Formule 1 GP d'Arabie saoudite

Pourquoi les pilotes doivent faire la police eux-mêmes

Des décisions difficiles vont peut-être attendre les pilotes à Djeddah, alors que la direction de course va continuer d'appliquer sa nouvelle doctrine concernant les dépassements hors piste.

Instaurée après la fin de saison 2021 controversée, la nouvelle direction de course de la Formule 1, composée de Niels Wittich et d'Eduardo Freitas, a posé les bases qui seront celles de sa gestion lors de sa première sortie, à Bahreïn. Pour l'occasion, Wittich était aux commandes (Freitas officiait du côté de Sebring, en WEC) et outre la simplification des limites de piste et le fait qu'un pilote à l'intérieur doit toujours laisser de la place à un pilote situé à l'extérieur quand les deux abordent côte à côte un virage, la question des dépassements hors piste a fait l'objet d'une appréciation nouvelle.

La règle demeure celle de la réglementation sportive, à savoir qu'un pilote ne peut prétendre à profiter de son passage hors piste pour tirer un avantage durable. Mais dans le but de réduire le flux de messages radio entre les écuries et la direction de course, qui est l'une des philosophies centrales après l'ère Michael Masi, la situation va devoir être jugée par les pilotes et les écuries elles-mêmes. Si un pilote résiste ou dépasse un concurrent et quitte la piste dans la manœuvre, la direction de course ne dira plus au pilote en question s'il doit ralentir ou bien rendre la place ; ce sera à lui de décider.

Ces dernières années, que ce soit sous Masi ou sous Charlie Whiting, la direction de course était souvent sollicitée dans de telles situations. Et même si l'avis donné n'avait pas force de loi, puisque la décision finale sur une éventuelle sanction revenait toujours aux commissaires, il était souvent respecté. La discussion pouvait parfois durer plusieurs minutes, créant alors des problématiques complexes avec le dépassement d'autres voitures qui rendaient le fait de rétrocéder la place encore plus difficile.

Dans tous les cas, si une position n'était pas rendue et qu'il était jugé qu'elle avait été acquise/conservée de façon illicite, la pénalité standard était de cinq secondes et d'un point sur la Super Licence.

Désormais donc, en théorie, la direction de course ne répondra plus sur le sujet : au pilote et à son écurie de savoir s'ils sont en tort ou non, et d'agir en conséquence. Et la décision doit être prise rapidement puisque le pilote a un tour pour faire son choix. S'il n'agit pas, les commissaires seront automatiquement saisis.

Kevin Magnussen devant George Russell à Bahreïn.

Kevin Magnussen devant George Russell à Bahreïn.

Si le choix est fait de ne pas ralentir ou rendre la position, alors le directeur sportif de chaque écurie ne peut faire qu'une seule chose : dire à la direction de course, via le membre de la FIA qui est chargé de filtrer les communications pour le directeur de course, quelle décision a été prise, et éventuellement expliquer pourquoi. Sans garantie que cela soit transmis aux commissaires.

La plupart des situations sont claires sur le sujet, et parvenir à une conclusion rapide ne sera pas forcément un problème. Mais d'autres seront inévitablement bien plus proches de la limite, et dans la lutte pour un résultat important, prendre le risque de sacrifier une position pour une manœuvre qui pourrait ne pas être considérée comme litigieuse par les commissaires pourrait être douloureux.

"Je pense que c'est la bonne approche parce que c'est une course plus vraie", a toutefois déclaré Carlos Sainz, favorable à cette nouvelle méthode. "Il n'y a pas de pénalité de cinq secondes et cela peut se produire plus directement, mais cela doit se produire immédiatement, car on ne peut pas perdre trois ou quatre tours pour ensuite devoir rendre une position. C'est pourquoi il y avait le règlement, il doit être super clair et doit être appliqué dans un moment où il y a une infraction, on doit perdre une position et ensuite voir."

Pour d'autres pilotes, la direction de course pourrait tout de même intervenir dans des situations plus difficiles à juger, notamment quand les deux pilotes quittent la piste et que celui qui était derrière se retrouve devant. "Je pense que nous avons déjà eu cette discussion avec Niels lors de la première course", a déclaré Charles Leclerc. "Et je pense que dans certains cas, ce que les pilotes vont faire est très clair. Mais il y a aussi pas mal de situations où ce n'est pas clair."

"Si l'on regarde par exemple mon départ l'année dernière au Mexique ; je pense que c'était un bon exemple de situation très désordonnée. On gagne des positions, mais on ne sait pas vraiment ce que l'on doit faire. Dans ces cas-là, j'espère que nous aurons toujours le soutien du directeur de course, parce que c'est important, surtout dans les situations délicates."

"Ensuite, je suis d'accord pour dire que parfois, c'est juste une situation très facile à lire et à comprendre, et dans ces cas-là, un pilote sera assez intelligent pour rendre la position par lui-même."

Charles Leclerc devant Max Verstappen à Bahreïn.

Charles Leclerc devant Max Verstappen à Bahreïn.

Kevin Magnussen a également bon espoir que le directeur de course continue d'intervenir. "Je pense toujours qu'ils diront aux pilotes de rendre la position", a déclaré le pilote Haas. "Je pense qu'ils attendent plus des pilotes en termes de restitution d'une position si l'on a tiré un avantage. Mais il y aura des cas où un gars aura l'impression d'avoir été poussé, l'autre aura l'impression d'avoir la piste. Et donc il y aura des discussions à ce sujet."

Reste à savoir comment cela se manifestera en pratique, et si des équipes n'auront pas tôt fait de parier sur une intervention de la direction de course, sollicitée ou non. Voire de ne pas se poser la question pour rapidement capitaliser en essayant de creuser au moins cinq secondes d'écart pour se mettre à l'abri d'une pénalité.

L'arrivée à Djeddah est intéressante de ce point de vue car parmi les infractions commises par Max Verstappen face à Lewis Hamilton l'an passé dans un contexte très tendu, les limites de piste aux virages 1-2 ont joué un rôle important lors des deux restarts. Et les fameuses "négociations" entre Masi et Red Bull sur le sujet avaient laissé une impression étrange. À moins de retrouver un scénario similaire cette année, cela ne devrait plus être le cas. Et, a priori, des discussions ne seraient de toute façon plus diffusées.

Avec Adam Cooper

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