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Formule 1 Grand Prix du Portugal

Le jour où Häkkinen a "botté les fesses" de Senna chez McLaren

Le Grand Prix du Portugal 1993 était important pour un certain nombre de raisons, notamment l'annonce de la retraite d'Alain Prost à la veille de son quatrième titre mondial, mais aussi pour un jeune Finlandais du nom de Mika Häkkinen…

Mika Hakkinen prend la tête pour sa première course avec McLaren

Mika Häkkinen avait passé la majorité de la saison 1993 sur la touche, à cause de la décision tardive d'Ayrton Senna de rester chez McLaren – sans s'engager pour l'année entière d'un coup, mais course par course – aux côtés de Michael Andretti. Suite au retrait de Honda, le Brésilien n'était pas convaincu par le potentiel du V8 Ford face aux Williams-Renault d'Alain Prost et Damon Hill, mais il a remporté trois des six premières courses de la saison. Williams a dominé les sept manches suivantes, et Andretti a été remercié après le Grand Prix d'Italie malgré un podium. Häkkinen est arrivé pour les trois derniers rendez-vous face à Senna.

Lors de la première séance qualificative à Estoril, Häkkinen a frappé fort en tournant à deux millièmes de Senna, avant de battre le triple Champion du monde de 48 millièmes le samedi. L'a-t-il pris par surprise ?

"Une surprise ? Assurément !" sourit Mika. "Je trouvais que les essais hivernaux s'étaient bien passés pour lui, et comme on peut s'y attendre il fait froid à ce moment-là, alors les pneus sont relativement contents, on ne les fait pas surchauffer si facilement. Ayrton a signé des chronos rapides, et je crois qu'il se sentait à l'aise et a dit : 'OK McLaren, on y va'. Une fois que la saison a commencé, c'était avéré, bien que Michael Andretti n'ait pas eu l'air si performant, en raison des accidents qu'il subissait."

Mika Hakkinen with Ron Dennis and Giorgio Ascanelli
Mika Hakkinen in his first race for McLaren Ford

"Après quelques courses, le sentiment était que la voiture n'était en réalité pas si rapide : Ayrton perdait beaucoup de temps sur Alain Prost, il était tout le temps à une demi-seconde voire une seconde d'Alain. Il a perdu beaucoup de motivation. Avant Estoril, je sentais qu'Ayrton n'était pas au maximum de ses performances, et bien sûr son coéquipier ne le poussait pas non plus, certainement pas au maximum. Je suis alors arrivé à ses côtés à Estoril, et je lui ai botté les fesses !"

Senna s'est vite rendu compte que son nouveau coéquipier, rapide, n'allait pas se laisser marcher sur les pieds, et il a eu un gros accident lors du warm-up. Häkkinen lui-même a été contraint à l'abandon par une sortie de piste lors de sa première course pour McLaren, mais pas sans avoir doublé la Williams de Prost à l'extinction des feux et s'être battu pour la tête avec la Ferrari de Jean Alesi. Senna a rapidement dépassé Häkkinen grâce à un freinage tardif afin de pourchasser Alesi, mais aucune McLaren n'est passée sous le drapeau à damier : en plus de l'accident du Finlandais, le Brésilien a subi une panne moteur.

Cependant, après cette déception, Senna a remporté les deux dernières courses de l'année… "Je crois qu'il s'est vraiment réveillé", estime Häkkinen. "Ce triple Champion du monde se demandait : 'Mais qui est ce blondinet finlandais qui vient me botter les fesses ?', vous voyez !"

Mika Hakkinen battles with Jean Alesi

Mika Häkkinen bataille avec Jean Alesi

"Puis la bataille a véritablement commencé. Il s'est mis à travailler très dur, il avait un ingénieur italien appelé Giorgio [Ascanelli] et ils ont absolument maximisé le potentiel de la voiture. Je me suis rendu compte, juste après le Grand Prix d'Estoril, à quel point j'étais amateur à l'époque par rapport à Ayrton."

"Il a vraiment commencé à travailler dur et, bien sûr, il a eu d'excellents résultats lors des derniers Grands Prix de la saison. Même si nos chronos étaient proches, il parvenait bien mieux à maximiser ses performances ; il avait tant d'expérience !"

Après avoir frappé un grand coup au début, Häkkinen s'est vu donner quelques leçons par Senna. "Certainement", admet-il. "On a vraiment besoin d'une bonne équipe autour de soi. Nous avions tous deux McLaren autour de nous, mais il avait son ingénieur en chef, son ingénieur données, son mécanicien numéro 1 – or, ce sont la manière dont on travaille et les domaines techniques dans lesquels on le fait qui font la différence. Il était très soigneusement concentré, je le voyais."

"On ne peut pas rendre la voiture parfaite dans chaque virage, des compromis sont nécessaires ; savoir quels compromis faire est crucial, et Ayrton était très bon dans ce domaine. J'ai beaucoup appris auprès de lui, comme ça : ne compromets pas la voiture dans un virage où tu pourrais gagner beaucoup de temps, fais-le là où tu n'en perdras pas tant que ça, et ton talent de pilotage peut compenser."

Ayrton Senna, McLaren leads Alain Prost, Williams; Michael Schumacher, Benetton; Damon Hill, Williams; Gerhard Berger, Ferrari; Mika Hakkinen McLaren and Jean Alesi, Ferrari

Ayrton Senna (McLaren) devance Alain Prost (Williams) au départ

"Il faut vraiment motiver toute l'équipe en permanence. Rappelez-vous quand Ayrton a rejoint McLaren, la voiture déchirait tout ! Ils gagnaient quasiment chaque course, ils étaient fantastiques. Ayrton a donc fait l'expérience de McLaren dans une situation qui était compliquée comme 1993, mais en fin de compte la voiture n'était pas si mauvaise, elle n'était simplement pas fantastique."

"Je pense que dans une période qui n'est pas fantastique, dans un mauvais moment, c'est ce jour-là qu'il faut travailler encore plus dur. Les bons ingénieurs, les bons mécaniciens, il faut en prendre soin, il faut les motiver. Si l'on n'a pas de succès, ils se sentent aussi mal que moi – c'est horrible ! Il faut donc avoir l'esprit d'équipe et travailler vraiment dur pour avoir du succès. Mon opinion est qu'à cette époque, il ne soutenait parfois pas suffisamment les membres de l'équipe."

Häkkinen allait signer le premier podium de sa carrière bourgeonnante en Formule 1 lors de la course suivante à Suzuka. Qu'a-t-il ressenti ? "Incroyable", sourit-il à l'évocation de ce souvenir, avant d'ajouter: "Bien sûr, j'étais ravi, mais – excusez ma grossièreté – ça m'emmerdait de ne pas avoir gagné ! Cela m'a donné beaucoup de confiance, et ça me faisait plaisir d'avoir montré à l'écurie que j'en étais capable. Dans ces circonstances, j'étais très content d'y être, en tant que pilote McLaren aux côtés de mon coéquipier et d'Alain évidemment. Me tenir à côté de ces grands champions sur le podium, ça m'a motivé."

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1st: Ayrton Senna McLaren, centre.
2nd: Alain Prost Williams, left.
3rd: Mika Hakkinen McLaren, right.

1st: Ayrton Senna McLaren, centre. 2nd: Alain Prost Williams, left. 3rd: Mika Hakkinen McLaren, right.

Photo by: Sutton Images

Podium: race winner Ayrton Senna, McLaren, third place Mika Hakkinen, McLaren

Podium: race winner Ayrton Senna, McLaren, third place Mika Hakkinen, McLaren

Photo by: Sutton Images

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