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Terry Fullerton, le meilleur rival d'Ayrton Senna (2/3)

Motorsport.com a eu l'opportunité de s'entretenir avec celui qui fut désigné comme le meilleur rival de la carrière de Senna par le triple Champion du monde lui-même : Terry Fullerton.

Ayrton Senna

Photo de: XPB Images

Terry Fullerton devant Ayrton Senna à Estoril
Terry Fullerton
Le célèbre accrochage entre Ayrton Senna et Alain Prost au 46e tour
Tour de chauffe : Ayrton Senna et Alain Prost
Terry Fullerton devant Ayrton Senna à Lido de Jesolo
Ayrton Senna s'impose
Ayrton Senna s'impose, 0.014 seconde devant Nigel Mansell
Terry Fullerton devant Ayrton Senna à Lido de Jesolo
Après la course : Ayrton Senna
Damon Hill et Ayrton Senna
Terry Fullerton devant
Le vainqueur Ayrton Senna avec Patrick Tambay sur le podium
Ayrton Senna
Ayrton Senna mène devant Terry Fullerton et Cathy Muller à Wholen
Ayrton Senna
Ayrton Senna
Ayrton Senna, Toleman Hart TG184

Si vous avez lu la première partie de notre dossier inédit sur Terry Fullerton, vous êtes probablement en train de vous demander : si Fullerton était si bon, pourquoi n’a-t-il jamais couru en Formule 1?

"C’était stupide. C’était fou", déclare Fullerton sans mâcher ses mots. "Ils tombaient comme des mouches. C’était le sport le plus dangereux du monde, à l’époque. À la fin des années 60 et au début des années 70, c’était un sport mortel. Je m’amusais énormément en karting, je voyageais à travers le monde. J’étais professionnel, j’étais payé, et je profitais de ma vie."

"Mon frère s’est tué en pilotant des motos. Mes parents n’auraient pas supporté que j’essaie de passer en monoplace. Ils auraient vécu dans la peur à chaque fois que je montais dans la voiture. À l’époque où j’ai remporté le Championnat du monde en 1973, les cinq années précédentes, il y avait en moyenne trois ou quatre pilotes de Formule 1 qui mouraient tous les ans. Pas simplement qui avaient des accidents graves, mais qui mouraient vraiment."

Son raisonnement est certainement compréhensible, mais compte tenu de son talent, il est légitime de se demander s’il a jamais regretté cette décision.

“C’est arrivé", reconnaît-il. "C’est toujours quand je repense à ma décision de ne pas tenter l’aventure en monoplace. Je ne peux pas dire que mon raisonnement de l’époque était mauvais, même quand j’y réfléchis aujourd’hui."

"La seule chose que je regrette vraiment aujourd’hui, c’est que la plupart de ceux contre qui j’ai couru ont gagné énormément d’argent. Pas moi. Il faut encore que je travaille. Je ne suis pas riche du tout. Mais quand on prend une décision, il faut l’assumer. Je ne la regrette pas vraiment."

"Qui sait ce qui serait arrivé si je l’avais fait. Il y a de bonnes chances que je ne serais plus en vie. J’ai une fille de neuf ans. J’ai une vie que j’aime. J’ai une belle femme."

"Aucun d'entre eux ne s'est avéré aussi formidable que Senna"

Depuis sa décision de ne pas quitter le karting, Terry a eu la chance de courir contre de nombreux futurs pilotes de Formule 1. Compte tenu de cela, a-t-il déjà été confronté à un pilote qu’il estime aussi formidable que Senna ? Selon lui, ce sont Nigel Mansell, Champion du monde F1 en 1992, et Riccardo Patrese, vainqueur du Grand Prix de Monaco 1982, qui s’en rapprochent le plus.

"Aucun d’entre eux ne s’est avéré aussi formidable que Senna", clarifie Fullerton. "À l’époque, on aurait pu le dire. Certains d’entre eux étaient encore meilleurs parce qu’ils étaient des pilotes complets. Ils étaient plus âgés et plus expérimentés."

"Riccardo Patrese – j’ai remporté le Championnat du monde en 1973, il l’a remporté en 1974. Donc nous avons beaucoup couru l’un contre l’autre à ce moment-là. Il est devenu un très bon pilote de F1, mais pas vraiment du même niveau que Senna. Un très bon pilote, cependant. J’avais beaucoup de respect pour lui. Je le trouvais très bon globalement."

"L’autre contre qui j’ai couru quand j’étais bien plus jeune, c’est Nigel Mansell. J’ai couru contre lui pendant trois ans en Angleterre. Il a eu des hauts et des bas lors de ses premières années en formules de promotion mais il était très déterminé à réussir et il a fini par y arriver. En fait, il a dû vendre sa maison pour avoir assez d’argent pour continuer à courir, donc c’est clair qu’il était très déterminé, et il a fini par atteindre le sommet. Voilà un autre pilote qui était un peu spécial."

Fullerton explique que dans son rôle d’entraîneur de pilotes, il en a rencontré des très talentueux et très doués, mais qu’aucun n’atteint le niveau d’Ayrton Senna. Le Britannique a entraîné des champions tels qu’Allan McNish, Dan Wheldon, Anthony Davidson et Paul di Resta. "Tous les pilotes sont différents, ils ont leurs singularités. [Senna] avait ses forces et ses faiblesses, lui aussi. Quand on entraîne un pilote, on met le positif de côté et on identifie le négatif pour l’améliorer. Ou le faire partir."

"Mais non, en fin de compte, de tous les gens contre qui j’ai couru, il était différent", admet Fullerton. "Je ne peux pas vraiment lui comparer qui que ce soit. Les karts étaient relativement rapides donc quel que soit le jour, il y avait dix ou quinze gars qui pouvaient rouler dans le même dixième. Ce n’est pas cela qui faisait la différence. Ce qui faisait la différence, c’étaient l’intelligence, la stratégie et l’anticipation. C’est ça qui faisait la différence, pas seulement la vitesse pure en piste."

L'interview de Senna

Quant à la raison pour laquelle Senna a choisi Terry en répondant à cette question, Fullerton croit que cela avait quelque chose à voir avec le fait qu’il était un pilote complet lorsqu’ils ont couru l’un contre l’autre ; c’est une caractéristique que Senna aspirait à acquérir à l’époque, et il y est manifestement parvenu. Bien évidemment, Fullerton était ravi quand Senna l’a désigné comme le rival contre qui il était le plus satisfaisant de courir.

"J’étais impressionné par la façon dont il l’a dit parce qu’il y a vraiment réfléchi très clairement, et après, il a lentement donné sa réponse. Ce n’était pas précipité du tout. C’était très calculé. J’étais ravi qu’il l’ait dit, pour être honnête, parce que c’était une sorte de reconnaissance de mes compétences et de mon talent de l’époque, donc c’était génial."

"Je l’impressionnais parce qu’à l’époque, j’étais un pilote professionnel et complet. J’avais vingt-cinq ans et cela faisait douze ou treize ans que je courais. J’étais au sommet de ma forme, j’étais sûrement le pilote de kart le mieux payé du monde. En fait, pour la plupart des gens, dans le monde du karting, j’étais sûrement le pilote n°1 à l’époque."

"Il est venu pour courir contre moi et je le battais. J’étais plus rapide que lui. J’utilisais une logique tirée de mon expérience et bien sûr, mon propre talent. Quand on combine cela, c’est mieux que juste la vitesse pure et les capacités. Cela l'impressionnait beaucoup et je pense qu’il a commencé à adapter cette approche à ses courses : être plus méthodique et plus logique quant aux décisions que l’on prend plutôt que de se contenter d’avoir le meilleur moteur, les meilleurs pneus et d’espérer être rapide. À l’époque, j’ai vraiment gagné son respect."

À moto au Japon

Battre Fullerton dans tout ce qu’il entreprenait, même en-dehors du karting, devint une obsession pour un Senna que l’on sait être un compétiteur acharné. Une fois, ils étaient tous les deux au Japon pour des essais, et Yamaha leur demanda s’ils voulaient essayer des motos.

"Bien sûr, nous avons sauté sur l’opportunité. Ils avaient cette course d’obstacles où on pouvait juste essayer les motos. J’avais l’habitude de faire de la moto. J’en avais beaucoup fait quand j’étais plus jeune, donc j’ai commencé à faire des cascades, ce genre de truc. Je pense qu’Ayrton en avait aussi fait, mais pas autant que moi."

"Il ne se laissait jamais surpasser par quoi que je fasse. A un moment, je longeais l’arrière d’un gros tuyau d’environ un mètre de diamètre." Terry a sauté du bout du tuyau, a fait un wheelie sur sa roue arrière et a atterri sans problème. D’emblée, Senna a essayé de reproduire la figure.

"Il a sauté du bout du tuyau et la moto a plus ou moins atterri, elle s’est inclinée vers le ciel, puis il est retombé. Parfois, vous savez, des réactions éblouissantes, il était debout sur le frein arrière, quelque chose comme ça, et il arrivait à la récupérer et à éviter d’avoir un grave accident. La figure qu’il a faite était plus impressionnante que la mienne. Donc il était toujours dans cet état constant de vouloir faire mieux que moi."

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