Analyse

Technique - Les sacrifices de McLaren peuvent rapporter gros en 2017

L’écurie McLaren-Honda sacrifie du précieux temps de piste en cette fin se saison afin de mieux préparer la saison 2017 qui exige une refonte complète des monoplaces de Formule 1.

Aileron avant de la McLaren MP4/31, GP des États-Unis

Photo de: Giorgio Piola

Les analyses techniques F1 de Giorgio Piola

Éminent expert technique de Formule 1, Giorgio Piola suit les Grands Prix depuis les années 1960. Sur Motorsport.com, ses analyses et illustrations se penchent sur toutes les nouveautés aperçues en F1 au fil des Grands Prix.

La saison 2016 de Formule 1 n’est peut-être pas terminée, mais on voit apparaître plusieurs modifications sur les voitures qui laissent présager les grandes directions techniques qui seront privilégiées l’an prochain. Les changements qui seront imposés aux règlements aérodynamiques et l’adoption de pneus plus larges nécessitent une refonte des monoplaces.

L’écurie Mercedes AMG a déjà testé un nouvel aileron avant “ouvert” que nous avons décrit lors du Grand Prix de Malaisie.

Cet aileron reprend un concept imaginé par Toro Rosso sur son aileron arrière qui est doté de persiennes ouvertes. L’aileron avant de la Mercedes dispose d’un plan principal qui n’est pas fixé au rebord, ce qui modifie son action.

Comparaison des ailerons de la McLaren MP4/31, avec indications, GP des États-Unis
Comparaison des ailerons de la McLaren MP4/31, avec indications, GP des États-Unis

Photo de: Giorgio Piola

Lors du Grand Prix des États-Unis à Austin, ce fut au tour de McLaren de tester certaines solutions qui seront peut-être utilisées l’an prochain. Depuis de nombreuses années, le bord d’attaque du plan principal de l’aileron avant sert à guider le flux d’air sous l’aileron, le tout muni d’arches de toutes formes, destinées à contrôler et à diriger les vortex ainsi créés.

Toutefois, McLaren s’est éloigné de cette façon de procéder (voir image ci-dessus). On note ainsi une importante courbure du plan principal depuis le point de jonction de la section neutre jusqu’au rebord externe. De plus, le second élément du plan principal, caractérisé par une fente qui l’étire jusqu’à la section des flaps, se trouve placé à un angle d’attaque moins prononcé qu’habituellement.

Les flaps ont aussi été redessinés. Ils ne diffusent plus l’air de la même façon et se terminent désormais à la jonction de la dérive latérale au lieu de former un rebord intérieur. Le dessous de l’aileron a aussi été révisé avec quatre arêtes fixées au plan principal au lieu de trois comme utilisé sur l’aileron 2016 (flèches bleues). Si le nombre d’arêtes variera sans cesse l’an prochain, McLaren modifie non seulement leur nombre, mais aussi leurs formes et leurs tailles.

Les ailerons avant des voitures 2017 joueront le même rôle que cette saison, à savoir d’équilibrer l’appui aérodynamique à l’avant de la voiture tout en créant des flux d’air qui seront efficaces à l’arrière. Toutefois, le retour de déflecteurs volumineux va modifier le travail de l’aileron avant qui n’aura plus à autant protéger le plancher et les pontons du sillage créé par les pneus avant.

Depuis 2009, les ingénieurs ont beaucoup travaillé sur l’aileron avant afin qu’il génère des structures d’air montantes pour réduire la traînée des pneus avant. Toutefois, le retour des grands déflecteurs signifie qu’un artifice physique jouera désormais ce rôle. L’aileron McLaren démontre qu’il n’a plus vraiment à jouer ce rôle de déviation d’air loin du plancher et des pontons.

Comparaison du S-Duct des McLaren MP4/31 et MP4/30, GP des États-Unis
Comparaison du S-Duct des McLaren MP4/31 et MP4/30, GP des États-Unis

Photo de: Giorgio Piola

Les écuries discutent aussi beaucoup des changements à apporter aux châssis en 2018, car on désire colmater la faille du règlement qui permet à Mercedes de pratiquer une énorme ouverture sur le dessus de son châssis. Cette région du châssis peut néanmoins procurer de bons gains en 2017, et McLaren a effectué des études, appliquant de la peinture de visualisation des flux sur la monoplace de Fernando Alonso lors des essais libres à Austin (flèche rouge ci-dessus).

Cette peinture à base de paraffine s’écoule et sèche à haute vitesse, montrant ainsi le chemin parcouru par chaque goutte. Ceci permet de valider certaines solutions créées en soufflerie ou en CFD.

L’application de cette peinture sur la McLaren ne signifie pas forcément un gros changement dans le design de la voiture. En revanche, cette section joue un rôle important, car le museau est en dièdre négatif par rapport au châssis, ce qui cause une instabilité des flux d’air et explique l’implantation des fameux S-ducts.

Depuis deux saisons, McLaren utilise un S-duct particulièrement élégant (on peut voir celui de la MP4-30 dans la bulle ci-dessus). Il était doté de deux sorties d’air à la jonction du museau et du châssis (flèches bleues). Il aidait la couche d'air à demeurer en contact avec la carrosserie de la voiture.

Cette section de la voiture est importante, car elle loge les éléments de la suspension avant. La taille de l’ouverture pratiquée dans le châssis permet de placer les organes de différentes façons. L’absorption des chocs par la suspension est une chose, les gains aérodynamiques en sont une autre. Il arrive que la cinématique d’une suspension avant soit légèrement altérée en faveur de gains aérodynamiques. Les écuries travaillent sur les suspensions des voitures 2017, tenant évidemment compte du fait qu’elles devront absorber des charges beaucoup plus élevées l’an prochain.

Tandis que des essais étaient effectués sur le train avant de la voiture d’Alonso, les ingénieurs s’affairaient sur le train arrière de la monoplace de Jenson Button. La MP4-31 du Britannique était munie de nouvelles pièces et de capteurs durant les essais libres à Austin afin d’aider les ingénieurs à comprendre ce qui cloche sur cette voiture et corriger ses défauts.

Le règlement 2017 prévoit un diffuseur de plus grande taille. Sa hauteur sera haussée de 50mm et, plus important, il pourra être allongé, car il pourra démarrer 175mm devant l’axe des roues avant. Avec les autres modifications aérodynamiques, la voiture pourra générer assez d’appui pour réduire ses temps au tour d’environ cinq secondes.

Comraison des diffuseurs de la McLaren MP4/31 et de la Red Bull RB8, GP des États-Unis
Comraison des diffuseurs de la McLaren MP4/31 et de la Red Bull RB8, GP des États-Unis

Photo de: Giorgio Piola

Le diffuseur monté sur la voiture de Button était muni de deux tiges de support supplémentaires, fixées au bord de fuite et à la structure déformable. Normalement, le diffuseur bouge et se déforme sous les contraintes aérodynamiques. Quatre capteurs (illustrés par la flèche) scrutaient les mouvements résiduels.

Ces capteurs sont fixés à l’intérieur de caissons isolés et fixés au plancher. Ceci rappelle les ailettes placées dans cette même région par Red Bull sur sa voiture 2012 (voir bulle), une solution probablement imaginée par Peter Prodromou qui travaille maintenant chez McLaren, mais qui oeuvrait chez Red Bull à cette époque.

Comme les lasers de mesure utilisés par McLaren sur les écopes de freins avant, ceux-ci mesurent la garde au sol du diffuseur lorsque la voiture roule en piste. McLaren a aussi illuminé la face intérieure du diffuseur afin de mieux percevoir les déformations.

Capteur sur les suspensions arrière de la McLaren MP4/31, à Austin
Capteur sur les suspensions arrière de la McLaren MP4/31, à Austin

Photo de: Giorgio Piola

De plus, on remarque qu’une mini-caméra a été installée sur l’extrémité du triangle de suspension supérieur (indiquée en rouge). Elle est pointée vers la partie arrière du capot moteur. Nous avons noté que la surface du capot moteur est recouverte d’une grille qui servira à accroître la précision des images et de points de références pour mesurer sa déformation.

McLaren a aussi brièvement installé une caméra sur une dérive de l’aileron arrière afin de surveiller les échappements du moteur pour mieux de comprendre comment la chaleur et les gaz d’échappements interfèrent avec les différents flux d’air.

Toutes ces études sont effectuées tard dans la saison et au détriment de la recherche des bons réglages pour la course, mais McLaren sait parfaitement qu’elles sont essentielles au design et au développement de sa prochaine monoplace.

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