Départ solitaire de Hamilton : image ridicule ou atout pour la F1 ?

Selon les différents points de vue, le départ arrêté de Lewis Hamilton seul sur la grille lors du Grand Prix de Hongrie a été qualifié de fabuleux ou de farce. Mais est-ce que cela a rendu le championnat trop ridicule dans un moment de la saison aussi important ?

Lewis Hamilton, Mercedes W12

Mark Sutton / Motorsport Images

La Formule 1 aime changer ses règles. À la fin de cette année, la quasi-totalité du règlement relatif à la conception des voitures sera modifiée afin d'encourager des courses plus serrées et moins prévisibles. L'objectif est de faire en sorte que des batailles passionnantes, comme celle qui a opposé Fernando Alonso à Lewis Hamilton à Budapest le week-end dernier, deviennent la norme plutôt que l'exception. Un objectif ambitieux, alors préparez-vous à ce que les résultats ne soient peut-être pas aussi spectaculaires...

Mais il s'agit là d'un sujet à discuter un autre jour (probablement lors de l'ouverture de la saison 2022), car le Grand Prix de Hongrie du week-end dernier a produit un autre point de discussion axé sur les règles. Celui-ci concernait également Hamilton – plus précisément, son départ en solitaire sur la grille de départ après le drapeau rouge au début de la course, 67 tours avant la victoire splendide d’Esteban Ocon.

Les règles de la F1 ont été modifiées en 2017 (non sans quelques hésitations) pour permettre des départs arrêtés si les courses commençaient par des tours de reconnaissance derrière la voiture de sécurité sur une piste détrempée. Un an plus tard, une mise à jour a permis l'introduction de départs arrêtés supplémentaires en cas de drapeau rouge, ce qui ne se faisait plus depuis 2001.

Le départ du Grand Prix d'Italie 2020 a été la première réapparition de la règle du départ arrêté, et cela s'est produit cinq fois depuis (mais pas lors du Grand Prix d’Émilie-Romagne 2021, où une ligne sèche se dégageait uniquement sur le côté droit de la grille, ce qui a poussé la FIA à appliquer un départ lancé derrière la voiture de sécurité (que Max Verstappen a d’ailleurs failli rater).

Cette modification du règlement a été un succès, compte tenu des rebondissements offerts par ces "deuxièmes départs" (le raté de Lewis Hamilton à Bakou, ou bien l’envolée de Charles Leclerc en tête de la course le mois dernier, à Silverstone). Seul George Russell pourrait regretter que le Grand Prix de Toscane 2020 ait nécessité deux redémarrages, étant donné qu'un mauvais troisième départ arrêté lui a coûté ce qui auraient été ses premiers points pour Williams (et en F1), 19 courses avant qu'ils n'arrivent de façon si émouvante pour le Britannique et Nicholas Latifi le week-end dernier.

Mais en Hongrie, le départ arrêté a pris une tournure étrange étant donné les circonstances humides puis sèches de la piste.

Contrairement à Hockenheim en 2019 (qui était également un départ sur piste humide, après un lancement initial sous voiture de sécurité, donc pas un départ arrêté après drapeau rouge), les conditions avaient tellement changé avec le soleil que les pilotes ont dû changer leurs intermédiaires pour des slicks. Et rapidement. En effet, le soleil était apparu durant les 30 minutes de drapeau rouge qui ont suivi les accidents provoqués Valtteri Bottas et Lance Stroll, changeant complètement les conditions.

Cela a conduit 14 des 15 pilotes restants à rentrer dans les stands, laissant Hamilton seul sur la grille. "Des tas de gens sont déjà entrés dans la pitlane", a-t-il rapporté à Mercedes. "Compris, nous pensons que c'est la bonne décision", a répondu Peter Bonnington.

Le peloton avait joué la carte de la prudence en remettant des intermédiaires, le temps de la relance dans la pitlane, ce qui a surpris Mercedes. Mais avec la possibilité pour les pilotes de discuter de la tactique avec leurs ingénieurs lors du tour de sortie des stands derrière la voiture de sécurité (par opposition au tour de formation, où cela est interdit, en témoignent les pénalités infligées aux pilotes Haas à Budapest en 2020), des stratégies audacieuses pouvaient être tentées.

Et les pilotes ont saisi leur chance, en nombre. Mais la décision n’a pas été facile : Ocon disait que c'était "un crève-cœur", sachant qu'il risquait une position aussi excellente qu’inattendue en course, sur un circuit où les dépassements sont difficiles, avec un mauvais arrêt ou en étant surpris à attendre que les voitures le dépassent dans la voie des stands.

Si Hamilton était lui aussi rentré, voici ce qui se serait passé. "Une fois que la dernière voiture aurait été dans la pitlane, le signal de départ aurait été lancé", selon le directeur de course de la F1, Michael Masi. "Puis, une fois qu'il aurait été déclenché, le feu vert à la sortie des stands se serait allumé et l'ordre aurait été celui de la sortie des stands."

"Christian [Bryll, le starter officiel de la course de F1] aurait activé les feux de départ, comme d'habitude une fois que la dernière voiture aurait été dans la pitlane. Les feux de départ auraient été activés, cinq feux rouges, les feux rouges se seraient éteints, une fois que les feux rouges se seraient éteints, la sortie des stands se serait ouverte. Cela aurait été indépendant [des arrêts aux stands], parce qu'effectivement la course de notre côté, ou la reprise, n'a pas recommencé jusqu'à ce moment-là."

Mercedes a maintenu que sa décision de laisser Hamilton en piste était "à 100% la bonne décision", selon le patron de l'équipe, Toto Wolff. En effet, la position de l'équipe au début de la pitlane l'aurait rendue vulnérable, du fait qu’Hamilton aurait dû attendre que les voitures passent toutes une fois que ses gommes auraient été changées.

Une défense logique, mais les propres calculs de Mercedes ont estimé qu'il se serait aligné en sixième position dans la file d'attente – probablement aidé par Alonso qui a semblé ralentir pour créer un écart afin de permettre à Ocon de quitter le stand Alpine avant son arrivée. Pourtant, la sixième place est bien meilleure que la 14e, à 3,4 secondes de la 13e, où Hamilton s'est retrouvé après avoir effectué son seul et unique tour de course complet sur les pneus au liseré vert.

En ce qui concerne le fait qu'Hamilton prenne le départ en solo et l'image de la F1, d'un certain point de vue, une telle scène était bizarre, voire même stupide. Mais c'était aussi un excellent divertissement sur le moment, et cela a planté le décor pour le reste de la course. Ocon s'est installé en tête devant son poursuivant Sebastian Vettel, et Hamilton a dû remonter depuis l'arrière du peloton.

Empêcher les pilotes de changer de pneus dans des circonstances telles que le restart de dimanche dernier reviendrait à réglementer des moments légendaires de la F1, tels que celui de Markus Winkelhock sur sa Spyker au Nürburgring, en 2007.

S'il était revenu devant Alonso dans la file d'attente, la logique veut qu'Hamilton aurait gagné cette course avec une facilité déconcertante. En revanche, il aurait probablement eu besoin d’une stratégie agressive à deux arrêts après avoir créé un écart suffisant avec ses poursuivants, la nature étroite du Hungaroring prouvant que ses dépassements précoces sur Antonio Giovinazzi et Mick Schumacher n'étaient pas si simples.

De plus, empêcher les pilotes de changer de pneus dans des circonstances telles que le restart de dimanche dernier reviendrait à réglementer des moments légendaires de la F1, tels que celui de Markus Winkelhock sur sa Spyker au Nürburgring, en 2007, et comme cela a été rappelé l'année dernière avec les pénalités infligées à Kevin Magnussen et Romain Grosjean.

Il est presque certain qu'il faut procéder à un examen de sécurité plus large de toutes les voitures et de tous les équipes qui se pressent dans la voie des stands au même moment, car l'accident entre l’Alfa Romeo de Kimi Räikkönen et la Haas de Nikita Mazepin était potentiellement très dangereux, sans tenir compte du fait qu’il a coûté l’abandon au Russe et a retardé Pierre Gasly, coincé derrière l’épave du numéro 9.

Mais, dans l'ensemble, la vue d'un Champion du monde prenant le départ en solo restera une image forte de la F1, avant une course brillante qui aurait pu être un pétard mouillé sans ce choix stratégique de Mercedes.

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