Opinion

L'erreur de jeunesse qui peut façonner une future star de la F1

L'"erreur d'amateur" qui a conduit au crash de George Russell l'a privé de ses premiers points en F1 lors du Grand Prix d'Émilie-Romagne. Mais la douleur ressentie après ce qui était une excellente performante pourrait bien alimenter sa route vers les sommets.

George Russell, Williams FW43

Photo de: Mark Sutton / Motorsport Images

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La ligne qui sépare les héros des zéros peut être franchie en une fraction de seconde en Formule 1. Il suffit de demander à George Russell. Pendant une grande partie de la course du Grand Prix d'Émilie-Romagne, il semblait de nouveau au bord de l'exploit.

Arrivé à Imola après que les rumeurs sur son avenir aient été balayées par la direction de Williams, le jeune Britannique a été salué publiquement par le double Champion du monde Fernando Alonso. S'exprimant au sujet des jeunes pilotes, Alonso a déclaré à Sky Sports : "De tous, George Russell est celui qui me surprend chaque week-end, sur la manière dont il pilote la Williams sans faire d'erreurs. Je suis vraiment surpris par sa vitesse naturelle. Donc si je devais donner un seul nom, mon choix pour l'avenir se porterait sur Russell."

Russell semblait en passe de conclure ce week-end avec ses premiers points. Dixième sous le régime de Safety Car consécutif à la sortie de piste provoquée par une crevaison de Max Verstappen, il était bien placé pour enfin rapporter le point qu'il espérait tant. Mais cette fraction de seconde, où les choses peuvent passer du bon au mauvais, est survenue dans la descente vers Acque Minerali, alors qu'il avait adopté une approche agressive pour maintenir de la température dans ses pneus. En accélérant fort, et au moment précis où il a appuyé sur la palette pour monter un rapport de boîte, sa voiture est passée sur une bosse, et c'était terminé. Un millième de seconde de patinage a été suffisant pour l'envoyer dans le mur et hors course.

George Russell, Williams FW43

Le crève-cœur constitué par cette opportunité manquée a été clair pour tous ceux qui ont regardé la course depuis chez eux. Alors qu'il s'asseyait, inconsolable, contre le grillage derrière le muret – une scène rappelant celle des larmes de Mika Häkkinen après son abandon à Monza en 1999 –, il n'y avait pas besoin de voir son visage pour comprendre sa détresse.

Pourtant, alors que certains pilotes se seraient retrouvés accablés de critiques pour ce genre d'erreur, la réponse a plutôt été à la compassion et aux encouragements. Ce n'était pas un moment duquel avoir honte, c'était un de ceux desquels il est possible d'apprendre. Toto Wolff, qui guide la carrière de Russell depuis plusieurs années désormais dans le cadre du programme des jeunes pilotes de Mercedes, est toujours de l'avis que les jours qui vous rendent excellents, que ce soit en tant qu'équipe ou que pilote, ne sont pas ceux lors desquels vous gagnez. Au contraire, il s'agit des occasions où vous faites des erreurs, où vous échouez et où vous devez vous reprendre pour que cela ne se reproduise pas.

Russell n'est clairement pas le seul pilote à avoir commis ce qui est apparu comme une erreur de débutant. Pensez à Lewis Hamilton (dans sa seconde saison) qui percute l'arrière de Kimi Räikkönen à la sortie des stands au Grand Prix du Canada 2008. Pensez à David Coulthard qui part en tête-à-queue dans le tour de formation au Grand Prix d'Italie 1995 ou qui s'accidente dans le muret en entrant au stand à Adélaïde la même année. Qui peut oublier Alain Prost, alors triple Champion du monde, partant à la faute dans le tour de formation du Grand Prix de Saint-Marin 1991 et ne prenant pas le départ ?

Il ne faut pas perdre de vue, pour Russell, que le déchirement de son abandon à Imola a été exacerbé par le fait qu'il avait fait un travail extraordinaire pour mener cette Williams dans le top 10 à la régulière. S'il avait signé une performance de faible niveau et avait dégringolé dans la hiérarchie, ou s'il avait brisé son aileron avant dans le premier tour et été relégué loin du peloton après s'être arrêté tôt, l'erreur sous Safety Car n'aurait pas eu le même retentissement. La douleur de ce qui s'est mal passé a été rendue plus importante par sa bonne course. En fin de compte, tout l'intérêt, pour Mercedes, de placer Russell chez Williams est qu'il puisse apprendre, et que ce genre d'erreur soit gommé avant d'avoir à affronter la pression et l'exposition plus importantes d'un top team.

George Russell, Mercedes, and Toto Wolff, Executive Director (Business), Mercedes AMG

Partir en tête-à-queue sous Safety Car est une chose quand vous vous battez pour vos premiers points, mais serait traité bien différemment si vous vous battez pour une victoire ou pour un titre mondial, ou si les espoirs de titre de votre équipe dépendent du fait que vous soyez à l'arrivée.

Mercedes et Wolff sont particulièrement conscients des dangers de promouvoir leurs jeunes pilotes trop rapidement. Valtteri Bottas a passé quatre années chez Williams et y serait resté plus longtemps sans la retraite surprise de Nico Rosberg fin 2016. Engranger de l'expérience loin du feu des projecteurs est essentiel pour s'assurer que les pilotes soient véritablement prêts pour le défi plus important consistant à rouler pour une structure capable de gagner des titres comme Mercedes.

Le week-end dernier, le responsable de la performance du véhicule de Williams, Dave Robson, a salué Russell non seulement pour ce qu'il produisait en piste mais également pour la façon dont il progressait en tant que pilote et dont il cherchait à s'améliorer, même dans les moments les plus décevants. Et, alors que le crash sous Safety Car à Imola a été un exemple de leçon apprise en public, Robson a expliqué que même les difficultés de Russell avec la très peu compétitive Williams en 2019 avaient été transformées en positif en faisant de lui un meilleur pilote.

"Je pense qu'il est exceptionnellement bon", a déclaré Robson. "Il s'est amélioré. Il est évident que la voiture l'a beaucoup aidé au cours de l'année dernière, mais malgré tout, je pense qu'il a été très bon pour tirer le meilleur parti de la situation l'an passé, et pour apprendre. Je pense que dans cette adversité, il a probablement appris. J'espère qu'il regardera en arrière dans cinq ou dix ans, et qu'il se souviendra que l'année dernière a été très précieuse, même si elle a été parfois pénible. Il est vraiment important. Il a la confiance, et maintenant l'expérience, pour vraiment nous guider. Il a encore beaucoup à apprendre, mais il a assurément fait un grand pas en avant. Je pense que c'est un vrai talent. Un énorme atout pour l'équipe."

À en juger par les encouragements et le soutien qu'il a reçus après l'accident de dimanche, et par son attitude qui lui a permis de reconnaître ce qu'il a appelé une "erreur d'amateur", Russell pourrait bien en venir à considérer Imola 2020 non pas avec regret, mais avec le soulagement d'un moment qui a contribué à faire de lui un meilleur pilote à l'avenir.

George Russell, Williams FW43

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