Comment le flair des locaux a inspiré le succès de Márquez à Misano
Les pilotes italiens n'ont pas senti l'odeur d'humidité propre au circuit de Misano pendant la course de dimanche, ce qui les a poussés à rester en piste malgré l'averse. Marc Márquez a choisi de faire confiance aux spécialistes des lieux, et grand bien lui en a pris car ça l'a mené à la victoire.
Photo de: Gold and Goose / Motorsport Images
Il fallait avoir du flair dimanche au GP de Saint-Marin, dans tous les sens du terme. Jorge Martín en a manqué, lui qui a perdu de gros points en faisant le pari de changer de moto quand la pluie est arrivée alors qu'aucun autre leader n'a pris la même décision. Marc Márquez a été le grand gagnant de cette séquence, puisqu'il a profité du mauvais choix stratégique de son compatriote et de la chute de Franco Morbidelli, puis que ces conditions lui ont permis d'avaler Brad Binder, Enea Bastianini et Pecco Bagnaia en quelques virages. Mais l'Espagnol a expliqué par la suite que l'expérience des pilotes locaux lui a bénéficié.
Car si Martín a fait l'erreur de passer par la case stands, l'odorat de Bagnaia et Bastianini leur donnait la certitude que l'averse ne serait que passagère... et ne les a pas trahis. "Je suis resté en piste parce qu'ici, quand il commence à pleuvoir vraiment, la piste a une petite odeur d'humidité", a expliqué Bastianini, qui vit à Rimini, à une vingtaine de kilomètres du circuit de Misano, lorsqu'il a été interrogé par le site officiel du MotoGP. "Ce n'était pas le cas, et c'était nuageux mais pas tant que ça. Je me suis dit dit 'OK, ce sera une petite pluie', j'ai préféré continuer et au final, c'était le bon choix."
L'analyse a été la même pour Bagnaia, lui aussi habitué à enchaîner les tours à Misano avec la VR46 Riders Academy et résident de Pesaro, à une demi-heure de là. "Jeudi, il pleuvait dans le paddock et l'odeur était puissante", a souligné le pilote Ducati. "C'est une chose que je connais bien et il n'y avait pas cette odeur !"
Même si son succès de dimanche était le cinquième de Márquez à Misano, il n'est pas un aussi fin connaisseur des lieux. Alors au moment où la pluie est arrivée, le #93 a préféré se fier aux choix des spécialistes des lieux...
"La stratégie de Martin n'était pas vraiment folle. S'il avait continué à pleuvoir autant dans ce tour, il aurait eu la meilleure stratégie", a expliqué Márquez en conférence de presse. "Mais je me suis dit 'Je vais suivre les locaux !' Et les locaux sont restés en piste ! [rires] Ils connaissent [le circuit] mieux que moi et s'ils restaient en piste, je restais en piste. Les Italiens ont restés en piste, donc..."
Marc Márquez
Photo de: Gold and Goose / Motorsport Images
Pour les pilotes, il faut une part de chance au moment de prendre ces décisions mais un autre élément a poussé Márquez à faire le pari de rester en piste. Avant le départ, les prévisions n'annonçaient pas d'averse, ce qui lui a donné la conviction qu'un déluge n'était pas véritablement envisageable quand les gouttes de pluie se sont intensifiées : "J'ai pose la question à Frankie [Carchedi, son chef mécanicien] avant le départ et il m'a dit 'Les précisions disent [qu'il n'y aura pas de pluie] mais quelque chose peut peut-être arriver'."
"Quand ils disent que quelque chose peut arriver, ça veut dire une pluie fine. Mais on ne sait jamais. Dans ces conditions, c'est un peu plus ou un peu moins. J'ai vu que Franco Morbidelli avait perdu l'avant au premier virage et c'était assez humide. Comme je l'ai dit, ce n'était pas une blague, j'ai suivi les locaux, ils le savaient mieux que moi."
Bagnaia n'était guère mieux informé de son côté : "J'ai regardé le radar et j'étais assez certain que la pluie n'arriverait pas. Davide [Tardozzi, team manager de Ducati] m'a dit 'Il ne pleuvra pas' avant la course, donc..."
"L'an prochain il ne faut pas que j'écoute Davide ?" a questionné avec humour Márquez, futur coéquipier de Bagnaia, qui lui a confirmé avec le même second degré l'incompétence de son patron dans les questions météorologiques : "Ne jamais croire Davide en termes de prévisions ! C'est incroyable, à chaque fois qu'il dit une chose, il se passe l'inverse ! [rires]"
Marc Márquez et Pecco Bagnaia
Photo de: Gold and Goose / Motorsport Images
Sur un ton plus sérieux, Bagnaia reconnu une certaine inquiétude quand la pluie est arrivé, ce qui l'a poussé à la prudence et a permis à Márquez de fondre sur lui : "J'avais assez peur parce que j'avais vu que Morbidelli était tombé. Quand il est tombé, j'ai ralenti plus et j'ai vu que ceux de derrière revenaient mais je ne voulais prendre aucun risque, encore moins quand Jorge est passé au stand."
Faut-il mieux informer les pilotes ?
Cette course et le mauvais choix du leader du championnat ont illustré le peu d'informations à la disposition des pilotes quand les conditions évoluent. Faudrait-il que l'équipe puisse indiquer clairement à un pilote la nécessité de changer de moto ? Marc Márquez estime qu'en étant sur la moto, il est le plus à même de voir si une piste devient trop humide, mais pense qu'une équipe pourrait fournir des informations utiles dans le cas inverse.
"Dans les conditions précises [de dimanche], c'est le pilote qui décide, parce que même si on ne sait pas [quelles sont les conditions], c'est impossible que l'équipe sache ce que donne la pluie, donc le pilote décide en fonction de ses sensations. Si on passe de la pluie au sec, cette communication pourrait être utile parce qu'ils pourraient signaler que quelqu'un est plus rapide, que le moment est venu de rentrer, qu'il faut rester en piste... Mais quand on passe du sec à la pluie, c'est toujours le pilote qui décide."
Bagnaia n'est de son côté pas favorable à un renforcement des données à sa disposition sur la moto : "Ça dépend comment ils développent ce genre de choses. On a déjà toutes les informations possibles en piste, avec le panneau et le tableau de bord, donc je ne suis pas en faveur de ça."
Quant à Bastianini, il s'interroge sur l'opportunité d'une telle solution : "Pour moi, ça dépend du pilote, si ses sensations sont bonnes ou pas dans ces conditions. Je pense que l'équipe ne sait pas vraiment quelles sont les véritables conditions, on est les seuls à le savoir. Il faut beaucoup de technologie pour avoir plus d'informations que nous."
VIDÉO - Le résumé du GP de Saint-Marin
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