Contenu spécial

Pourquoi les "nouvelles" recrues ont toutes des choses à prouver

Lorsque la pandémie a mis la Formule 1 en pause il y a un an, les rouages du marché des pilotes ont continué à tourner en coulisses, au point où trois pilotes ont passé une saison entière à courir pour des équipes qu'ils savaient qu'ils allaient quitter et qu'un double Champion du monde s'est préparé à un retour spectaculaire.

Illustration sur les pilotes arrivant dans une nouvelle équipe en 2021

Illustration sur les pilotes arrivant dans une nouvelle équipe en 2021

Pour chacun des cinq pilotes de Formule 1 qui entament la nouvelle saison sous de nouvelles couleurs, l'année 2021 est riche en enjeux. Fernando Alonso, Daniel Ricciardo, Carlos Sainz, Sebastian Vettel et Sergio Pérez ont à leur actif six titres mondiaux, 93 victoires et 261 podiums, mais ils ont tous quelque chose à prouver en rejoignant des écuries qui cherchent à améliorer leur situation.

Que ce soit en raison de l'âge, de l'inexpérience dans une équipe de pointe ou d'une forme récente médiocre, aucun ne peut se permettre de se reposer sur ses succès passés alors que la F1 se prépare à une période de bouleversement en 2022.

Le retour du fils prodigue

Les mouvements du marché des pilotes déclenchés par le transfert de Carlos Sainz de McLaren à Ferrari pour remplacer Sebastian Vettel ont laissé Renault (désormais rebaptisé Alpine) sans pilote majeur. Daniel Ricciardo a saisi l'occasion de partir avant le début de sa deuxième saison à Enstone et de se glisser dans le baquet vacant de Sainz à la fin de celle-ci.

Étant donné qu'il s'agissait d'une équipe sous pression pour justifier sa participation à la F1 – les nouveaux membres du conseil d'administration se demandant pourquoi les objectifs de performance n'avaient pas été atteints – il n'est pas surprenant que Cyril Abiteboul, directeur de l'équipe à l'époque, ait opté pour une star afin de combler le vide. Certains pourraient considérer le choix de Fernando Alonso comme un risque, puisqu'il n'a pas gagné de Grand Prix depuis 2013 et qu'il est sur le point de fêter son quarantième anniversaire, mais il reste un compétiteur féroce, bien qu'exigeant et source de discorde.

Alonso n'a pas passé ses deux années d'absence de la F1 assis sur son canapé ; il a participé à deux reprises aux 500 Miles d'Indianapolis, a remporté une deuxième victoire aux 24 Heures du Mans, a gagné le Championnat du monde d'Endurance et a pris part au Dakar. Comme un papillon de nuit attiré par la lumière, il a trouvé irrésistible un retour en F1, même s'il en avait claqué la porte au moment de son départ, invoquant, entre autres facteurs, la "prévisibilité" des courses.

Alors qu'Alonso a publiquement déclaré que cette saison n'était qu'un exercice de rodage, et qu'il concentrait ses efforts sur la refonte des règles en 2022, il y a eu depuis lors un changement de direction au sein de sa "nouvelle" équipe. Le nouveau PDG de Renault, Luca de Meo, a écarté l'ancienne hiérarchie de Renault Sport, composée de Jérôme Stoll et de Cyril Abiteboul, et a placé l'ancien du MotoGP, Davide Brivio, à un poste de direction. Même s'il faudra un certain temps pour que la nouvelle structure de gestion s'installe, l'enjeu est bien plus important pour l'équipe rebaptisée Alpine.

Alonso devra donc peut-être obtenir plus de résultats qu'il ne l'espérait cette saison, et il a aussi connu une avant-saison perturbée, après avoir été victime d'un accident de la route, à vélo, en Suisse. Personne ne peut douter de sa résilience, mais malgré tout, une fracture de la mâchoire n'est pas une préparation idéale.

Avec le sourire

Alors qu'Alonso tourne autour d'une nouvelle opportunité en F1 depuis un certain temps, l'ouverture chez Renault/Alpine est arrivée plus tôt que prévu lorsque Daniel Ricciardo a décidé que sa carrière serait mieux servie en occupant le poste laissé vacant par Sainz. Il s'agit d'un changement important pour un pilote dont la cote a quelque peu baissé récemment ; après avoir été poussé vers la sortie par Max Verstappen chez Red Bull Racing, Ricciardo a bénéficié d'une augmentation salariale mais d'une baisse de compétitivité en passant chez Renault. Les observateurs chevronnés ont conclu qu'il commençait à vouloir passer à la caisse, une impression renforcée par une année 2019 en demi-teinte.

Ricciardo a mis fin à cette impression en annonçant un transfert risqué vers McLaren – une autre équipe qui a connu de nombreuses années de marasme sportif – puis en réalisant une dernière saison énergique avec Renault. S'il est vrai qu'il est arrivé chez le Losange un an trop tôt, puisque l'équipe a eu besoin d'un autre remaniement de son département technique pour faire bouger l'aiguille dans la bonne direction, le moment de son passage chez McLaren (pour un contrat de trois ans) semble bien choisi.

Bien que les finances soient devenues un problème inattendu l'année dernière, le fonctionnement technique de McLaren est maintenant bien huilé. Non seulement les voitures se sont améliorées, mais le team a retrouvé son mojo après l'arrivée du directeur d'équipe Andreas Seidl. McLaren a terminé l'année 2020 en tant que "meilleur des autres" derrière Mercedes et Red Bull, et cela devrait continuer maintenant qu'elle dispose de la puissance du motoriste allemand.

Pour Ricciardo, ce sera sa première expérience avec une unité de puissance autre que la Renault dans l'ère turbo hybride, et il affirme être impatient. Mais ce n'est pas l'opportunité de goûter à la puissance de Mercedes qui l'a attiré ici, explique-t-il. "J'ai l'impression que McLaren a fait ce qu'il fallait, surtout ces dernières années, pour se mettre en ordre de marche", dit-il. "En particulier pour ces changements de règles à venir en 2022. Je pense que cette nouvelle ère de la F1 peut changer un peu la donne. Tout ce que j'ai vu et appris jusqu'à présent m'enthousiasme vraiment sur la direction que prend McLaren."

Pas mal pour un pilote qui roulerait le coude à la portière en attendant son chèque...

Vivre le rêve de tout pilote de F1

Fait de la même étoffe de compétiteur que son père, une légende du rallye, Sainz a finalement été rejeté par la machine Red Bull parce qu'il a eu le malheur de partager la même orbite que Max Verstappen. Sainz n'allait jamais jouer le rôle de numéro deux dévoué et, puisque Verstappen semblait être la perspective la plus brillante à l'époque, Red Bull a penché pour le Néerlandais et Sainz a dû devenir maître de son propre destin.

Le timing a plus d'une fois été un problème dans la carrière de Sainz. Stigmatisé comme moins talentueux que Verstappen, cela l'a suivi dans une période de "prêt" avec Renault, où il n'a pas fait assez – dans une machine de seconde classe – contre Nico Hülkenberg pour convaincre le patron de l'équipe Cyril Abiteboul de le racheter à Red Bull. Abiteboul a décidé de miser sur Daniel Ricciardo pour résoudre les problèmes de l'équipe.

Dans l'environnement un peu moins stressant d'une écurie McLaren en train de se sortir du bourbier, Sainz a prospéré et a "reconstruit sa marque", au point de figurer sur la liste des candidats retenus par Ferrari lorsque la direction de Maranello a décidé que des changements s'imposaient au sein de la Scuderia. Certes, Sainz a toujours eu le dessus sur le nouveau venu Lando Norris, mais en rouge, l'Espagnol doit faire face à de plus grands défis. Charles Leclerc pour commencer – mais aussi les objectifs plus ambitieux de Ferrari, sans parler des critiques incessantes des médias italiens s'il n'est pas immédiatement performant.

Peut-être que les grands pontes de Ferrari ont cru à la "bromance" alimentée par les réseaux sociaux entre Sainz et Norris, pensant qu'après deux saisons de tensions entre Vettel et Leclerc, une plus grande harmonie dans le garage serait une bonne chose. Mais la dynamique Sainz-Leclerc ne suivra pas nécessairement la même trajectoire que Sainz-Norris. Leclerc est un personnage beaucoup plus intense que Norris, en plus d'être un vainqueur de Grand Prix établi.

Avec un ou deux tours de plus à Monza l'année dernière, nous aurions pu dire la même chose de Sainz. De tous les pilotes qui changent d'équipe cette saison, il est confronté au test le plus difficile : prouver qu'il ne fait pas que garder un siège au chaud pendant que Ferrari évalue un autre fils d'un célèbre Champion du monde...

Faire ses preuves, encore

Les experts d'Internet ont proclamé haut et fort que le passage de Sebastian Vettel chez Aston Martin, anciennement Racing Point, était une retraite indigne avec un salaire confortable en attendant de savoir où la vie le mènera. Mais s'il s'agissait indubitablement de la seule option en dehors de la retraite pour un pilote qui affirme n'avoir aucun intérêt pour la compétition dans une autre catégorie que la F1, il s'agit de tout sauf d'un job pépère.

C'est une relation qui doit fonctionner avec un avantage mutuel. Le propriétaire de l'équipe, Lawrence Stroll, a de grandes ambitions, tant pour sa structure que pour la marque de voiture qu'il a achetée à un prix (relativement) avantageux l'année dernière. Stroll ne s'est pas imposé dans la vie en étant un imbécile qui aurait couvert de richesses un pilote has been pour le privilège d'associer un grand nom à une entreprise quelconque. Il y a des co-investisseurs à contenter, oui, et un quadruple Champion dans le giron ne fera pas de mal à ce projet à long terme. Mais il y a plus en jeu.

La cote de Vettel est peut-être plus basse qu'elle ne l'était autrefois, et sa prétention à rester parmi les "géants" de la F1 est anéantie par son besoin d'avoir une voiture dont les qualités sont adaptées à son style de pilotage, mais il a encore beaucoup à donner. Il est entendu que son contrat est modeste en termes de rémunération, fortement axé sur des primes basées sur les résultats, et il a accepté un poste d'ambassadeur pour les voitures de route. Reste à savoir comment cela fonctionnera pour l'un des pilotes les plus discrets de la F1.

Stroll a l'œil pour les bonnes affaires et il ne fait aucun doute qu'il a acquis trois grandes propriétés à un prix dérisoire : l'équipe qui a débuté sous le nom de Jordan en 1991 a toujours eu le don de faire fructifier un peu d'argent, malgré une série de propriétaires avares ; le cachet de la marque de voiture de route Aston Martin a survécu à une histoire de propriété et de solvabilité tout aussi mouvementée ; et maintenant Vettel qui, lui aussi, a besoin de se refaire une santé.

L'équipe a "cloné" de manière controversée la Mercedes 2019 la saison dernière, dans l'espoir de prendre un raccourci vers le succès, mais elle a d'abord commencé par gâcher des résultats. Il a fallu toute la saison pour convertir le potentiel en victoire. Peut-être que la plus grande contribution que Vettel pourrait apporter est de faire en sorte que la victoire semble facile, comme cela a été le cas pour lui.

L'expérience est la clé

Sergio Pérez a récemment déclaré qu'il avait "attendu toute sa carrière d'avoir une opportunité avec une équipe de haut niveau", ce qui pourrait provoquer l'irritation de certains fans de McLaren. Cette fois-ci, cependant, Pérez arrive dans une équipe de pointe qui ne risque pas de tomber en disgrâce.

Bien que Red Bull n'ait pas remporté de Championnat du monde depuis 2013, l'année où Pérez faisait théoriquement son entrée dans la cour des grands, l'équipe semble avoir surmonté les problèmes qui l'ont amenée à sous-performer pendant une grande partie de l'année dernière. On peut dire qu'à peu près chaque saison depuis 2014, Red Bull a commencé l'année avec un package technique en demi-teinte qui a nécessité une poussée de développement majeure, et l'année dernière, elle a aggravé ce problème en ajoutant des évolutions qui n'ont pas fonctionné.

À la fin de la saison, elle avait tiré la compréhension nécessaire pour introduire une phase de développement qui a fonctionné – suffisamment pour devenir un véritable challenger de Mercedes en termes de rythme. Puisque les voitures de cette saison sont en grande partie des versions dérivées de la saison dernière avec un développement limité, Pérez peut être raisonnablement optimiste et penser qu'il n'est pas en train de se jeter dans un piège.

Mais il a aussi été engagé pour faire un travail. Il comble un vide laissé par le programme de jeunes pilotes de Red Bull, qui est temporairement à court de talents qualifiés pour la F1, et par la direction de l'équipe, qui n'est pas convaincue par les pilotes plus expérimentés de Red Bull – à savoir Pierre Gasly, qui reste en retrait chez AlphaTauri, et Alex Albon, qui a en fait été mis sur la touche et courra en DTM cette saison.

La tâche de Pérez est simple, et elle lui aura été décrite en aussi peu de mots que possible par le "conseiller des pilotes" de Red Bull, Helmut Marko. Pérez doit faire ce que Gasly et Albon n'ont pas su faire : se qualifier et rouler assez près de Max Verstappen pour couper les options tactiques de Mercedes et permettre au Néerlandais de se battre pour les victoires en course. Si le leader de l'équipe Red Bull est empêché pendant les courses, Pérez doit être en mesure de gagner. Mais à tout autre moment, sa présence ne doit pas menacer l'équilibre orange de Red Bull.

Vu et pas entendu ? En quelque sorte. Mais là encore, Pérez a toujours aimé laisser son pilotage faire le reste...

Rejoignez la communauté Motorsport

Commentez cet article
Article précédent Ocon et Alonso plutôt emballés par le moteur Renault
Article suivant Les pilotes toujours libres de mettre le genou à terre en 2021

Meilleurs commentaires

Il n'y a pas de commentaire pour le moment. Souhaitez-vous en écrire un ?

Abonnez-vous gratuitement

  • Accédez rapidement à vos articles favoris

  • Gérez les alertes sur les infos de dernière minute et vos pilotes préférés

  • Donnez votre avis en commentant l'article

Motorsport Prime

Découvrez du contenu premium
S'abonner

Édition

France