Analyse

Sacrifier Pérez pour Vettel : une nécessité autant qu'une volonté

En indiquant la sortie à Sergio Pérez prématurément malgré son CV irréprochable, la future écurie Aston Martin a fait place nette pour Sebastian Vettel. La décision est à la hauteur de la rudesse implacable de la F1, mais elle était nécessaire pour que le projet franchisse un nouveau cap.

Sergio Perez, Racing Point, descend de sa voiture

Sergio Perez, Racing Point, descend de sa voiture

Steven Tee / Motorsport Images

Après avoir explosé une première fois au mois de mai, quand Ferrari a décidé de ne pas prolonger le contrat de Sebastian Vettel, puis en juillet avec l'annonce du retour de Fernando Alonso chez Renault, le marché a retrouvé une certaine torpeur. La stabilité confirmée avec le maintien de Valtteri Bottas chez Mercedes, ou celui de George Russell et Nicholas Latifi chez Williams, s'est installée durant le début de saison retardé de la saison 2020. Un nouveau coup d'accélérateur a été donné cette semaine, lorsque Sergio Pérez a fait savoir qu'il allait quitter Racing Point à l'issue de la saison.

Le Mexicain est actuellement dans la première de ses trois années de contrat avec l'écurie de Silverstone, mais son avenir était devenu incertain sur fond de discussions entre la structure et Sebastian Vettel. Coéquipier de Lance Stroll, Pérez a d'abord fait savoir qu'il serait "évident" pour lui d'être mis sur la touche s'il fallait faire la place au quadruple Champion du monde, rappelant le lien filial entre son voisin de garage et le propriétaire de l'écurie, Lawrence Stroll. Puis, au fil des semaines, il s'est montré davantage confiant sur son avenir, avant que tout s'écroule. Finalement, la future entité Aston Martin a choisi de saisir l'occasion en voyant un pilote vedette disponible sur le marché des transferts.

Sergio Perez, Racing Point

Si l'on regarde le classement du championnat, Pérez a les résultats pour lui, affichant 34 points au compteur alors qu'il a manqué deux Grands Prix sur les huit disputés à ce jour, quand Vettel n'a inscrit que 16 points avec Ferrari. Surtout, il connaît l'écurie par cœur puisqu'il y évolue depuis 2014, lorsqu'elle s'appelait Force India. Aujourd'hui, sur la grille F1, un seul pilote affiche une plus grande longévité dans son écurie : Lewis Hamilton chez Mercedes. Par ailleurs, Pérez a joué un rôle déterminant dans le sauvetage de l'entreprise en accélérant le processus de placement en redressement judiciaire à l'été 2018, permettant ainsi son rachat par le consortium de Stroll.

En dépit de ces états de service, et même si Pérez a régulièrement démontré en piste qu'il pouvait être au niveau des meilleurs, il était difficile pour Racing Point de passer à côté d'une opportunité comme Vettel. Pour le Mexicain, c'est la fin d'une histoire mais il ne devrait pas avoir trop de mal à retrouver un baquet pour 2021 : il est rapide, a démontré qu'il pouvait signer des podiums, et possède le soutien de nombreux sponsors. Pour une écurie comme Alfa Romeo ou Haas, il y a énormément de raisons de s'intéresser à son profil… Ainsi est la loi de la F1. Pérez a été un personnage déterminant pour faire de Racing Point ce qu'elle est aujourd'hui, mais l'avenir doit continuer de s'écrire avec Vettel.

Vettel et Aston Martin, comme une évidence ?

L'avenir du pilote allemand a pourtant mis un peu de temps à se dessiner. Son départ annoncé de chez Ferrari n'était pas prévu, puisqu'il comptait prolonger avec la Scuderia, mais malgré cette mauvaise nouvelle, il est toujours apparu détendu sur la question de son futur. Devant les questions incessantes de la presse ces dernières semaines, il a toujours insisté sur sa volonté de prendre le temps de réfléchir et d'être certain de faire le bon choix. Lui-même a avoué qu'il n'avait franchement pas exclu la possibilité de quitter la F1, temporairement ou définitivement. Il n'en sera rien, et le voilà finalement embarqué dans un nouveau projet excitant, qui marque également un changement de cap majeur dans sa carrière.

Sebastian Vettel, Ferrari SF1000

Certains y verront un choix par défaut, après une décennie passée chez Red Bull Racing puis Ferrari. Pourtant, Aston Martin peut offrir à Vettel l'environnement idéal pour écrire une nouvelle page de sa brillante carrière. L'écurie fait l'objet d'un investissement réel et sérieux de la part de Lawrence Stroll, qui nourrit la véritable ambition de la voir triompher un jour. Recruter un pilote au palmarès de Vettel n'est d'ailleurs qu'une confirmation supplémentaire de ces intentions. Elle vient s'ajouter à ce qui est déjà dans les tuyaux, comme la construction d'une nouvelle usine ultra moderne à Silverstone.

Quand Vettel a rejoint Ferrari en 2015, son souhait était de bâtir une équipe autour de lui à la manière de ce qu'avait fait Michael Schumacher avec la Scuderia dans les années 2000. Cela ne s'est jamais matérialisé, le parcours a été ponctué de quelques réussites mais aussi d'échecs, et à Maranello, on a clairement détourné le regard vers Charles Leclerc pour construire l'avenir. Peut-être parviendra-t-il à le faire ailleurs.

En allant chez Aston Martin, Vettel va retrouver un environnement où il sera clairement le leader, d'emblée le chef de file. Pièce maîtresse du puzzle géant qu'assemble Lawrence Stroll, il devrait être bien plus considéré à sa juste valeur l'an prochain qu'il ne l'était ces deux dernières années chez Ferrari. Son arrivée n'est pas seulement souhaitée, elle est aussi nécessaire pour que l'écurie franchisse un nouveau cap.

Sur un plan plus personnel, il n'y a pas que l'intérêt pour la nouveauté qui a attiré le pilote de 33 ans. Il perçoit la possibilité d'écrire une histoire victorieuse avec une marque légendaire comme Aston Martin, d'en être la figure de proue. Le gain est aussi très clair à court terme : avec le gel des monoplaces, Vettel sait qu'il disposera peut-être l'année prochaine d'une F1 lui permettant de viser de meilleurs résultats que la Ferrari. La RP20, parfois surnommée "Mercedes rose" à la suite de l'affaire de copie, sera toujours rapide en 2021. En attendant mieux pour 2022, année du tournant réglementaire sur le plan technique ? Cette échéance, il aurait fallu l'attendre y compris chez Ferrari, ce qui signifie que le risque pris est limité.

Enfin, Vettel trouvera chez Aston Martin un cadre forcément moins politique que celui offert par Ferrari, avec davantage de place pour se concentrer sur l'essentiel. Charge à lui de donner tout son cœur dans cette nouvelle aventure et de prouver qu'il peut avoir l'influence tant attendue.

Lance Stroll, Racing Point, et Sebastian Vettel, Ferrari, parlent dans le parc fermé après la course

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