Les champions australiens qui murmurent à l'oreille de Bagnaia et Márquez

Marc Márquez accorde une attention toute particulière aux récits que lui livre Mick Doohan alors qu'il multiplie les efforts pour retrouver les sommets. Dans un autre registre, Pecco Bagnaia profite de conseils particulièrement précieux de la part de Casey Stoner, le pilote à qui il souhaite succéder dans le palmarès de Ducati.

Francesco Bagnaia, Ducati Team, et Casey Stoner, font un tour de piste

Photo de: Gold and Goose / Motorsport Images

Les deux plus grands champions australiens passés par les Grands Prix moto coulent aujourd'hui une retraite paisible, et pourtant ils n'ont jamais été aussi présents depuis qu'ils ont raccroché leur casque. Depuis l'an dernier, les noms de Mick Doohan et Casey Stoner reviennent de plus en plus régulièrement dans les conversations, devenus les interlocuteurs préférés de deux des top pilotes actuels.

Le quintuple champion du monde a été contacté par Marc Márquez au printemps 2021. Logique si l'on considère que tous deux appartiennent à la famille Honda, mais aussi qu'ils ont fait partie des victimes du virage 3 de Jerez. Doohan a en quelque sorte vu sa carrière s'y terminer, puisque c'est là qu'il a subi en 1999 la fracture de la jambe dont il n'allait jamais réussir à se remettre, lui qui admettra avoir aggravé sa situation en tentant un retour à la compétition trop rapide (ce qui n'est pas sans rappeler le cas de Márquez non plus).

Sept ans plus tôt, l'Australien avait expérimenté une autre blessure aux conséquences déjà très lourdes, puisqu'il avait bien failli perdre sa jambe et avait eu besoin de deux ans et de multiples opérations avant de revenir au sommet. Une situation dont il peut aujourd'hui s'inspirer pour transmettre à son cadet de précieux conseils afin de reconstruire une carrière stoppée dans son élan.

Márquez a déjà eu l'occasion d'expliquer à quel point sa rencontre avec Doohan lors du Grand Prix d'Italie l'an dernier, puis un coup de fil entre eux quelque temps plus tard ont servi de déclencheur pour le ramener à la victoire. Conscient que l'ancien pilote avait vécu, une trentaine d'années plus tôt, une situation très comparable à la sienne, le #93 a religieusement écouté son témoignage et les recommandations qu'a pu lui transmettre l'Australien.

Depuis, les deux hommes ont continué à échanger, et notamment très récemment lorsque Márquez a choisi d'interrompre sa saison pour tenter l'intervention de la dernière chance. "On s'est beaucoup appelés avec Mick Doohan, surtout avant la quatrième opération", explique-t-il. "J'ai beaucoup parlé avec lui car j'avais beaucoup de doutes mais il a été dans une situation similaire avec sa jambe. Il m'a dit que je ne roulerais peut-être plus jamais comme avant, mais que je pourrais piloter d'une autre façon et être compétitif, donc c'est ce que j'essaye de faire petit à petit. En Thaïlande, déjà, j'ai senti un step."

Revenu à la compétition le mois dernier, l'Espagnol progresse peu à peu avec un seul but, celui d'être à nouveau en pleine possession de ses moyens la saison prochaine, sans se soucier de ses résultats cette année. "C'est sûr que les prochaines courses vont être importantes mais le moment le plus important sera l'hiver à venir, où il faudra que je m'entraîne bien et que j'essaye de régler toutes les choses que je souhaite pour être compétitif en 2023. Après, comme me l'a dit Mick, le futur apportera les réponses donc on verra."

Mick Doohan, Marc Márquez, Repsol Honda Team

Mick Doohan et Marc Márquez en 2019

Si ses échanges avec Mick Doohan apportent à Marc Márquez une certaine sérénité d'esprit, Pecco Bagnaia, lui, est plutôt en quête de conseils techniques lorsqu'il parle avec Casey Stoner. C'est dans ce but qu'il a envoyé un message à l'ancien pilote en plein week-end du Grand Prix de Grande-Bretagne, obtenant en réponse des infos de première main sur la manière dont il pouvait trouver plus de motricité en sortie de virage. Ce jour-là, avec également les recommandations de Valentino Rossi pour son choix de pneus, le pilote Ducati avait réussi à inverser la tendance pour aller chercher une victoire inattendue.

Bagnaia a logiquement profité des liens de son ingénieur, Cristian Gabarrini, avec Stoner pour nouer ce contact et on comprend aisément qu'il entretienne ces échanges aujourd'hui encore, alors que le championnat retrouve Phillip Island. Vainqueur cinq fois sur place (seul Rossi a fait mieux au cumul des catégories), Stoner y a livré des prouesses telles qu'elles lui ont valu un virage à son nom et qu'elles font aujourd'hui office de leçons de pilotage. On ne pourrait le résumer mieux que ne l'a fait Danilo Petrucci cette semaine sur les réseaux sociaux, en écrivant : "Les étapes de la vie devraient être : on naît, on grandit, on voit Casey Stoner piloter à Phillip Island, on recommence et ensuite on meurt."

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Que pourrait donc espérer de mieux Bagnaia qu'une préparation de ce Grand Prix tant attendu aux côtés du maître des lieux ? C'est aux côtés de Stoner qu'il a fait son inspection de la piste jeudi, et on peut parier que l'Australien ne va pas beaucoup s'éloigner de son stand durant le week-end... "J'ai encore un peu parlé avec Casey aujourd'hui", confirme le pilote italien, le sourire aux lèvres. "Il est clair que c'est très important d'essayer d'en tirer un avantage. C'est clairement la meilleure façon possible d'apprendre quelque chose sur cette piste alors je vais essayer de tout comprendre."

Une nouvelle génération qui doit revenir aux fondamentaux

Revenu à deux points de Fabio Quartararo au championnat, le pilote Ducati partage l'avis du Français quant au fait que la lutte pour le titre reprend quasiment à zéro. "C'est comme si on recommençait le championnat et on est cinq à avoir une chance de gagner le titre", observe-t-il, néanmoins confiant en ses chances. "Je pense que notre potentiel est très élevé, on traverse une bonne période alors il faut qu'on en profite."

Bagnaia a indéniablement une chance à saisir cette semaine pour prendre le leadership et tenter d'enfoncer le clou après la déroute de Quartararo en Thaïlande. Et si c'était sur les terres de Stoner qu'il prenait l'avantage décisif, moralement du moins, alors que le constructeur italien cherche justement un successeur à l'Australien, 15 ans après ce qui reste le seul titre pilotes revenu à Bologne ?

"Le tracé est incroyable, c'est un vrai tracé old-style alors il faut être très précis, c'est très technique", décrit-il, lui qui n'a pas oublié être passé à 55 millièmes du podium ici-même en 2019, avec une quatrième place qui sortait du lot pendant son année de rookie. "J'ai vraiment hâte de rouler ici. C'est une de mes pistes préférées et je pense que c'est pareil pour tout le monde parce que c'est merveilleux de courir ici. En 2019, ça avait été ma meilleure course et j'avais beaucoup aimé courir ici. On verra. J'ai le sentiment que notre potentiel est beaucoup plus élevé à présent. Le nouveau carénage peut beaucoup aider pour la tenue de la moto dans certaines circonstances, comme sur cette piste. On va donc voir ce qu'on peut faire."

Au-delà même des secrets qu'il peut livrer pour une course réussie à Phillip Island, Stoner semble apprécier ce rôle informel de coach auprès du jeune Italien, notamment car il ne cache pas porter un regard critique sur la place prise par l'électronique dans le MotoGP actuel et voudrait voir les pilotes en revenir aux fondamentaux dans le maniement des machines comme dans la préparation des courses.

"J'ai l'impression que la génération actuelle a perdu un peu de la compréhension de ce qui se passe dans un week-end", expliquait Stoner il y a quelques jours dans le podcast In The Fast Lane, "à savoir comment essayer d'économiser les pneus ou régler la moto pour les longs runs, parce que beaucoup de choses s'appuient sur l'électronique. Ils se contentent de l'électronique et j'aime appeler ça un pansement. Ce n'est pas la véritable solution, ce n'est pas ce qu'il y a en dessous."

Comme à Valence l'an dernier, une autre piste qu'il aimait particulièrement, Stoner va donc tenter de faire profiter de la richesse de son expérience à celui qui peu à peu s'inscrit dans sa lignée. L'histoire dira bientôt ce qu'arrivera à en faire celui que lui-même jugeait trop irrégulier en 2021 et quel poids auront ces conseils dans la tournure que va prendre le championnat...

Avec Charlotte Guerdoux

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