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Les dix moments décisifs pour le titre MotoGP 2020

Titré six fois en sept saisons, vainqueur de 43% des courses dont il a pris le départ en MotoGP, Marc Márquez aura été le grand absent de cette saison 2020, ouvrant un boulevard aux prétendants à sa succession dès la première manche. Condensé en quatre mois, le championnat ne s'est toutefois pas arrêté à ce premier coup de théâtre...

Joan Mir, Team Suzuki MotoGP, Fabio Quartararo, Petronas Yamaha SRT

Joan Mir, Team Suzuki MotoGP, Fabio Quartararo, Petronas Yamaha SRT

Gold and Goose / Motorsport Images

1- Marc Márquez et Álex Rins se blessent

On aura attendu plus de quatre mois par rapport à la date initialement prévue, mais le 19 juillet, enfin, la grille de départ du premier Grand Prix de la saison MotoGP était formée et le coup d'envoi était donné. Trente-cinq minutes plus tard, l'impensable se produisait : Marc Márquez était à terre, et sérieusement blessé. On l'ignorait encore, chacun voulant croire dans les capacités exceptionnelles du champion espagnol pour qu'il retrouve la piste en un temps record − ce qu'il fit effectivement le week-end suivant, mais ponctuellement seulement −, cependant cette fracture de l'humérus allait gâcher l'intégralité de la saison du champion sortant.

Alors qu'il avait dominé le début de course, puis réalisé une remontée époustouflante après une première excursion hors-piste et un sauvetage digne de ses plus belles prouesses d'équilibriste, c'est dans un virage tristement célèbre pour Repsol Honda, celui-là même où Mick Doohan a vu sa carrière s'arrêter brusquement, que Marc Márquez a connu le plus grave coup dur de sa carrière. Cinq mois plus tard, il n'est toujours pas remis, et entre-temps une voie royale s'est ouverte à ses adversaires pour lui succéder au championnat.

Parmi les prétendants, il y aurait pu y avoir Álex Rins, seulement lui-même s'était blessé la veille, lors des qualifications du Grand Prix d'Espagne. Touché à l'épaule, le pilote Suzuki a choisi de ne pas se faire opérer, ce qui l'a cependant fragilisé lors des premières semaines de compétition en plus de l'avoir écarté de la première course. Après le quatrième Grand Prix de la saison, il affichait 48 points de retard sur le leader, Fabio Quartararo, qu'il allait petit à petit grapiller jusqu'à inverser la tendance et prendre 12 points d'avance au classement final.

Le Catalan allait toutefois devoir attendre son Grand Prix maison, huitième des 14 manches, pour monter sur le podium et entamer une solide série, or il avait déjà cumulé 36 points de retard sur son coéquipier, Joan Mir, à cette date. L'écart final entre eux serait de 32 unités…

2- Fabio Quartararo triomphe à Jerez

Le vainqueur Fabio Quartararo, Petronas Yamaha SRT

Déjà particulièrement riches, les deux premiers week-ends de course auront finalement grandement pesé dans la lutte pour le titre. Car tandis que Márquez, entre autres, se blessait, Fabio Quartararo atteignait la victoire pour la première fois. Très attendu après s'être heurté au #93 à plusieurs reprises en 2019, le jeune Niçois ne s'est pas fait prier et sitôt la saison lancée il a mis fin à la disette française en catégorie reine, succédant du haut de ses 21 ans au vainqueur précédent, Régis Laconi… 21 ans après sa victoire.

Alors que le championnat, réinventé pour faire face à la pandémie de COVID-19 et se conformer aux restrictions qui en ont découlé, inaugurait le format "back-to-back" en disputant une seconde course sur la même piste en l'espace de deux week-ends − ce qui se reproduirait quatre autres fois par la suite − Quartararo confirmait avec une seconde victoire acquise d'autorité lors du Grand Prix d'Andalousie. Au moment de quitter Jerez, Márquez affichait donc un compteur à zéro et Quartararo un score parfait de 50 points.

3- Le moteur de Franco Morbidelli s'arrête au GP d'Andalousie

Dès le premier week-end de course, Yamaha a été frappé par des problèmes de moteur. Il y eut d'abord une alerte sur l'un des blocs utilisés par Maverick Viñales pendant les essais du GP d'Espagne, puis une avarie touchant Valentino Rossi en course. Le week-end suivant, c'est Franco Morbidelli, alors tout proche d'un premier podium, qui dût mettre pied à terre, son moteur refusant à son tour de le mener jusqu'au drapeau à damier.

Ce n'était que le début des déboires techniques de Yamaha, dus à des soupapes défectueuses. Privés d'une partie de leur parc, les pilotes ont dû disputer le reste du championnat avec une certaine retenue et Viñales a même été contraint d'utiliser un moteur de plus que les cinq autorisés, écopant ainsi d'un départ de la pitlane au GP d'Europe.

Quant à Morbidelli, qui sera finalement battu de 13 points par Mir au championnat avec un avantage net de trois victoires contre une pour le pilote Suzuki, on voit à quel point la quatrième place (synonyme de 13 points) qu'il occupait au moment de son abandon aurait changé la tournure sa saison, sans même parler du podium auquel il aurait potentiellement pu prétendre...

4- KTM accède à la victoire, mais pas avec Espargaró

Brad Binder et le team Red Bull KTM Factory Racing fêtent leur victoire

Qui aurait parié sur une victoire de KTM cette saison ? Les progrès de la RC16 étaient pourtant notables et dès les essais du Grand Prix de République Tchèque le potentiel du groupe de Mattighofen s'est affiché ouvertement.

Engagé dans le programme du constructeur autrichien depuis la première course, Pol Espargaró semblait devoir être celui qui mènerait la R16 au sommet dès qu'elle en aurait la capacité, méritant même cet honneur selon Pit Beirer. Conscient du potentiel de sa machine sur la piste tchèque, l'Espagnol avait affiché son rythme en signant le deuxième temps des EL4, puis il avait dominé le warm-up. Pourtant ce fut son coéquipier, le rookie Brad Binder, qui se saisit de l'opportunité à Brno. Espargaró, lui, avait quelque peu manqué le coche au départ et, après quelques tours passés à batailler pour se rapprocher des premiers leaders, il a vu sa course s'arrêter dans un accrochage avec Johann Zarco lorsque le pilote KTM s'est rabattu à l'intérieur, là où le Français était en train de le passer.

La déception fut lourde pour Espargaró, contraint d'assister en spectateur au premier triomphe de son équipe. Et ce ne fut que le premier épisode de ses opportunités manquées. Une semaine plus tard, il occupait la tête de la course en Autriche lorsqu'un drapeau rouge a ramené tout le monde au stand, puis un nouvel accrochage, cette fois avec Miguel Oliveira, l'avait stoppé net à la seconde course. Troisième semaine et troisième déception, cette fois lors du GP de Styrie, puisque la victoire qui semblait bel et bien à sa portée lui a cette fois échappé… dans le dernier virage.

5- Le crash monumental du GP d'Autriche

Accident de Franco Morbidelli, Petronas Yamaha SRT et Johann Zarco, Avintia Racing

C'est indéniablement l'image de l'année : le crash stupéfiant de Johann Zarco et Franco Morbidelli au cœur du mois d'août. Tous deux sur le podium la semaine précédente à Brno, les deux hommes se sont accrochés au Red Bull Ring et se sont trouvés en quelques instants acteurs d'une scène surréaliste, où leurs machines en perdition frôlèrent miraculeusement les autres concurrents tandis qu'eux deux furent ballotés dans la voie de dégagement et légèrement blessés seulement.

Le choc a été immense dans le paddock, où chacun a pris un peu plus conscience à chaque replay d'images ahurissantes du drame qui venait d'être évité de justesse. Mathématiquement, cet épisode a aussi coûté de précieux points à un Morbidelli que l'on n'imaginait pas encore vice-Champion du monde et qui serait battu pour seulement 13 points au classement final.

6- Mir tient Rossi en respect à domicile

Joan Mir a connu une montée en puissance progressive au cours de l'été. Avec une cinquième place au GP d'Andalousie encadrée par deux chutes, il comptait un retard de 48 points sur Fabio Quartararo en arrivant en Autriche. C'est là toutefois que s'est opéré le premier tournant, avec la conquête de son premier podium lors de la première course disputée sur place. Vint ensuite une place de leader solidement tenue la semaine suivante, jusqu'à l'interruption au drapeau rouge et une quatrième place sauvée après avoir dû repartir en ne disposant plus de pneus adaptés.

"Le moment clé a été son premier podium, en Autriche. Là, Joan s'est libéré", assure Davide Brivio à Motorsport.com. "À la course suivante [le GP de Styrie], il était sur le point de gagner quand il y a eu le drapeau rouge. Après ce premier podium, il a réussi à maintenir ce niveau de performance, et ça c'est difficile. Cette régularité, c'est ce que les autres n'ont pas eu."

Si Marc Márquez manquait à l'appel, le pilote majorquin a tout de même pu se confronter à un autre champion, et il l'a fait avec la manière. C'est alors que Valentino Rossi évoluait à domicile, à Misano, que le pilote Suzuki s'est frotté à lui, le dépossédant avec intelligence du podium dans un superbe dépassement tenté à quelques encablures à peine du drapeau à damier. C'était alors la deuxième fois que Mir montait sur la boîte et cinq autres podiums allaient suivre en six courses, lui permettant au passage de prendre la tête du championnat.

7- Dovizioso au tapis à Barcelone

Admettez que, si l'on vous avait prédit avant le coup d'envoi du championnat que Marc Márquez ne verrait pas l'arrivée d'une seule course, vous auriez misé sur Andrea Dovizioso pour lui succéder au championnat. Vice-Champion du monde par trois fois, seul homme capable de pousser le pilote espagnol dans ses retranchements sur l'intégralité d'une saison, l'Italien apparaissait sur le papier comme son successeur naturel.

La saison 2020 aura pourtant été celle de l'occasion manquée pour Dovizioso et Ducati, rapidement empêtrés dans des difficultés à comprendre le nouveau pneu arrière introduit par Michelin et dans l'incapacité de retrouver l'aisance gagnée au fil des années et synonyme jusqu'à présent de réel potentiel de victoire. Si neuf vainqueurs ont été fêtés en 2020, Dovizioso n'a pu s'adjuger qu'une seule course, la plus évidente pour lui. Et encore, pour s'imposer au Red Bull Ring lors du Grand Prix d'Autriche, le #04 a dû puiser au plus profond de lui-même, challengé par la concurrence, avant comme après le drapeau rouge qui a stoppé Pol Espargaró dans son élan.

Souvent relégué bien loin de la lutte pour la victoire, Dovizioso s'est tout de même accroché grâce à sa régularité, au point d'être de quitter Misano, fin septembre, en leader du championnat. Mais la course suivante, à Barcelone, s'est arrêtée dès les premiers instants, lorsqu'il a été la victime collatérale de la chute de Johann Zarco dans le peloton. Il s'agira au final du seul abandon de l'Italien cette année, lui qui finira par manquer le podium du championnat pour quatre petits points, distancé par le vainqueur pour 36 unités.

8- Quartararo de poleman à 18e au GP d'Aragón

Lui aussi a occupé la tête du championnat, et longtemps. Lorsqu'Andrea Dovizioso mordait la poussière à Barcelone, Fabio Quartararo triomphait pour la troisième fois de l'année. Ce n'était toutefois qu'une parenthèse enchantée, et les six courses suivantes allaient lui rapporter moins de points que cette seule victoire.

Sous la pluie du Mans, des conditions dans lesquelles il manquait d'expérience, le Niçois avait réussi à limiter les dégâts en se battant contre son adversaire Joan Mir, aussi peu à l'aise que lui dans ces circonstances. Mais à partir du Grand Prix d'Aragón, la dégringolade a commencé. Il y eut d'abord sa très lourde chute pendant les EL3, lors de l'une de ces matinées très fraîches avec lesquelles le championnat a dû composer pendant cet automne inédit en Europe. Puis il y eut sa contre-performance en course, où bien que parti depuis la pole position il a rétrogradé irrémédiablement jusqu'à la 18e place, ce qui allait ensuite être expliqué par une mauvaise pression pneumatique.

C'est à ce moment-là que Joan Mir a pris les rênes du championnat, bien décidé à ne plus jamais les céder par la suite. Face à la régularité implacable du pilote Suzuki, Quartararo s'est débattu avec une Yamaha trop inconstante et sa frustration de voir la situation lui échapper. Son meilleur résultat sur ces six dernières courses allait être sa huitième place au GP de Teruel. Encore deuxième du championnat avant les deux dernières manches, il a finalement terminé huitième, trois places plus bas que l'an dernier.

9- L'éclosion de Franco Morbidelli

Doté de la moins aboutie des quatre Yamaha, Franco Morbidelli aura réalisé une saison exceptionnelle, rythmée par plusieurs performances imparables. Malgré son abandon mécanique en début de saison et sa lourde chute en Autriche, puis une autre chute au Mans alors qu'il évoluait en queue de peloton sous la pluie, le pilote italien a réussi à se hisser jusqu'à la deuxième place du championnat, en grande partie grâce à trois victoires, un score égalant celui de son coéquipier Fabio Quartararo dans une saison qui a vu neuf pilotes grimper sur la plus haute marche.

Auteur de son premier succès à domicile, à Misano, le pilote Petronas a récidivé au GP de Teruel, allant puiser au plus profond de lui-même dans une concentration quasi-mistique, puis à nouveau à Valence. Là, il a livré une performance irréprochable et encore plus impressionnante, en menant l'intégralité des tours comme il l'avait déjà fait les deux fois précédentes, puis en battant en duel Jack Miller dans un dernier tour de folie, alors même que Joan Mir se mettait définitivement à l'abri en validant le titre.

Avec deux pole positions, cinq podiums dont trois victoires, un meilleur tour en course et pas moins de 97 tours bouclés en leader (plus que quiconque), Franco Morbidelli a véritablement créé la surprise et marqué les esprits.

10- La victoire de Joan Mir au GP d'Europe

La saison touchait à sa fin et son statut de champion potentiel ne faisait plus de doute. D'aucuns dissertaient déjà sur la valeur qu'aurait son titre s’il ne parvenait pas à accrocher la moindre victoire à son palmarès, oubliant un peu vite le potentiel qu'il avait affiché au GP de Styrie avant le drapeau rouge. Resté admirablement concentré sur l'enjeu, bien plus important, du titre, Joan Mir a finalement mis tout le monde d'accord en s'imposant au GP d'Europe, à Valence.

Sa première victoire est intervenue au moment le plus opportun. Devancé par son coéquipier lors des deux manches précédentes, et notamment avec une victoire à la clé pour Rins, Mir a cette fois réussi à inverser l'ordre entre eux à l'arrivée et à empocher 25 points qui le rapprochaient cette fois très sérieusement du titre. Celui-ci allait être validé la semaine suivante dès sa première balle de match, et sans qu'il ait eu besoin de profiter de consignes d'équipe. Un nouveau champion est né !

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