Interview

Boullier : "Honda a développé une culture spécifique"

Patron de l’écurie de Formule 1 McLaren-Honda, Éric Boullier avoue que le motoriste japonais a développé une culture qui ne cadre peut-être pas parfaitement avec les exigences de la F1. Motorsport.com l'a rencontré dans le paddock de Montréal.

Yusuke Hasegawa, cadre supérieur, Honda, et Eric Boullier, directeur de la compétition, McLaren, sur scène lors de la présentation de la McLaren MCL32

Yusuke Hasegawa, cadre supérieur, Honda, et Eric Boullier, directeur de la compétition, McLaren, sur scène lors de la présentation de la McLaren MCL32

LAT Images

Les pannes de moteurs s’accumulent sans interruption pour Fernando Alonso et Stoffel Vandoorne, et la journée de vendredi au Grand Prix du Canada n’a pas été bien différente. La F1 est un sport très européen. Existe-il un incompatibilité de cultures entre McLaren et Honda ?

C’est plus compliqué que cela. C’est un problème d’expérience et de culture entre deux civilisations. De plus, Honda possède même une culture un peu différente et un peu à part au Japon. En fait, Honda a développé une culture spécifique qui, peut-être, ne correspond pas tout à fait à celle du sport automobile.

Comment faites-vous pour motiver vos troupes à Woking alors que le nœud du problème réside dans l’unité de puissance Honda, anémique et fragile ?

Je dois être transparent et bien leur expliquer la situation. Ce n’est pas leur faute, ce n’est pas leur responsabilité. Nous devons nous concentrer sur que nous savons faire, donc la voiture, l’aérodynamique, la dynamique et les suspensions afin de continuer à être les meilleurs. En fait, plus la frustration grandit sur la piste, plus la motivation grandit à l’usine.

L’écart actuel qui sépare les deux voitures les plus rapides, la Mercedes AMG et la Ferrari, du reste du peloton ne vous inquiète-t-il pas ?

Non, au contraire. Le but du changement de règlement technique était d’améliorer le show et de resserrer les écarts. Ça a marché, car Ferrari a effectué un bond en avant. Les écuries Red Bull et McLaren vont aussi combler leur retard, et le reste du peloton va aussi y arriver. Il faut leur donner du temps. Cela ne se fera pas en une journée. L’idée était de redistribuer les cartes, et ça marche.

La F1 profiterait-elle de l’arrivée d’un autre motoriste ?

S’il y a de la place pour lui, oui, pourquoi pas ?

Et avoir deux fournisseurs de pneus pimenterait-il le spectacle ?

Pour l’instant, il faut se concentrer sur la situation actuelle. Il y a encore pas mal de place pour l’amélioration des voitures et du show. Je ne pense pas qu’avoir un autre fournisseur de pneus serait une valeur ajoutée dans la stratégie de Liberty à produire un show plus serré. On ajouterait un paramètre de plus et plus de différences entre les voitures.

Fernando Alonso, McLaren MCL32

Parlant de Liberty, qu’en est-il d’un éventuel plus grand nombre de Grands Prix par saison dans un futur proche ?

On verra. C’est encore pure spéculation. Je ne suis pas contre. Pour nous, les écuries, s’il y a plus de courses, il devra y avoir plus de revenus, car nous devrons nous organiser autrement, avoir plus de mécanos et d’ingénieurs, et intégrer un système de rotation de personnel, car il y aura trop de courses. S’il y a plus de revenus, c’est faisable. En ce qui me concerne, qu’il y ait 25 ou 30 courses par saison, ça ne change rien, à condition toutefois que les revenus soient à la hausse.

Parlons de votre nouveau pilote, Stoffel Vandoorne, qui commence sa carrière en F1 dans des conditions assez pénibles. Comment doit-il affronter les épreuves sans sombrer ni perdre sa motivation ?

Ça peut être très difficile à vivre. Il y a eu des cas de pilotes qui ne s’en sont jamais remis. J’ai eu la chance de former des jeunes pilotes durant des années, et j’ai vécu l’expérience d’amener en F1 deux ou trois pilotes qui n’avaient jamais couru en Grand Prix. Je connais les pièges de ce monde un peu impitoyable qui ne veut pas perdre de temps à comprendre les jeunes pilotes. J’aide Stoffel et on discute beaucoup. Je sais, là, il a du mal à s’exprimer. Il commence dans une grosse équipe qu’est McLaren et auprès d’un pilote de légende comme Fernando Alonso. Pour lui, ce n’est pas évident tous les jours de s’affirmer.

Pour terminer, vous avez vécu les 500 Miles d’Indianapolis de l’intérieur avec Fernando Alonso. La F1 aurait-elle des choses à apprendre de l’IndyCar ?

Je répondrais oui, surtout en ce qui concerne la gestion des coûts et l’engagement avec les fans. La série américaine gère très bien les coûts, qu’ils soient liés à la fabrication des voitures ou à leur exploitation par les écuries. C’est une série qui demeure abordable. Il est évident que le fan d’IndyCar en a plus pour son argent. J’ai été assez impressionné d’être à côté de la voiture de Fernando lors des qualifications et d’avoir des fans à 1m50 de moi, sans barrière. C’est quand même extrêmement intéressant de constater qu’on peut faire de tels trucs.

Et afin d’effectuer un peu plus de promotion de ses voitures de série en Amérique, McLaren pourrait-elle engager une écurie et courir régulièrement en IndyCar ?

On verra… L’Indy 500 était un "one-off", mais en même temps on a fait les choses très professionnellement, à la méthode McLaren. On a tiré tous les enseignements que nous désirions obtenir et quel que soit le projet qui sera mis en place dans l’avenir, nous serons prêts.

Stoffel Vandoorne, McLaren MCL32

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