Suzuki a tenu la belle promesse faite à Simoncelli

Huit ans après la mort de Marco Simoncelli, Tatsuki Suzuki a offert à celui qu'il considère comme son deuxième père un succès qui a déclenché dans le paddock cette vague d'émotion et de bienveillance que, parfois, les courses savent engendrer.

Pole position pour Tatsuki Suzuki, SIC58 Squadra Corse

Pole position pour Tatsuki Suzuki, SIC58 Squadra Corse

Gold and Goose / Motorsport Images

Ce pourrait être un scénario de fiction un peu convenu, mais lorsque de tels événements sont simplement le fruit de la réalité, ils prennent soudain une tout autre envergure. Dans la lignée de la vague d'émotion à l'ampleur inédite qui s'était emparée du paddock après l'accident qui fut fatal à Marco Simoncelli en 2011, l'attachant pilote italien n'a jamais quitté les pensées de ceux qu'il avait fait vibrer ou rire, et depuis ce funeste GP de Malaisie nombreux ont été les signes du destin qui ont entretenu le souvenir. Mais personne n'aurait osé rêver d'un épisode comme celui du week-end dernier, où la boucle semble en quelque sorte avoir été bouclée.

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Après avoir accompagné son fils dans toutes les étapes de sa carrière, puis avoir subi le pire drame possible, Paolo Simoncelli aurait eu toutes les raisons de quitter ce monde et ses souvenirs douloureux. Pourtant, dès 2013, il créa une équipe afin d'accompagner les débuts de jeunes pilotes, et une nouvelle aventure débuta ainsi, dans le souvenir du #58 que l'on retrouvait jusque dans la livrée arborée à l'époque et qui rappelait celle qu'il affichait lors de ses dernières saisons. Entouré de nouveaux pilotes, Paolo Simoncelli prit le temps de peu à peu se réapproprier cette vie et de grimper les échelons jusqu'au Championnat du monde, puis y fit son retour, tout naturellement.

En chemin, une première victoire est arrivée en 2016, en CEV, remportée par Tony Arbolino sur la piste de Jerez, celle qui avait vu Marco Simoncelli triompher pour la première fois en Championnat du monde. Trois ans plus tard, c'est à nouveau à Jerez que Niccolò Antonelli a mené l'équipe au succès pour la première fois sur la scène mondiale. Puis est arrivé ce Grand Prix de Saint-Marin, qui chaque année s'installe sur un circuit portant désormais le nom de l'ancien Champion du monde 250cc et qui va jusqu'à fièrement afficher son portrait dans les allées du paddock ou même sa silhouette dans son logo. Et le conte de fée s'est alors poursuivi : Tatsuki Suzuki, celui qui il y a deux ans promettait au "cher monsieur Marco Simoncelli" de mener un jour son père sur la plus haute marche du podium, a cette fois vu les planètes s'aligner et pour la première fois il s'est emparé de la pole position, puis de la victoire.

 

"Enfin, on y est arrivé ! Et je dis 'on', parce que ce n'est pas que moi. Cela fait trois ans que je travaille avec Paolo et c'est la seule chose qui manquait, la victoire", commentait le jeune Japonais à sa descente du podium, dans un italien quasi parfait. Car, depuis qu'il a rejoint cette équipe en 2017, Suzuki a la particularité d'y avoir beaucoup appris bien au-delà de la moto. Loin de sa famille et de son pays, il a trouvé un nouveau cocon dans lequel il a pu oublier les difficultés de l'exil et apprendre à devenir un pilote de premier plan. Pas simple pour un adolescent de quitter son pays et de trouver ses marques dans une nouvelle culture, mais là aussi la famille Simoncelli a été déterminante pour qu'il se sente bien. "Si on vient ici, en Italie, et que l'on ne trouve pas d'amis ou que l'on n'a pas quelqu'un comme Paolo, je pense que ça peut être très triste. Mais moi j'ai une famille ici en Italie : Paolo, [sa femme] Rosella, Martina leur fille, et puis maintenant des amis et ma copine. C'est donc devenu une grande famille, et quand je pars sur une course c'est la maison qui me manque, pas le Japon."

Au sein de cette nouvelle famille, un processus de mimétisme impressionnant s'est mis en place, et Tatsuki Suzuki est peu à peu devenu italien, pour ne pas dire romagnol. Une adaptation dont témoignent la langue et les expressions très régionales qu'il s'est appropriées, et même sa gestuelle, très différente lorsqu'il se trouve dans cet environnement ou dans celui dont il est issu. Son surnom est devenu Callaghan, sorti tout droit d'une blague mémorable de Marco Simoncelli. Quant à Paolo Simoncelli, il l'appelle tout bonnement "papa". "Il m'a tout donné, tout ce qu'il connaît. Il m'a appris tout ce qu'il a fait pour Marco, et maintenant il le fait pour moi. C'est fantastique. J'ai beaucoup de respect pour lui, parce qu'après ce qui est arrivé à Marco je pense que ça n'est pas facile de revenir sur le circuit. Mais quand il est là il est toujours concentré sur son travail, il m'apprend. Si je fais mal, il me gronde, mais si je fais bien alors il pleure, comme il l'a fait [samedi] après-midi ou [dimanche] ! C'est un rapport, disons, familial. Il est comme mon père."

"Paolo est plus qu'un ami, il est devenu, disons, mon père italien. Il essaye toujours de m'aider, même si je fais une erreur ou si je ne veux pas parler avec lui, il est toujours à mes côtés", explique le pilote aujourd'hui âgé de 21 ans. "Il a beaucoup d'expérience parce qu'il est le père de Marco, alors il sait comment remporter le titre de Champion du monde. Il m'explique, il m'apprend tout ce qu'il a appris grâce à l'expérience avec Marco. C'est ce qui fait la grande différence pour moi."

C'est donc sur le circuit Marco Simoncelli que la victoire est enfin arrivée pour Suzuki, et la coïncidence a frappé chaque membre de cette équipe et de cette famille en plein cœur, alors qu'il était plusieurs fois passé tout près de la récompense. "Cette année, j'étais très bien parti. Mais en Amérique j'ai fait une erreur et je suis tombé, puis à Jerez j'ai réussi à monter sur le podium. Ensuite j'ai tout le temps essayé de gagner, mais j'ai parfois joué de malchance ou fait des erreurs et gâché plusieurs courses. Après l'Autriche, sachant que je n'avais pas encore décidé ce que je ferais l'année prochaine, les choses n'étaient pas claires dans ma tête. Puis à Silverstone j'ai décidé ce que je ferai l'année prochaine, c'est-à-dire rester dans cette équipe, et à partir de là j'ai été concentré à 100% sur les courses. Il ne manquait donc que cette victoire", relate-t-il. Et inutile de dire que Tatsuki Suzuki "Callaghan" se sent à la maison sur ce circuit si particulier, qui lui est désormais encore plus cher : "Jusqu'à [samedi] après-midi, c'était mon deuxième Grand Prix à domicile, mais à partir de maintenant c'est chez moi !"

 

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