Les plans du Qatar pour sa Coupe du monde annuelle

Un an avant le début de la Coupe du monde de football 2022, le Qatar organise le premier de ses onze nouveaux Grands Prix de Formule 1. Une exposition médiatique rêvée pour le pays, qui est vivement critiqué sur les questions relatives aux droits de l'homme.

Mick Schumacher, Haas VF-21

Mick Schumacher, Haas VF-21

Steven Tee / Motorsport Images

Le dimanche 21 novembre 2021 est une date importante pour le Qatar. Non seulement le départ du premier Grand Prix de Formule 1 organisé dans le pays du Golfe Persique est donné ce jour mais il précède aussi d'un an pile le coup d'envoi de la Coupe du monde de football 2022. En fait, dès le premier pied posé au Qatar, il est clair que tous les efforts du pays se concentrent sur cet évènement en particulier. D'importants travaux sont en cours dans la capitale, Doha, pour que tout soit prêt à temps pour le tournoi.

Rien n'a été laissé au hasard pour la Coupe du monde, même le Grand Prix de F1 sera mis de côté l'an prochain ! En fait, le Qatar considère 2021 comme une année "bonus" puisqu'il a profité de l'annulation du Grand Prix d'Australie pour faire ses débuts en catégorie reine avec un peu d'avance. Mais le Qatar reviendra au calendrier dès 2023 et y restera pendant dix ans, assurant ainsi la présence d'une quatrième course au Moyen-Orient.

Après de nombreuses années d'efforts, l'organisation d'un Grand Prix de F1 au Qatar est un rêve devenu réalité pour Amro Al-Hamad, directeur exécutif de la fédération qatarie des sports mécaniques. "Nous étions si proches de le réaliser à un moment, mais ensuite le rêve est passé au second plan", a-t-il confié à Motorsport.com. "C'est énorme. Les mots me manquent. Avoir des Formule 1 roulant sur le circuit international de Losail a toujours été un rêve pour moi, non seulement d'un point de vue professionnel mais aussi personnel."

Située près de la capitale, la piste de Losail figure au calendrier MotoGP depuis 2004 mais n'avait plus organisé d'épreuve majeure en monoplace depuis la visite éclair du GP2 Asia, en 2009. Par conséquent, et c'est loin d'être une surprise, le circuit n'est pas tout à fait adapté à la F1. Le profil des virages est certes plaisant pour les spectateurs au moment des qualifications mais ne devrait pas créer un grand spectacle pour la course.

À vrai dire, les organisateurs n'ont pas eu le temps de penser à des modifications. Ils ont seulement eu six semaines devant eux entre la finalisation de l'accord avec la F1 et l'arrivée des premiers camions appartenant aux équipes. "Je crois que nous détenons le record du pays ayant organisé une course de F1 avec le délai le plus court lors de la signature du contrat. Ça n'a pas arrêté", a ajouté Al-Hamad.

Michael Masi, directeur de course de la FIA, s'est rendu plusieurs fois à Losail pour aider aux préparatifs et contrôler les travaux mineurs pour rendre la piste "F1 compatible", même si ses standards étaient déjà élevés grâce au MotoGP. Des tribunes temporaires ont également été érigées, les ventes de billets ayant dépassé les attentes. Sur ce point, Al-Hamad évoque le succès de la série-documentaire Drive to Survive de Netflix : "Cela a simplement augmenté la popularité ou l'amour pour la F1. Je suis sûr que l'accord [à long terme] a été le résultat de l'intérêt accru pour la F1".

Les pilotes, eux, sont d'ores et déjà conquis par le circuit. Après les premiers essais libres, Esteban Ocon l'a qualifié de "génial" et, selon le pilote Alpine, un mélange d'Istanbul et de Sepang le rend "très, très amusant". Max Verstappen l'a jugé "très cool" sur un tour tandis que Lewis Hamilton a noté à quel point il mettait les pilotes à l'épreuve en raison de l'absence des traditionnels virages lents.

Mais à cause de la difficulté à suivre un autre pilote dans les virages rapides, conséquence malheureuse de la philosophie aéro actuelle, les commentaires pourraient changer du tout au tout après la course. Et il est probable que le retour du Qatar au calendrier F1, en 2023, se fasse sans Losail. Des rumeurs parlent en effet de la construction d'un nouveau circuit permanent.

Al-Hamad a cependant indiqué que Losail, qui devrait continuer à organiser des courses MotoGP en dépit de ce potentiel nouveau tracé, ne passerait pas au second plan avec les championnats à quatre roues. "La Formule 1 au Qatar va certainement attirer beaucoup d'attention et nous remettre sous les feux des projecteurs", a-t-il ajouté. "Il y a une grande possibilité que nous accueillions beaucoup d'autres événements de sports mécaniques dans l'État."

Mais il est impossible de parler de l'implication grandissante du Qatar dans le monde du sport dans évoquer les questions relatives aux droits de l'homme, principalement en ce qui concerne le sort réservé aux travailleurs étrangers. Amnesty International a récemment appelé les pilotes de F1 à s'exprimer sur le fait de courir dans des pays tels que le Qatar et l'Arabie saoudite, dont le bilan en matière de droits de l'homme est "extrêmement troublant".

Lewis Hamilton s'est exécuté au cours de la conférence de presse du jeudi. "Je pense que lorsque ces disciplines sportives se rendent dans ces pays, ils ont le devoir de sensibiliser le public à ces questions", a commenté le septuple Champion du monde. "Ces lieux ont besoin d'être examinés de près et il faut que les médias parlent de ces choses. L'égalité des droits est un sujet sérieux."

Le pilote Mercedes a fait référence aux mesures prises par le Qatar en matière de droits de l'homme, notamment les réformes de la kafala [parrainage des travailleurs étrangers, ndlr] introduites en septembre 2020. Elles ont ainsi permis à ces travailleurs de changer d'emploi sans l'autorisation de leur employeur et ont introduit un salaire minimum plus élevé.

Alors que Human Rights Watch a noté que le Qatar avait introduit "des réformes du travail significatives", l'ONG a toutefois ajouté : "Certains éléments de la kafala restent en place, facilitant les abus et l'exploitation de l'importante main d’œuvre migrante du pays, et les efforts des autorités qataries pour protéger le droit des travailleurs migrants avec des salaires exacts et versés à temps se sont révélés largement inefficaces. Certaines politiques de tutelle masculine et des lois discriminatoires à l'égard des femmes perdurent. Les personnes LGBT continuent d'être victimes de discrimination".

Ce week-end, Hamilton roule avec un casque spécial aux couleurs du drapeau Progress Pride (qui inclut le drapeau arc-en-ciel LGBTQ+, les bandes noires et marrons représentant les communautés de couleur LGBTQ+ discriminées, et le drapeau transgenre). Une façon de s'exprimer, de prendre position et d'essayer de faire passer un message. "Une seule personne ne peut faire qu'une petite différence mais ensemble, collectivement, nous pouvons avoir un plus grand impact", avait-il déclaré jeudi.

Depuis longtemps, le Qatar rêvait d'être sous les feux des projecteurs de la scène sportive. C'est désormais le cas, la Coupe du monde de football étant l'événement majeur que le pays recherchait. Le Qatar est aussi intéressé par l'organisation des Jeux olympiques en 2032 et souhaite toujours devenir le premier pays du Moyen-Orient à accueillir cet évènement. Mais en attendant, à partir de 2023, la F1 deviendra le grand spectacle sportif sur lequel le Qatar s'appuiera.

"La Coupe du monde se terminera l'an prochain, nous deviendrons alors la Coupe du monde ayant lieu tous les ans pendant dix ans", a lancé Al-Hamad au sujet du Grand Prix de F1. "Nous n'avons cessé de répéter à quel point nous étions bien préparés pour la Coupe du monde, et nous ne pourrons le prouver que pendant celle-ci. Désormais, la Coupe du monde aura lieu chaque année au Qatar. Ce n'est que la cerise sur le gâteau de tous les autres événements sportifs que nous accueillons."

Grâce à cet accord à long terme, la F1 va devenir la clé de l'héritage sportif du pays après la Coupe du monde. Il est donc important que le championnat se serve de son aura et de son influence pour apporter des changements positifs et encourager le Qatar à mettre en place de nouvelles réformes.

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