Analyse

Pourquoi le gel des châssis pourrait profiter à Red Bull

Décision inédite dans l'Histoire de la Formule 1, les châssis sont gelés du 30 septembre 2020 au terme de la saison 2021. Red Bull espère tirer son épingle du jeu.

Max Verstappen, Red Bull Racing RB16

Photo de: Charles Coates / Motorsport Images

C'est devenu une habitude : Red Bull conclut les saisons de Formule 1 en force. Depuis la campagne 2017, l'écurie au taureau a remporté quatre de ses 12 victoires lors des trois ultimes Grands Prix de l'année, dont le remarquable succès de Max Verstappen lors de la dernière course en date, à Abu Dhabi.

Red Bull a toujours fait preuve d'un rythme de développement effréné, et dans ce contexte, la saison 2020 s'annonçait bien. Dès les six jours d'essais de Barcelone, Verstappen avait signé le deuxième chrono global avec une demi-seconde de retard sur la Mercedes de Valtteri Bottas, mais en étant chaussé de gommes un cran moins tendres, les C4 face aux C5. "C'était notre meilleur hiver", estimait encore Helmut Marko, conseiller sportif de Red Bull, en août. "Nous étions bien mieux préparés, mais il y avait un loup dans la voiture."

Ce loup, c'est surtout l'instabilité chronique de cette RB16 au train arrière particulièrement nerveux, qu'Alexander Albon notamment a eu un certain mal à apprivoiser. Le confinement printanier lié à la pandémie de COVID-19, avec quatre mois sans rouler et deux mois de fermeture des usines, a de surcroît contraint l'écurie à lancer de nombreuses évolutions ensemble lors du premier Grand Prix de la saison, alors que celles-ci auraient dû être installées progressivement sur la voiture. Or, ça n'a pas été fructueux.

"Aux essais de Barcelone, nous avions la version 1", détaillait alors Marko. "À la première course, nous avions la version 6. Cela signifie que toutes ces étapes de développement sont basées seulement sur le CFD, la soufflerie et la simulation. Il s'est produit quelque chose à un moment, et nous ne parvenons toujours pas à voir en piste l'appui aéro que nous avons en théorie."

"Mais nous nous rapprochons. Lors de la première course, nous étions encore plus lents que l'an dernier. Il y aurait eu une évolution pour Melbourne, une pour Barcelone et une pour le Red Bull Ring. Nous avons sauté tout ça et sommes directement passés à la version 6. Et quand ce package a été installé sur la voiture et a pris la piste, il n'a malheureusement pas libéré les mêmes performances qu'en théorie." Toujours dithyrambique vis-à-vis du fer de lance de l'écurie, l'Autrichien ajoutait : "Verstappen est le seul à pouvoir tenir le rythme de Mercedes. Les autres ne sont nulle part. Et Verstappen n'est pas si loin."

Des étincelles sortent de la monoplace de Max Verstappen, Red Bull Racing RB16, George Russell, Mercedes F1 W11

Effectivement, au Grand Prix d'Autriche 2019, Max Verstappen avait tourné en 1'03"439 en Q3, alors qu'en 2019, il n'était qu'en 1'03"477. Dans ce laps de temps, l'écart avec Mercedes s'est accru, et demeurait conséquent en début de saison. Les chronos qualificatifs de la Red Bull de tête (invariablement celle du Néerlandais) correspondaient à 101,165% de ceux de la pole position sur les huit premiers Grands Prix. Sur la deuxième moitié de campagne en revanche (GP de Turquie exclu, car non représentatif), c'était seulement 100,387% par rapport aux Mercedes, notamment grâce à la pole position de Verstappen à Abu Dhabi, même si le développement des Flèches d'Argent était alors complètement stoppé.

Quoi qu'il en soit, Red Bull maîtrise mieux sa monoplace désormais, et c'est crucial dans le contexte du gel des châssis, imposé en raison de la crise financière entraînée par la pandémie de COVID-19. Pour Christian Horner, c'est l'occasion d'enfin commencer une saison sur les chapeaux de roue en continuant sur la lancée de 2020.

"Je l'espère certainement, car nous ne repartons pas d'une feuille blanche", analysait le directeur d'équipe à Abu Dhabi. "Nous conservons une grande partie de la voiture. Par conséquent, [aux essais de pré-saison] dans quelques mois, nous serons plus ou moins au même niveau que nous terminons la saison ici, avec les évolutions pertinentes. C'est la première fois dans l'Histoire de la F1 [que cela se produit], et c'est pourquoi nous avons appelé la nouvelle voiture la RB16B, et non la RB17, car elle est en très grande partie identique, probablement aux alentours de 60%."

Alex Albon, Red Bull Racing RB16

Bien entendu, quand Horner dit que c'est inédit dans l'Histoire de la Formule 1, il n'exprime pas clairement sa pensée. Dans les premières décennies du Championnat du monde, de nombreux modèles effectuaient plusieurs saisons, notamment s'ils étaient couronnés de succès. Et jusque dans les années 2000, certaines équipes commençaient la campagne suivante avec leur monoplace précédente avant de passer à la nouvelle. Ferrari notamment en était adepte à son apogée, avec plutôt de la réussite : une victoire pour la F2001 au GP d'Australie 2002, un autre succès pour la F2002 à Saint-Marin en 2003, puis une deuxième place par la F2004M au GP d'Australie 2005. En 2003, McLaren avait même été contraint de garder son modèle 2002, rebaptisé MP4-17D, tout au long de la saison, et avait joué le titre avec un certain Kimi Räikkönen.

Il va de soi que la situation actuelle est cependant très différente, puisqu'il s'agit ici d'un point réglementaire auquel toutes les écuries doivent se conformer. Et cela n'empêche pas les équipes de travailler d'arrache-pied pour progresser dans la hiérarchie : le châssis certes gelé peut être modifié via l'utilisation de deux jetons de développement, les évolutions aérodynamiques demeurent libres, et chacun des motoristes peut homologuer une nouvelle unité de puissance pour 2021.

"Nous savons que nous devons travailler dur cet hiver pour être meilleurs et plus forts, car on ne peut pas simplement s'appuyer sur ce résultat", soulignait Verstappen après sa victoire d'Abu Dhabi. "Nous savons devoir encore améliorer la voiture énormément et nous savons qu'il y a des domaines sur lesquels nous devons vraiment travailler, pas seulement sur la voiture mais aussi niveau puissance – il nous en faut davantage. J'espère que nous tirons des leçons de ces dernières années. Ce n'est pas comme si nous le faisions exprès. En tout cas, nous abordons l'hiver avec un bon pressentiment." La saison 2021 marquera-t-elle enfin le retour de Red Bull au sommet ?

Avec Christian Nimmervoll et Jonathan Noble 

Alex Albon, Red Bull Racing RB16

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