, où un second facteur entrait en jeu, à savoir la configuration technique de l'unité de puissance. En effet, le turbo n'était pas d'une taille idoine pour les contraintes liées à un air moins dense et un oxygène raréfié de ces deux courses en altitude. À Abu Dhabi, en revanche, Ferrari a pu se montrer plus agressif avec le moteur 066/7, avec le sentiment d'avoir trouvé la solution à ses principaux problèmes de fiabilité.

Selon certaines sources, le point faible était la bougie d'allumage dans la préchambre. Il s'agissait de la toute dernière évolution du système de combustion TJI (Turbulent Jet Ignition) que la marque Mahle a fourni à Ferrari à compter de 2016, et qui avait à l'époque permis à l'écurie de refaire une grande partie de son retour sur Mercedes.

Six ans plus tard, d'énormes avancées ont été faites dans le développement d'un système qui a été optimisé pour la toute dernière génération d'unités de puissance qui ont été homologuées cette année afin d'être gelées jusqu'à la fin de la saison 2025. Le système TJI comprend la bougie d'allumage et l'injecteur de carburant. Tous deux sont logés dans un compartiment de la culasse, et les deux éléments travaillent ensemble pour aider à maximiser la puissance.

Seul 2 à 3% du carburant est injecté dans la préchambre de combustion, le reste se répartissant sur la surface de la chambre principale. Le mélange à l'intérieur du "bouchon" qu'est la préchambre est particulièrement riche, tandis que l'agent de combustion dans la chambre principale est plus pauvre, avec plus d'air que de carburant.

Ici deuxième en partant de la gauche, Enrico Gualtieri, est le responsable des unités de puissance chez Ferrari.

Ici deuxième en partant de la gauche, Enrico Gualtieri, est le responsable des unités de puissance chez Ferrari.

L'allumage de la bougie réagit avec le mélange très riche présent dans la préchambre, et provoque la création de jets de plasma à travers les trous percés dans le bouchon. Grâce à une pression très élevée, le mélange pauvre s'auto-allume en plusieurs points de la chambre avec une propagation de la flamme qui s'étend à tout le volume du cylindre. C'est l'allumage "par torches".

Ce système permet de raccourcir le temps de combustion, ce qui présente deux avantages. D'abord, le mélange très pauvre dans la chambre permet de réduire les effets néfastes du cliquetis ce qui permet d'augmenter le taux de compression pour plus de performances. De plus, les équipes étant toujours limitées au niveau de la quantité de carburant pouvant être utilisée en course (actuellement 110 kg), pour une même quantité de carburant injectée, une plus grande efficacité thermique est obtenue ; cela équivaut également à plus de puissance.

Ferrari a poussé loin le développement pour exploiter la pression maximale du système d'injection, qui atteint 500 bars comme le permet le règlement, et a visé cinq décharges pour chaque cycle moteur. Mais ce concept extrême a entraîné une augmentation de la température interne, ce qui a fait souffrir la bougie d'allumage qui a fini par casser.

Les ingénieurs ont donc dû modifier la cartographie pour ne pas pousser la bougie d'allumage au-delà de ses limites, tandis qu'un fournisseur externe a travaillé à la fourniture de nouveaux matériaux pour que la pièce puisse résister aux besoins du moteur fonctionnant à sa puissance maximale.

La performance de Ferrari à Abu Dhabi suggère que le problème de bougie semble avoir été résolu, ce qui sera un grand coup de pouce pour les espoirs de Ferrari pour 2023, où la répétition de tels problèmes de fiabilité serait désastreuse.

Lire aussi :

Avec Franco Nugnes et Jonathan Noble

Rejoignez la communauté Motorsport

Commentez cet article

Voir aussi :

Article précédent Une autre innovation Mercedes interdite par la FIA
Article suivant Mercedes confirme le travail mené par Hamilton en début de saison

Meilleurs commentaires

Il n'y a pas de commentaire pour le moment. Souhaitez-vous en écrire un ?

Abonnez-vous gratuitement

  • Accédez rapidement à vos articles favoris

  • Gérez les alertes sur les infos de dernière minute et vos pilotes préférés

  • Donnez votre avis en commentant l'article

Motorsport Prime

Découvrez du contenu premium
S'abonner

Édition

France