Toto Wolff : Quand Nico Rosberg m’a appris qu’il quittait la F1

Ce dimanche 27 novembre 2016, Nico Rosberg terminait le Grand Prix d’Abou Dhabi en seconde position et était sacré Champion du monde. Cinq jours plus tard, le monde apprenait, avec stupéfaction, qu’il quittait l’écurie Mercedes AMG et le monde de la Formule 1.

Lors d’une rencontre avec quelques journalistes organisée dans le paddock du circuit Gilles-Villeneuve à Montréal à l’occasion du Grand Prix du Canada, Toto Wolff, patron de l’écurie Mercedes, a raconté, en toute sincérité et avec un certain humour, comment il a appris que son pilote quittait la F1 au sommet de sa gloire.

Toto Wolff avoue ne pas avoir vu venir cette décision de la part de Rosberg. Du moins, pas avant la course décisive. C’est après son couronnement que Wolff a commencé à noter certains détails anodins.

“J’ai eu un premier indice immédiatement après la course quand nous avons voyagé d’Abu Dhabi à Kuala Lumpur pour participer à un événement marketing”, raconte Wolff. “Quand nous sommes arrivés sur place, Nico a été accueilli comme s’il s’agissait de Justin Bieber. C’était fou. Il venait tout juste de remporter le titre, avait franchi une étape dans sa carrière et il pouvait rejoindre Lewis [Hamilton] au rang de superstar."

"Quelques heures plus tard, nous avons pris un autre vol en direction de Singapour. Nous étions assis un à côté de l’autre, mais étions séparés par l’allée centrale. Il était différent ; très songeur. Quand nous sommes arrivés à Singapour, il a dit vouloir aller manger chez Burger King. Je crois qu’il a dévoré trois cheeseburgers ! J’étais étonné, mais je me suis dit que la saison était terminée et qu’il pouvait en profiter. Nous avons ensuite participé à une courte activité promotionnelle.”

Livrer ses impressions

Comme c’était prévu, Wolff et Rosberg ont ensuite pris un vol de retour en direction de Francfort. Rosberg lui a demandé s’il pouvait s’asseoir auprès de lui pour discuter. “Nous avons eu une très longue discussion”, poursuit Wolff. “Il m’a affirmé que gagner le titre avait été terriblement difficile et qu’avant la course, il avait passé du temps dans un temple zen à Kyoto au Japon afin d’accumuler de l’énergie pour la bataille finale. Puis, nous avons parlé de nos priorités dans la vie. Il parlait sans cesse et mes yeux se fermaient, car j’étais extrêmement fatigué. Je lui ai souhaité bonne nuit et j’ai enfin pu dormir.

“Nous sommes arrivés à Francfort très tôt le matin. Il a pris une douche au lounge et devait ensuite se rendre à Wiesbaden, sa ville natale, pour y rencontrer le maire. Moi, je devais reprendre l’avion pour me rendre à Stuttgart y rencontrer Niki [Lauda] et Dieter [Zetsche, le grand patron de Daimler]. Nico et moi avons pris un petit déjeuner léger et il m’a salué pour prendre son avion."

"Trois minutes plus tard, mon téléphone sonnait. C’était Nico. Il était très émotif. Je lui ai demandé ce qui se passait. ‘J’arrive !’, lui ai-je lancé. ‘Non, non. Ne viens pas’, a-t-il rétorqué. ‘J’ai voulu te dire quelque chose, mais je n’y suis pas parvenu. Je prends ma retraite. Je quitte la F1. C’est déjà très dur pour moi, alors ne rend pas les choses plus difficiles'.”

Accepter sa décision

Wolff savait pertinemment que Nico ne blaguait pas. “Il était très clair. Je ne m’attendais pas du tout à une telle nouvelle. Nico est très cérébral et quand il a pris une décision, rien ne le fera changer d’idée”, poursuit Wolff.

“J’ai donc immédiatement appelé Dieter Zetsche. Il était six heures du matin chez lui. Il m’a répondu ‘Je suis tout nu sous la douche ! Que se passe-t-il ?’ Je lui ai dit ‘Pouvez-vous vous asseoir ? Nico quitte la F1 !’ Il a crié ‘Quoi ??”."

Wolff avait promis à Rosberg que la nouvelle de sa retraite demeurerait secrète. Par contre, il devait rapidement mettre Lauda au courant.

“Comme prévu, j’ai pris l’avion pour Stuttgart et Niki m’a accueilli au lounge de l’aéroport”, affirme Wolff. “Il avait une voiture avec un chauffeur. Mais je ne voulais pas que le chauffeur, ni personne d’autre, entende notre conversation. J’ai dit à Niki que je devais lui parler, en privé. Je lui ai dit ‘Allons dans les toilettes. Personne ne nous entendra’."

"Niki a répliqué ‘Je ne vais pas aux toilettes avec toi !’, mais il a finalement accepté. Je lui ai alors confié que Nico quittait Mercedes et la F1. Il n’en croyait pas un mot, mais il a fini par comprendre. Par la suite, nous avons rédigé le communiqué de presse officiel qui fut publié le 2 décembre. Non, je n’ai rien vu venir : aucun avertissement, aucun signe, rien. Ce fut un sacré choc à encaisser…”