Márquez a fait un pari gagnant contre l'avis de son équipe

C'est selon lui un signe de son fort caractère, et c'est aussi l'expérience d'un champion qui a parlé : Marc Márquez a étonné son équipe en étant le seul à choisir le pneu arrière tendre à Phillip Island, et cela lui a permis de faire son retour sur le podium.

Le deuxième Marc Marquez, Repsol Honda Team, sur le podium

Photo de: Gold and Goose / Motorsport Images

Pour la première fois cette année, Marc Márquez a dû trouver dans sa valise une petite place pour un trophée, celui de sa deuxième place au Grand Prix d'Australie. Après des mois d'attente, il a ajouté un 100e podium MotoGP à son palmarès, et plus largement le 139e depuis qu'il évolue en Grand Prix (ce qui le mène à égalité d'Ángel Nieto), et il l'a fait avec l'art et la manière. Car pour réussir à se battre ainsi à l'avant de la course disputée à Phillip Island et même à tenter d'arracher la victoire, le champion espagnol n'a pas seulement déployé tout son talent en piste, il a aussi fait parler son sens de la stratégie.

"J'ai prédit que si je choisissais la même option [de pneu] que les autres je n'allais avoir aucune chance en course", a-t-il expliqué pour justifier son choix étonnant, celui de prendre le pneu tendre à l'arrière. "C'est étrange parce qu'avec la Honda normalement on fait toujours l'inverse, mais il faut parfois prendre des paris", a poursuivi Márquez. "Je crois que Pol [Espargaró] a choisi le pneu arrière dur et, après avoir été rapide vendredi puis samedi sur le tour lancé, il était trop loin pendant la course et je pense que c'était dû au pneu."

Depuis deux ans, les difficultés physiques n'expliquent pas à elles seule que le #93 ait vu sa courbe de performance baisser. Il doit également composer avec une machine qui a marqué le pas de façon notable et qui peine à rivaliser avec la concurrence. Alors, pour lui, ce coup de poker se justifiait.

"Bien sûr, on améliore la Honda, mais c'est la même base que celle qu'on a utilisée toute l'année. C'est difficile, et pour battre les autres, il faut quelque chose en plus. Aujourd'hui j'ai donc essayé d'utiliser mon expérience pour choisir ce pneu arrière car j'ai prédit que le rythme de course allait être lent. C'était une sorte de pari, mais ça s'est avéré être la bonne décision."

Le pneu arrière de Marc Márquez à l'arrivée de la course

Les conditions qui régnaient à Phillip Island ce dimanche ont compliqué le choix de pneu et on a ainsi vu des options variées et plusieurs changements réalisés in extremis sur la grille de départ. Parmi eux Marc Márquez, qui a cependant dû convaincre son équipe de faire confiance à son feeling.

"Ils ont toujours beaucoup cru en moi. Aujourd'hui, le choix de ce pneu arrière tendre a été ma décision. Ils étaient contre, mais je leur ai dit : 'Les gars, je vais faire ce pari et en prendre la responsabilité'. J'étais le seul à le faire sur la grille, mais peu importe, c'était la seule façon d'être à ce niveau avec cette Honda, car avec l'autre pneu je sais quel problème j'aurais eu."

"J'avais vu que le pneu dur ne me donnait pas de bonnes sensations. J'ai donc décidé de prendre un risque", a poursuivi l'Espagnol. "Quand j'ai dit que je voulais le tendre, il y a des yeux qui se sont écarquillés, même chez les Japonais, car je prenais un tendre alors que mes coéquipiers prenaient un dur. C'était une option extrême mais ils ont eu confiance. Mais au final, cette décision a été un travail collectif car ils ont travaillé tout au long du week-end pour m'apporter cette confiance qui m'a permis de bien choisir."

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Jusqu'au bout, Márquez a cherché l'ouverture sur Rins

Le premier effet de ce choix a été de permettre à Marc Márquez de se maintenir pendant dix tours à la deuxième place qu'il occupait sur la grille de départ. Lorsqu'Álex Rins et Pecco Bagnaia ont pointé le bout de leur nez, il avait suffisamment bien économisé sa gomme pour leur résister, au contraire de Jorge Martín, leader pendant 13 tours mais qui a finalement vu six pilotes passer la ligne d'arrivée avant lui.

Le pilote Repsol Honda a profité d'une course lente, moins éprouvante pour lui physiquement mais qui correspondait aussi précisément ce qu'il attendait pour que sa gomme tendre puisse voir le bout des 27 tours. "Au début, le rythme était très lent, et pour moi c'était tant mieux ! C'est ce dont je rêvais. C'était une bonne chose pour gérer le pneu arrière."

"J'ai bien géré la course, j'ai attendu la fin pour attaquer", a expliqué l'Espagnol, qui n'est pas descendu plus bas que cinquième, à six tours de l'arrivée. "Ça s'est un peu compliqué pour moi quand je suis passé cinquième. Je ne m'attendais pas à me retrouver si loin et j'ai dû forcer sur le pneu pour récupérer."

Francesco Bagnaia, Ducati Team, et Marc Marquez, Repsol Honda Team

Marc Márquez avec Pecco Bagnaia et Álex Rins

Entré dans le dernier tour en troisième position, il a continué à croire en ses chances jusqu'au drapeau à damier. "Malheureusement, je prévoyais d'être deuxième [en entrant dans le tour] mais je n'ai pas réussi. J'ai attaqué fort dans le dernier tour et Rins a très bien défendu, or quand le pilote qui se trouve devant vous défend bien, vous ne pouvez rien faire", a-t-il expliqué.

Dès lors, les options se sont envolées une à une : le pilote Suzuki était "impossible à passer" dans le virage 2 où il a particulièrement excellé aujourd'hui, puis le virage 4 s'avérait problématique pour la Honda... "Bien sûr, j'aurais pu lui faire l'intérieur au virage 10, mais vu la manière dont il défendait, si j'avais fait ça Pecco aurait gagné la course, j'en suis sûr, parce qu'on n'aurait pas pu bien prendre le virage", a estimé Márquez, qui n'a eu de cesse de se heurter à Rins. "Il n'était pas plus rapide que moi, mais quand vous êtes similaires et que celui qui est devant défend super bien et fait un dernier tour parfait comme il l'a fait, vous ne pouvez pas [y arriver]. Il faut parfois l'accepter."

Márquez a malgré tout tenté de trouver l'ouverture, jusqu’au bout. "J'ai essayé différentes choses dans le dernier virage, comme le fait d'enclencher la cinquième en milieu de virage histoire de comprendre [ce que ça allait donner], mais ça a été une erreur."

"Quoi qu'il en soit, je suis content de ce week-end et de notre performance tout au long du week-end", a assuré le champion espagnol, qui dit ne pas avoir vu le temps passer, signe qu'il a pris du plaisir. "Ça a été amusant parce que quand j'ai regardé le classement pour la première fois, il ne restait que sept ou huit tours. Je me suis dit 'outch attention, ça passe !' [rires] et j'ai donc commencé à attaquer fort. La course a passé très vite."

Finalement battu de seulement 0"186 par le vainqueur, le #93 s'est offert un énorme boost de motivation en livrant une telle bataille en piste, puis en se faisant acclamer par un public avec lequel il est volontiers allé au contact. Petit à petit, le Marc Márquez que nous connaissons semble réapparaître... "Certes, je dois encore travailler pour être compétitif sur tous les circuits à l'avenir mais je me sens bien et j'ai un caractère fort", a-t-il tenu à souligner. "Pour le montrer, j'ai été le seul à prendre le pneu arrière tendre aujourd'hui : quand je crois en quelque chose, j'y vais." Le message est on ne peut plus clair.

Avec Charlotte Guerdoux

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