Joann Villeneuve dissocie la mort de Gilles de la "trahison" d'Imola
Longtemps pudique à l'évocation de l'accident qui a coûté la vie à Gilles Villeneuve, sa femme Joann a décidé de témoigner dans un documentaire réalisé en Grande-Bretagne. L'occasion, notamment, de rompre avec le "mythe" qui associe inévitablement et inlassablement les événements d'Imola 1982 à ceux de Zolder.
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Plus de quarante ans après la mort tragique de Gilles Villeneuve, l'histoire déjà maintes fois racontée fait l'objet d'un nouveau documentaire diffusé par Sky en Grande-Bretagne. Avec un prisme inédit puisque la femme du pilote canadien, Joann Villeneuve, a accepté de livrer son témoignage, ce qu'elle se refusait à faire jusqu'à présent.
"C'était tout simplement trop difficile de raconter l'histoire avant", explique-t-elle dans un entretien avec le Guardian. "Mais lorsque j'ai décidé que c'était le moment, je me suis rendu compte que les émotions ressenties à l'époque étaient toujours les mêmes. Les faits sont les faits et on ne peut pas les changer. Ils s'accompagnent d'émotions, dont la plus forte a été la trahison. Parfois on se dit 'J'ai peut-être réagi de manière excessive à l'époque', mais on se rend compte que non, c'est toujours comme ça que je vois les choses aujourd'hui."
Tout ou presque a été dit et écrit de ce terrible épisode de la saison 1982, à commencer par le chapitre de ce qui a donc été vécu comme une traîtrise. À Imola, Didier Pironi n'avait pas respecté les consignes de Ferrari et ainsi privé son coéquipier Gilles Villeneuve de la victoire, faisant naître chez le Québécois un profond sentiment de colère.
"Pour Gilles, la loyauté était quelque chose de si fort qu'il n'avait jamais imaginé que ça puisse arriver", confirme Joann Villeneuve. "La colère qu'il ressentait se mêlait à la déception d'avoir été trompé par Didier. […] Gilles était un pilote sans pitié, mais en piste il était parfaitement conscient des dangers. Gilles était un pilote fair-play et honnête, tout le monde l'a vu avec Arnoux à Dijon, ils étaient roue contre roue mais ils avaient encore assez de respect l'un pour l'autre. Pour lui, c'était ça la course, ne pas aller à l'encontre des règles de l'équipe pour gagner."
Ce n'était pas vraiment la faute de quelqu'un. Cela aurait pu arriver de toute manière sans les événements d'Imola.
Joann Villeneuve
Lorsque Gilles Villeneuve se tue deux semaines plus tard, lors des qualifications du Grand Prix de Belgique à Zolder, le lien entre cet ostensible sentiment de trahison et la mésentente fatale avec Jochen Mass, sur qui il revenait à vive allure, est immédiat. L'enchaînement des événements rend toujours aujourd'hui compliquée la lecture de ce qui s'est passé en piste mais pour Joann Villeneuve, il ne fait aucun doute que ce tragique accident n'avait rien à voir avec ce qu'éprouvait son mari depuis le Grand Prix de Saint-Marin.
"Il était toujours en colère, mais quand Gilles était dans la voiture, il était dans une bulle et rien d'autre ne pouvait entrer", décrit-elle. "Il était en mode course et tout ce qui se passait à l'extérieur n'affectait pas vraiment son pilotage. L'accident est vraiment dû à un malentendu avec Jochen. Jochen essayait de s'écarter de la trajectoire. Gilles a pensé qu'il resterait [sur sa trajectoire], c'était juste une erreur stupide de la part des deux, ce n'était pas vraiment la faute de quelqu'un. Cela aurait pu arriver de toute manière sans les événements d'Imola."
Joann Villeneuve en 2018 lors d'un hommage rendu à Gilles.
Quatre décennies plus tard, Joann Villeneuve évoque des sentiments qui n'ont pas évolué malgré le temps qui passe, mais elle a également une forme d'empathie pour ce qu'a enduré ensuite Didier Pironi, jusqu'à sa mort dans un accident de bateau en 1987. "Je pense qu'il a été surpris par la réaction de Gilles", avance-t-elle. "Je crois qu'il pensait pouvoir régler le problème, mais il n'a pas pu le faire après le décès de Gilles. C'est un lourd fardeau qu'il a dû porter."
Discrète, Joann Villeneuve a ensuite accompagné et soutenu la carrière de son fils Jacques, auréolé en 1997 du titre mondial en Formule 1 avec Williams-Renault. Le sport automobile lui avait pris celui qu'elle aimait, mais il demeurait inconcevable pour elle de refuser ce choix de carrière à son enfant.
"Comment aurais-je pu dire non à Jacques alors que j'avais soutenu son père qui faisait la même chose ?", interroge-t-elle dans les colonnes de The Independent. "Je ne pouvais pas me résoudre à briser son rêve. Il s'agissait plutôt de dissocier les choses. Il y a la fierté d'avoir vu Jacques réussir dans quelque chose de si difficile. Il avait tellement de pression et d'attentes autour de lui quand il a commencé, et il a surmonté tout ça."
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