Interview

Entretien - Les ambitions de titre de Max Verstappen

Juste avant de jouer la victoire au Grand Prix de Bahreïn avec une Red Bull finalement dominatrice, Max Verstappen a accordé une longue interview à Motorsport.com. Ses progrès depuis ses débuts, ses espoirs pour la saison à venir, la fin du règne de Hamilton... il s'est confié sur ces sujets en détail.

L'auteur de la pole position, Max Verstappen, Red Bull Racing

Red Bull Content Pool

Motorsport.com : Max, quand la nouvelle Red Bull a été dévoilée à Silverstone, vous avez dit que vous ne vouliez pas vous enflammer pour 2021 – était-ce une stratégie délibérée ?

Max Verstappen : Ce n'est pas une stratégie, je suis comme ça, c'est tout. J'ai toujours été comme ça. Je suis quelqu'un de très détendu, je crois. J'ai cette attitude, du genre "on verra". Bref, il y a beaucoup de gens qui parlent tout le temps, et je pense qu'il est plus important de s'exprimer en piste. Vous savez, on peut rendre tout vraiment beau avant de sauter dans la voiture, mais je trouve bien plus important d'être simplement compétitif en piste. Et nous avons travaillé dur pour améliorer la voiture après l'an dernier. C'est pourquoi je me suis exprimé ainsi. Rien ne se cache derrière ça.

Vous avez appelé cette intersaison la meilleure que vous ayez connue avec Red Bull – pourquoi ça ? Y a-t-il quelque chose en coulisses qui vous a rendu bien plus optimiste qu'auparavant ?

Il ne s'agit pas d'être premier ou quoi que ce soit, mais plutôt de la sensation personnelle dans la voiture, des choses que l'on a testées en matière de réglages, et de ne pas avoir de problèmes sur la voiture en général. Pas de problèmes pour le moteur, pas de problèmes sur la voiture, rien qui ne casse. Et je pense que vu comme ça, c'était notre meilleure préparation depuis toutes ces années.

Sergio Pérez est votre quatrième coéquipier chez Red Bull, après Daniel Ricciardo, Pierre Gasly et Alexander Albon. L'identité de votre partenaire vous importe-t-elle ?

En fin de compte, non. En tant qu'équipe, nous voulons évidemment marquer autant de points que possible. Et de mon côté, je veux en marquer autant que possible moi-même et essayer d'obtenir les meilleurs résultats.

Max Verstappen, Red Bull Racing RB16B et Sergio Perez, Red Bull Racing RB16B  sur la grille

Revenons à votre première victoire en Grand Prix, en 2016. Avez-vous l'impression d'être quelqu'un de différent depuis lors ? D'être un pilote différent également ?

Eh bien, en prenant de plus en plus d'expérience, tout devient naturellement un peu plus facile, et on comprend mieux la voiture – ainsi que, surtout si l'on reste avec la même équipe, comment tout fonctionne dans l'écurie. Moi-même, en tant que personne, j'évolue forcément, mais je pense que c'est naturel, je vieillis juste. En général, je pense rester le même.

Avez-vous le sentiment d'être un pilote plus complet ? Avez-vous encore du travail à faire dans certains domaines ?

C'est juste la compréhension générale de la F1, de la monoplace elle-même, au sein de l'équipe ; du pilotage, de la gestion de certaines situations, qu'il s'agisse du départ, du premier tour ou de la gestion des pneus. Toutes ces choses-là, je pense qu'on les fait de mieux en mieux, simplement parce qu'on les fait plus souvent. Et je pense que c'est juste très normal. Parce que quand on est dans sa première année en F1, par rapport à la sixième ou à la septième, je pense qu'on devient naturellement un meilleur pilote.

Êtes-vous désormais un meilleur leader chez Red Bull ? Avez-vous appris à être un leader ?

Je pense que l'on ne peut être un leader dans sa première année car on est rookie. Personne n'attend donc que l'on soit un leader, je pense qu'initialement l'on est plutôt quelqu'un qui écoute et qui apprend, on assimile toutes ces choses et on décide lesquelles sont bonnes à utiliser en piste, concrètement. Mais bien sûr, au fil des années, comme je l'ai dit, avec une compréhension croissante de ce qui se passe avec la voiture, on sait ce que l'on veut et il est bien plus simple d'aller dans une certaine direction.

Max Verstappen, Red Bull Racing RB16B, passe les panneaux

L'an dernier, il y avait des moments où vous étiez satisfait d'être deuxième compte tenu du rythme des Mercedes, comme au Grand Prix de Grande-Bretagne. Plus tard, vous étiez plus frustré d'être deuxième, par exemple lors de la première course de Bahreïn. Vous confirmez ? Votre état d'esprit a-t-il changé ?

Je pense qu'ils avaient la voiture dominatrice, même à la fin de l'année. Mais bien sûr, quand on est naturellement un peu plus proche, on en a forcément encore plus envie, c'est ainsi que je suis. Je ne me contente jamais d'accepter ce qui se passe. Bien sûr, il faut être réaliste, et quand leur voiture est si dominatrice que l'on ne peut rien faire, on accepte simplement la position dans laquelle on est. Mais quand on est quelques centièmes ou un dixième derrière, forcément, on en veut toujours plus.

Malgré tout, cette voiture était si dominatrice que c'était juste impossible la plupart du temps. Mais j'essayais toujours, je faisais toujours de mon mieux. Et même pour la première course de Bahreïn, leur voiture était bien plus rapide. Mais bien sûr, j'essaie toujours de mettre la pression et de leur compliquer un peu la vie.

Comment avez-vous vécu ces moments où vous aviez tout donné mais étiez quand même assis à la troisième place pour la conférence de presse ? Que ressentiez-vous quand vous vous prépariez à parler mais étiez deuxième ou troisième ?

C'est comme ça, c'est tout. Bien sûr, bravo à eux d'avoir une si bonne voiture. Mais personnellement, encore une fois, j'essaie juste d'en tirer le maximum, de faire de mon mieux. Et si c'est la troisième place, c'est la troisième place, il faut juste l'accepter. Car si on ne l'accepte pas, on devient très frustré et on ne prend pas vraiment de plaisir à vivre chaque week-end de course. C'est donc ce que j'ai fait – vous savez, l'accepter. Bien sûr, je veux encore être proche et j'ai essayé de leur compliquer la vie. Mais dans l'ensemble, telle était ma position, évidemment.

À part vous, qui est le meilleur pilote en F1 ?

À part moi ? En ce moment ? Un pilote actuel ? Oh, vous savez, c'est super dur, mais bien sûr, il faut féliciter Lewis pour la manière dont il a géré toutes ces années, il est toujours revenu avec humilité et a gagné tous ces Grands Prix et ces championnats. Lewis est certainement incontournable. Mais, bien sûr, il y a quand même plein d'autres pilotes en Formule 1 que je trouve très bons, très compétitifs, et qui auraient été très bons dans cette voiture également.

Il n'empêche, évidemment, que la manière dont Lewis a gagné – notamment parfois dans des courses délicates, comme l'an dernier en Turquie, il s'est très bien débrouillé pour gagner cette course, à mon avis. Bref, il est vraiment l'un des meilleurs de tous les temps en Formule 1.

Lewis Hamilton, Mercedes F1 W11

Vous arrive-t-il de regarder ce qu'il fait – comme en Turquie – et de vous dire : "Si je me retrouve dans une situation similaire, peut-être que je ferai pareil" ?

Non, je ne vois pas les choses comme ça. J'étudie en premier lieu ce que j'aurais pu faire mieux ou différemment, à chaque course. C'est vrai que je regarde les autres, j'analyse les choses, mais je ne suis pas du genre à copier. Je suis moi-même. Parce que si l'on copie les autres, on est forcément derrière, tout d'abord, parce qu'on n'innove pas et on ne devient pas meilleur qu'eux. Mais bien sûr, on peut se contenter de regarder, d'observer. Mais en fin de compte, je suis moi-même et je pense que c'est ce qui marche le mieux pour moi – être moi-même.

Vous étiez dans une position presque unique en 2020 : le seul pilote régulièrement capable de se rapprocher des Mercedes. Qu'avez-vous appris ? Avez-vous observé des faiblesses ?

Je pense que chaque écurie a ses faiblesses. Mais de manière générale, il nous faut juste nous assurer d'avoir une voiture plus rapide – alors tout devient bien plus facile. Car si l'on part devant et qu'on a une meilleure voiture, alors c'est bien plus facile de marquer les points, sans prendre aucun risque. Voilà ce sur quoi nous devons travailler. Car je suis sûr que si nous avons cette voiture rapide... Je pense que nous sommes une écurie très forte, notamment dans la manière dont nous opérons. Je ne vois donc aucune faiblesse dans ce domaine [pour Red Bull]. Nous devons nous concentrer sur le fait d'avoir une voiture rapide.

Avez-vous réfléchi à ce qui est requis pour remporter un titre en F1 ? Car votre ascension fulgurante vers la F1 fait que vous n'avez pas de titre en sport auto, vous n'avez passé qu'un an en formules de promotion. Avez-vous réfléchi au fait de participer à une bataille pour le titre et d'accepter parfois un résultat moindre plutôt que d'essayer de gagner chaque course ?

C'est très différent [de jouer le titre]. Bien sûr, dans ce scénario, il n'est pas nécessaire de gagner chaque bataille ou chaque course. Mais c'est naturel. Le fait que je n'ai pas remporté de titre, par exemple, ne veut pas dire que je ne comprends pas ça, car je crois avoir gagné de nombreux titres en karting et, en somme, c'est pareil – on choisit ses batailles. De plus, je n'ai pu tenter qu'une fois de remporter le titre en F3, et manifestement, ça ne s'est pas fait.

Je pense que de toute façon, une fois qu'on est dans cette position où l'on a la voiture pour se battre pour le titre, tout devient bien plus facile. Bien sûr, il y a la pression pour gagner un championnat, parce qu'on combat d'autres pilotes. Mais globalement, je pense que c'est une bien meilleure situation que de ne jamais [se battre pour le titre]. Et il faut prendre un peu plus de risques au premier virage ou dans tel domaine en course. Puis, bien sûr, il peut y avoir des erreurs. Je suis impatient d'avoir une voiture pour me battre au championnat, j'espère en avoir une, car je pense que c'est là que je suis encore meilleur – c'est bien plus agréable et bien plus facile à gérer.

La fin de la carrière de Lewis Hamilton approche. À quel point est-ce important pour vous d'être celui qui mettra un terme à son règne ?

Pour moi, en fin de compte, peu importe contre quel pilote on se bat. Je pense qu'il y a énormément de bons pilotes en Formule 1. Bien sûr, certains ont remporté plus de titres que d'autres, certains n'ont rien gagné. Mais il y a juste un peu de chance également. Il y a des Champions du monde qui restent vraiment en F1 pendant de nombreuses années, mais cela ne signifie pas qu'ils sont les seuls grands pilotes de leur époque. Il faut juste avoir de la chance – être dans la bonne équipe, au bon endroit, et dominer pendant longtemps. Et cela ne se produit pas toujours. Il n'y a qu'un baquet, car le coéquipier est toujours perdant. Et d'habitude, ils n'acceptent jamais d'avoir deux pilotes de pointe côte à côte. C'est ainsi. Et il faut l'accepter : "Bien sûr, j'espère que je serai en position de me battre pour le championnat, par exemple, dans un avenir proche". Que ce soit un [titre] ou sept, cela dépend simplement de la durée de la domination de l'écurie.

Max Verstappen, Red Bull Racing, félicite le vainqueur Lewis Hamilton, Mercedes, dans le parc fermé

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