10 ans après, Button révèle les coulisses de l'aventure Brawn GP

Au fil de sa longue carrière en Formule 1, Jenson Button a connu des hauts et des bas. Un coup dur fut certainement le retrait de Honda fin 2008, même si la reprise de l'écurie par Brawn GP l'année suivante a offert à Button son unique titre mondial. Titre qu'il a remporté le 18 octobre 2009, il y a dix ans jour pour jour.

Le vainqueur Jenson Button, Brawn Grand Prix dans le parc fermé

Photo de: Sutton Motorsport Images

Jenson Button aura passé sept saisons au sein de la structure de Brackley, d'abord trois sous le nom de BAR – avec la troisième place du championnat 2004 – puis trois autres lorsque Honda a racheté l'écurie, toutefois avec un très maigre succès : une seule victoire, au Grand Prix de Hongrie 2006. Et après la fin de la saison 2008, sur fond de crise économique, le constructeur japonais a soudain décidé de jeter l'éponge.

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"C'était un choc énorme, j'étais loin de m'en douter. Très loin", se rappelle Button, dont la réputation n'était pas à son apogée après une campagne 2008 en demi-teinte, dans le podcast Beyond The Grid. "Même s'ils ont des difficultés, on ne se dit jamais qu'ils vont tout laisser tomber. 'On part, on quitte le sport auto comme beaucoup d'autres constructeurs'. C'était un grand choc."

"J'étais en train de m'entraîner à Lanzarote, je suis revenu en meilleure forme que jamais, nous étions à l'aéroport de Gatwick [à Londres, ndlr] et allions récupérer nos bagages et nos vélos, et c'est là que j'ai reçu un sms de Richard [Goddard, son manager] qui demandait que je l'appelle immédiatement. 'J'ai une mauvaise nouvelle, Honda s'en va'. 'Quoi ? C'est fini ?'. 'Oui, c'est fini'."

Le Champion du monde 2009 Jenson Button

Or, la marque nippone avait lancé des ressources considérables dans le développement lié à la nouvelle réglementation de 2009, avec notamment une trouvaille qui allait s'avérer décisive : le double diffuseur. Ross Brawn a racheté l'écurie pour une livre symbolique, le moteur Mercedes a été péniblement intégré à une monoplace conçue pour le groupe propulseur Honda, et celle-ci a fait ses premiers tours de roue peu avant le terme des essais hivernaux.

"Honda avait quand même investi beaucoup d'argent pour la nouvelle voiture, beaucoup d'argent", poursuit Button. "En se promenant dans l'usine, en discutant avec les gens en soufflerie, on pensait que la voiture allait être très bonne. Au début, on ne savait pas à quel point, car la réglementation était complètement nouvelle et nous ne savions pas ce que les autres allaient construire, mais nous pensions nous en être bien tirés."

"Au début, nous pensions que nous allions être deux secondes plus lents avec la nouvelle réglementation, mais nous étions finalement aussi rapides qu'en fin d'année précédente. Est-ce que cela signifiait que notre voiture 2008 était vraiment mauvaise ou que celle de 2009 était géniale, nous ne le savions pas encore à ce moment-là !"

"Il y avait un excellent sentiment quant à cette saison 2009, et c'est pour ça que tout le monde a travaillé si dur pour faire survivre l'équipe. Non seulement parce qu'il y avait plusieurs centaines d'emplois en jeu, mais aussi parce que la voiture avait l'air bonne."

Jenson Button, Brawn GP BGP 001

Au moment du shakedown sur une version courte du circuit de Silverstone, Button n'était donc pas conscient d'avoir l'arme fatale entre les mains. "Tout ce que je savais, c'est que nous n'avions pas eu le moindre problème", souligne le Britannique, qui était à nouveau associé à Rubens Barrichello. "D'habitude, la première fois que la voiture prend la piste, il y a des soucis de fiabilité, on passe beaucoup de temps au garage. Nous n'avons rien eu, tout s'est passé sans accroc, malgré une unité de puissance qui n'était pas adaptée à cette voiture – elle n'était pas parfaitement installée."

Après avoir manqué la plupart des tests de pré-saison, Brawn GP s'est joint aux autres écuries pour l'ultime roulage, à Barcelone. "Je suis monté dans la voiture et j'étais ravi d'être dans une F1, d'avoir un job !" sourit Button. "J'ai fait quelques tours chronométrés, je suis rentré et j'ai dit à Shov [Andrew Shovlin, ingénieur de course de Button] que je n'étais pas ravi de l'équilibre, qu'il fallait améliorer le train arrière dans les virages rapides, le train avant dans les virages lents."

"Il m'a regardé et il souriait, je me demandais pourquoi. Il m'a dit : 'On est les plus rapides'. 'Comment ça, on est les plus rapides ? Les autres n'ont sûrement fait que des tours d'installation, ils n'ont pas fait de chrono'. 'Si si, tout le monde en a fait, tu es quatre ou cinq dixièmes plus rapide que tout le monde'. Nous avons travaillé les réglages, avons repris la piste et étions presque une seconde plus rapides que tout le monde."

"Parce que c'était une nouvelle voiture, nous roulions avec peu d'essence, car nous ne pensions pas que nous allions être rapides. Les autres avaient sûrement 30 kg ou 40 kg de carburant. Nous avons donc fait le plein, sommes ressortis et étions encore relativement compétitifs. Nous n'avions pas une seconde dans la poche… ou plutôt nous l'avions, mais nous ne le montrions pas !"

Drapeau à damier pour Jenson Button, Brawn Grand Prix BGP 001 et Rubens Barrichello, Brawn Grand Prix BGP 001

Dominateur, Button a remporté six des sept premiers Grands Prix de la saison, mais Red Bull développait sa monoplace à un rythme effréné sous la houlette d'Adrian Newey et n'a pas tardé à prendre l'avantage. Button n'a ainsi plus gagné après la course turque, début juin.

"C'était l'année d'une nouvelle réglementation, donc les équipes progressaient en permanence", analyse l'Anglais. "Si l'on restait immobile, on reculait. C'était notre gros problème, nous étions très loin de développer suffisamment. Une fois que nous nous sommes rendu compte que nous étions en train de reculer, c'était trop tard. Par exemple, si l'on veut un développement pour la septième course, il faut le lancer dès la première. Cela prend des mois de faire passer les trucs en soufflerie et de les faire construire pour les mettre sur la voiture. Trois mois."

"L'équipe avait le budget, mais je ne pense pas qu'elle voulait le dépenser. Quand nous nous sommes rendu compte qu'il fallait le dépenser, nous avions trois mois de retard. Nous n'avons eu qu'une véritable évolution, c'est tout, lors d'une saison avec une nouvelle réglementation. J'ai vu un article l'autre jour où quelqu'un disait que sur l'ensemble de la saison, la meilleure voiture était la Red Bull, que c'était la voiture qui a vraiment changé la manière dont les gens ont travaillé l'aérodynamique lors des années suivantes. Je le comprends, mais il y avait des choses très spéciales sur la Brawn, et pas seulement le diffuseur : du nez au train arrière, elle était extrêmement détaillée."

Le travail des ingénieurs à Brackley aura en tout cas porté ses fruits : Brawn GP a remporté les deux titres, Button étant sacré avec 11 points d'avance sur Sebastian Vettel. Ce succès allait lui ouvrir les portes de l'écurie McLaren et de nombreuses autres victoires en Grand Prix, tandis que Brawn se muait en l'équipe Mercedes que nous connaissons désormais.

Diaporama - Jenson Button et Brawn GP

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