Cosworth, le moteur de Formule 1 le plus victorieux

Le vénérable moteur Ford Cosworth DFV a profité d’une très longue carrière et a remporté un nombre record de victoires en Formule 1.

Le moteur Ford Cosworth DFV à l'arrière de la Lotus

Photo de: LAT Images

Le V8 Cosworth DFV a permis à un très grand nombre d’écuries, essentiellement britanniques, de courir en Grand Prix à un prix raisonnable. Pour cette raison, les grilles de départ sont demeurées bien fournies en dépit des soubresauts de l’économie mondiale au début des années 70 et, en particulier, des graves conséquences du choc pétrolier de 1973.

Une idée de Colin Chapman

La naissance de ce moteur remonte au milieu des années 60. Les moteurs atmosphériques de Formule 1 doivent alors avoir une cylindrée maximale de trois litres et seuls quatre motoristes sont impliqués : Ferrari, BRM, Climax et Honda. Colin Chapman, patron de Lotus, voudrait bien obtenir un nouveau moteur, plus léger, compact et moderne, car ses Lotus sont propulsées par des BRM dont l'âge se fait sentir.

Cosworth Engineering : Bill Brown, Keith Duckworth, Mike Costin et Ben Rood

Le V8 BRM de la Lotus 33 n’est plus vraiment compétitif et le monstrueux H16 de la Lotus 43 est effroyablement lourd, gourmand en carburant et surtout extrêmement complexe avec ses deux vilebrequins et ses 64 soupapes !

Walter Hayes, directeur des affaires publiques chez Ford, est un grand ami de Chapman. Ce dernier a une idée : celle de faire produire un moteur par un grand spécialiste et de refiler la facture à un constructeur automobile qui rebadgerait le moteur à son nom. Ce concept fut repris beaucoup plus tard par Ron Dennis qui fit fabriquer un moteur V6 turbo par Porsche tout en faisant payer TAG.

Pourquoi pas Ford ?

Au début de l’année 1965, Chapman va voir Keith Duckworth de la firme Cosworth pour sonder le terrain. Duckworth estime que la conception, la recherche, le développement et la production de cinq moteurs coûteraient la somme de 100 000 livres sterling. Un peu plus tard, Hayes, convaincu par Chapman, profite d’un important diner avec Henry Ford II pour lui parler du projet de financer un moteur de F1 qui porterait le nom de Ford.

Qu’est ce que ce moteur fera pour nous ?” demande Ford. “Il gagnera des Grands Prix et je crois qu’il remportera le Championnat du monde”, lui répond Hayes. Il faut se souvenir qu’à cette époque, le constructeur automobile américain visait très haut et fourbissait ses armes pour battre Ferrari aux 24 Heures du Mans. Ainsi, l'idée de faire mordre la poussière à Ferrari en Grand Prix a séduit Henry Ford II. En octobre 1965, le feu vert est donné.

Jim Clark (Lotus 49 Ford) au Grand Prix du Canada 1967

Duckworth et son équipe travaillent donc sur deux moteurs qui sont complémentaires : un quatre cylindres à double arbre à cames en tête, le FVA, destiné à la Formule 2 et le V8 DFV, pour Double Four Valves, ouvert à 90 degrés et doté aussi de quatre soupapes par cylindre.

Colin Chapman confie la conception de la Lotus 49 à Maurice Philippe. Le moteur Cosworth V8 DFV et la coque de la 49 épouseront la morphologie du premier pilote Lotus, Jim Clark, quand il sera assis dans la monoplace ; c’est-à-dire en forme de ‘V’, étroit à la base et large en hauteur. Le moteur devient une composante du châssis, donc porteur, et est boulonné directement à la monocoque en aluminium.

Des débuts victorieux

Le premier DFV est livré à Lotus le 25 avril 1967. Il s’agit d’un V8 d’une cylindrée de 2993 cc qui développe 420 chevaux à 9000 tours/minute. Un premier roulage de la Lotus 49 est effectué avec Mike Costin de Cosworth au volant, puis avec Dick Scammell, mécanicien Lotus. Par la suite, Graham Hill poursuit le développement sur la piste de Hethel située tout près des ateliers de l’écurie. Clark, exilé en France à cause de sombres soucis de taxation du gouvernement britannique, ne verra pas la voiture avant son premier engagement officiel !

Tout n’est pas rose, car le DFV vibre terriblement, ce qui cause des bris répétitifs de pignons de commande de distribution. De plus, il souffre aussi de quelques ennuis de lubrification.

Deux Lotus 49-Ford sont inscrites au Grand Prix des Pays-Bas sur le circuit de Zandvoort le 4 juin. Hill place sa Lotus 49 en pole position, mais abandonne au 11e passage sur bris de pignon de distribution. Clark, qui a démarré de la huitième place, remonte ses rivaux et décroche la victoire. Première course du DFV et déjà une victoire !

La Rondeau M379B Ford n°16 Jean Rondeau aux 24 Heures du Mans 1980 (Jean Rondeau, Jean-Pierre Jaussaud)

La commercialisation du DFV

Dans son contrat avec Ford et Cosworth, Lotus détient l’exclusivité du DFV durant un an. Courant 1968, Cosworth commence à le vendre aux écuries intéressées pour la somme de 7500 £ (soit l’équivalent de 105 000 € en monnaie actuelle). Le DFV, puissant, fiable et économique, du style “plug-and-play”, fait les beaux jours de dizaines d’écuries, et permet à Lotus, Tyrrell, McLaren et Brabham de décrocher plusieurs titres mondiaux.

Le DFV aura couru pendant 17 saisons complètes. Entre le triomphe de Jim Clark aux Pays-Bas en 1967 et celui de Michele Alboreto à bord d’une Tyrrell 012, le vénérable DFV aura remporté 155 victoires en Grands Prix. Il aura permis à 12 pilotes d’être sacrés Champions du monde et décroché dix titres mondiaux des constructeurs.

À noter que le DFV n’a pas vécu qu’en Formule 1. Différentes versions ont été utilisées en Formule 3000, en Endurance, avec deux victoires aux 24 Heures du Mans, et aux États-Unis avec neuf titres en série CART grâce au Cosworth DFX turbo.

Pour un faible investissement initial de 100 000 £ (soit l’équivalent de 1,4 million d'euros en monnaie actuelle), Ford a été directement associé au moteur de F1 le plus victorieux !

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