Pourquoi Mercedes ne croit pas en la taille de guêpe de Honda
Les motoristes de Formule 1 ont opté pour des approches très différentes dans le design de leurs unités de puissance 2016. Laquelle portera ses fruits ?






















L'importance de la performance moteur en Formule 1 est claire depuis l'arrivée de la nouvelle réglementation turbo. Il n'est donc pas surprenant qu'à l'aube de la troisième année de cette réglementation hybride, la bataille entre les motoristes soit plus intense que jamais.
Ce qui est peut-être plus étonnant, c'est qu'il reste des différences de design fondamentales entre les approches respectives de Mercedes, de Ferrari, de Renault et de Honda. Tous les quatre ont pour objectif de maximiser la puissance disponible de 100 kg de carburant à un débit maximal de 100 kg/h.
Une architecture différente
À un extrême, on retrouve Mercedes, dont il est de notoriété publique que le turbo est divisé pour avoir le compresseur d'un côté du moteur et la turbine de l'autre. Puis il y a l'approche de Honda, le motoriste japonais ayant également divisé son turbo mais ayant positionné les deux pièces au sein de l'angle en V pour une raison d'espace.
Quant à Ferrari et Renault, ils sont entre les deux et n'ont choisi aucune des deux solutions extrêmes pour l'instant. Cependant, il semble que Ferrari soit sur le point d'introduire un système de double refroidisseur cette année : un sur le châssis (comme Mercedes) et le deuxième sur le côté gauche du moteur, derrière les radiateurs.
Un duel passionnant
À en juger par la performance, il est clair que les avantages du concept Mercedes valent le coup d'être suivis, tandis que Honda a payé le prix d'un trop petit compresseur l'an dernier. Honda affirme toutefois qu'une plus grande turbine et un plus grand compresseur, toujours dans les limites du V pour atteindre cette taille de guêpe, peuvent prendre le dessus sur l'unité de puissance Mercedes : ce duel d'ingénieurs s'annonce passionnant.
Galerie photos :
Qui a raison ? Honda, ou Mercedes avec une philosophie selon laquelle il faudra des turbines de plus en plus grandes à l'avenir pour maximiser la puissance ?
Un dilemme
La semaine dernière, Mercedes a invité un petit groupe de journalistes à un briefing du directeur technique de son département moteurs, Andy Cowell, où celui-ci s'est confié au sujet des innovations de son unité de puissance. Bien que le turbo et le compresseur séparés ne soient pas l'unique raison du succès de Mercedes, Cowell a reconnu que ce design avait joué un rôle important dans le niveau atteint par l'unité de puissance.
"Je ne pense pas que cela ait été exagéré", commente-t-il. "Est-ce LE remède miracle ? Je pense que c'est quelque chose où il y a beaucoup de personnes qui apportent une contribution positive. Ce n'est pas fait pour une seule raison. Il y avait beaucoup de raisons qui vont ensemble ; en faire quelque chose dont nous pensons que cela reste attractif."
"Je pense que la raison de ne pas le faire est que c'est sacrément compliqué ! Dans tout ce débat, il n'y avait pas une grande raison de le faire mais plein de raisons un peu plus petites. Par contre, nous nous disions 'La vache, comment est-ce qu'on va faire ça ?' et ça, c'était un argument de poids. Il n'y avait rien d'impossible, c'est juste que ça n'avait pas été fait par le passé. Mais c'est ça qui est fun, non ?"
Un modèle pas copié
Le secret de Mercedes a rapidement été révélé en 2014. Nombreux sont ceux qui pensaient que les rivaux copieraient cette idée au plus vite. Que cela n'ait pas été le cas n'est toutefois pas une grande surprise pour Cowell, qui pense qu'il y a une multitude de facteurs qui contribuent au fait que chaque motoriste a suivi des voies différentes.
"Nous sommes tous dans la même course, mais tout le monde a des efficiences légèrement différentes, des opinions légèrement différentes, des niveaux d'intégration verticale légèrement différents, ou des fournisseurs différents."
Surtout, la taille des diverses pièces peut être dictée par la façon dont chaque motoriste extrait l'énergie de son système, avec plus ou moins de succès. Quant à la taille du turbo, Cowell rappelle : "Il faut penser aux points que l'on marque. C'est le dimanche après-midi qu'on les marque, pas en qualifications. Il faut donc analyser le ratio d'importance entre ces choses-là."
"Faut-il être à l'avant de la grille mais être en manque d'énergie dès le deuxième tour, ou faut-il s'assurer que l'on peut faire une course vraiment solide ? C'est un équilibre que tous les motoristes doivent trouver. Cela peut grandement influencer la taille du turbo."
"Ensuite, il s'agit du niveau d'efficience que l'on va tirer de toutes les pièces. Si l'on pense que le moteur électrique ne peut pas être si efficient, alors il ne sert à rien d'avoir une grosse turbine qui va juste mettre de l'énergie dedans. Si l'on pense que deux lots d'électronique de puissance ne vont pas être si efficients que ça, ou que le MGU-K ne va pas être si efficient que ça, alors on ne s'embête pas."
"La simulation sur un tour est basée sur la puissance ajoutée par le MGU-K au vilebrequin. Donc si l'on pense que l'on va avoir 100 kW de la turbine vers le MGU-H, mais qu'on ne va en avoir que 50 le temps d'y arriver, et que l'on étudie le poids de tous les systèmes de refroidissement pour traiter les 50 gaspillés, alors cela commence à avoir un impact sur le design."
Des gains à venir
Le plus intrigant est peut-être le fait que, tandis que certains espéraient que la performance du moteur Mercedes se heurte à un plafond, la marque à l'Étoile indique que des gains non-négligeables sont encore trouvés. Avec une efficience thermique autour des 45% actuellement, Mercedes croit avoir une grande marge d'amélioration pour se rapprocher des 1240 kW d'énergie théoriquement disponibles pour un plein réservoir de carburant.
Pour donner une indication de l'évolution de la technologie, lorsque le KERS a été testé pour la première fois en 2007, il pesait 107 kg pour une efficience de 39%. Lors des premiers essais du tout nouvel ERS en 2014, les systèmes pesaient 24 kg pour 80% d'efficience. Aujourd'hui, ils affichent 20 kg sur la balance avec 95% d'efficience.
De tels progrès signifient qu'il y a de plus en plus d'énergie à portée de main. Par conséquent, les turbines et les compresseurs auront peut-être besoin d'être agrandis pour supporter la puissance supplémentaire.
Lorsqu'il lui a été demandé s'il était logique que la turbine soit de plus en plus grande au fil de l'amélioration de l'efficience, Cowell a répondu : "Oui. Deux domaines vont s'améliorer, l'efficience du moteur à combustion interne va augmenter tous les ans et l'efficience de ce turbo va augmenter. Cela signifie que la taille de la turbine va augmenter tant que cela n'a pas d'impact négatif sur le moteur."
Dans le cas de Mercedes, Cowell, a confirmé que la turbine était plus grande chaque année pour accroître la puissance.
Si la taille de ce compresseur et de cette turbine avait été restreinte à l'intérieur du moteur, comme chez Honda, il n'y aurait pas eu de marge pour les agrandir et les avantages de la taille zéro seraient devenus non existants.
Il est clair que Mercedes et Honda ont une vision très différente de ce qu'il faut en F1. Mais pour savoir qui a raison, il faudra attendre de voir les voitures en piste.

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À propos de cet article
Séries | Formule 1 |
Équipes | McLaren |
Auteur | Jonathan Noble |
Pourquoi Mercedes ne croit pas en la taille de guêpe de Honda
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