Hommage

Ángel Nieto, de "niño de Vallecas" à 1er Champion du monde espagnol

Décédé jeudi, l'Ibère restera dans les mémoires comme le premier pilote espagnol à avoir décroché un titre mondial, avant de construire l'un des plus importants palmarès en Grands Prix.

Angel Nieto, Derbi

Angel Nieto, Derbi

Nationaal Archief Netherlands

Avec la disparition d'Ángel Nieto, mort ce jeudi 3 août à l'âge de 70 ans, c'est un nouveau personnage clé de la compétition moto qui a tiré sa révérence. Fort d'un palmarès composé de 90 victoires et de 13 titres en Championnats du monde, celui-ci restera dans les mémoires comme le premier Espagnol a avoir été sacré, en 1969.

Pourtant, ce chemin vers les sommets n'était pas tout tracé pour celui qui allait devenir le troisième pilote le plus prolifique en termes de victoires en Grands Prix, derrière Giacomo Agostini et Valentino Rossi. Né à Zamora, localité située à quelques encablures du Portugal, le 25 janvier 1947, Nieto a en effet grandi dans l'un des quartiers difficiles du Madrid franquiste des années 50, Vallecas, qui lui vaudra d'ailleurs l'un de ses surnoms plein d'affection auprès du public hispanique, "el niño de Vallecas".

Agostini, Angel Nieto

Après avoir débuté dès 12 ans comme apprenti mécanicien, le jeune Nieto ne tarde pas à s'essayer à la compétition en participant à quelques épreuves locales ainsi qu'à des courses de côte, sur une Derbi privée. Après avoir fait ses armes au sein du Championnat espagnol, il se voit finalement confier par Derbi une de ses 50cc en 1964, à l'âge de 17 ans, devenant ainsi le plus jeune pilote d'usine de la marque barcelonaise.

Nieto s'illustre alors dès la manche espagnole du calendrier, disputée sur le circuit de Montjuïc, en Catalogne, avec une cinquième place. Un premier podium viendra ensuite en 1967, toujours sur une Derbi 50cc, avec une deuxième place décrochée sur aux Pays-Bas.

Premier titre mondial d'un Espagnol en 1969

Mais c'est bien en 1969 que le jeune talent va éclore et se révéler au grand jour. Nieto signe ainsi sa première victoire en Championnat du monde en Allemagne de l'Est, sur le Sachsenring, et vogue vers son premier titre en catégorie 50cc, non sans avoir livré une âpre bataille face au Néerlandais Aalt Toersen, qu'il devance d'un seul point en fin de saison – en vertu du règlement sportif de l'époque, qui disposait que seuls les meilleurs résultats correspondant à la moitié des courses, plus une, était comptabilisés au championnat.

Angel Nieto, Bultaco 50cc, et Eugenio Lazzarini, Kreidler

Si Nieto constitue le premier Espagnol titré au niveau international, son parcours reste cependant indissociable de celui de son compatriote Santiago Herrero, un autre pilote à avoir grandi dans le quartier madrilène de Vallecas.

Nieto et Herrero, les pionniers espagnols

Ce dernier, engagé en catégorie 125cc, échouera cette même année à remporter le titre, là aussi pour une seule petite unité, face à l'Australien Kell Carruthers. Mais c'est bien grâce à Herrero que Nieto sera sacré en 1969, après que son compatriote a terminé à la deuxième place sur le Sachsenring, devant Toersen, privant le Néerlandais de points décisifs dans l'attribution du titre 50cc. Las, le destin voudra qu'Herrero disparaisse sur l'Île de Man l'année suivante, alors qu'il était en tête de la catégorie 250cc.

Cette fois sans l'appui de son ami défunt, Nieto s'imposera de nouveau dans son duel face à Toersen, doublant ainsi la mise en 50cc, avant de se positionner idéalement l'année suivante pour faire le doublé 50cc et 125cc (il était commun à l'époque que les pilotes soient engagés dans plusieurs catégories).

Pour réussir cette gageure, l'équation est simple pour Nieto : s'adjuger les deux courses lors de la dernière manche de l'année courue sur le circuit de Jarama, dans le Nord de Madrid. Las, il chute lors du premier tour de course en 50cc, laissant le titre à Jan de Vries. Incertain pour la manche 125, Nieto se fait violence devant l'insistance du public pour prendre part à l'épreuve. Bien lui en prend : Nieto va cette fois-ci s'imposer devant la paire de Britanniques Chris Mortimer et Barry Sheene. 

Angel Nieto et Jan de Vries

La saison 1972 laisse encore une fois la place à un duel De Vries/Nieto, particulièrement serré, à tel point qu'avec le même nombre de points et exactement les mêmes résultats au cours de l'année, il faut recourir aux appendices du règlement sportif pour pouvoir départager les deux hommes, et précisément aux temps cumulés lors des cinq premières courses ! Et c'est Nieto qui sort gagnant de ce petit jeu, devançant De Vries de 21,32 secondes...

Doublé 50cc et 125cc

Détenteur d'un nouveau titre en 50cc, l'Ibère parvient cette année-là à réaliser le doublé en remportant également le titre en 125, après que son principal rival, et ami, Gilberto Parlotti, est décédé lui aussi lors du Tourist Trophy de l'Île de Man.

Par la suite, Nieto remportera huit autres couronnes, dont trois de rang en 50cc (1975 à 1977) et quatre d'affilée en 125cc (1981 à 1984), portant son total de sacres à 13 (ou plutôt 12 + 1, comme il aimait dire par superstition). 

Angel Nieto, Derbi, vainqueur de la course

Autant de titres décrochés dans les petites cylindrées, alors que l'Espagnol n'aura marqué des points en 250cc qu'à une seule reprise, lors du Grand Prix d'Allemagne 1981, avec une cinquième place obtenue à Hockenheim sur une Yamaha. 

Après son dernier titre en 125cc en 1984, son premier amour, Derbi, lui proposera de piloter l'une de ses 80cc, lors de la manche française de la catégorie, au Mans, en soutien de Jorge Martínez. Une pige discrète s'annonce alors, jusqu'à ce que son compatriote ne puisse prendre le départ de l'épreuve en raison d'un problème technique et lui laisse par conséquent le champ libre pour ce qui sera son 90e et ultime succès en Grands Prix.

Reconversion réussie et Légende du MotoGP

La saison 1986 fera quant à elle office de baroud d'honneur, dénué de victoire cependant, avec une lutte face à l'Allemand Gerhard Waibel en 80cc. Le titre se jouera finalement lors du dernier tour de la dernière course, une nouvelle fois en Allemagne, sur le tracé d'Hockenheim, suite à une casse mécanique en sa défaveur. Ce sera la dernière épreuve à laquelle aura participé l'Espagnol, qui prendra sa retraite dans la foulée.

Loin de rester inactif, le multiple Champion du monde occupera par la suite le poste de directeur d'équipe avec le Via Digital Team, structure pour laquelle courront son fils, Ángel "Gelete" Nieto Jr, et Emilio Alzamora, qui sera Champion du monde 125cc en 1999.

Angel Nieto

Passionné par la compétition moto, Nieto continuera ensuite de partager ses connaissances et son expertise en commentant les Grands Prix au micro de la télévision espagnole. Un altruisme venu couronner son palmarès imposant, et qui sera récompensé en 2000 par son entrée parmi les "Légendes" du MotoGP.

Accidenté le mercredi 26 juillet dernier lors d'une sortie en quad sur l'île d'Ibiza, l'Espagnol souffrait d'un fort traumatisme crânien qui avait forcé les médecins à le plonger dans un coma artificiel, duquel il semblait peu à peu sortir, avant qu'une brutale dégradation de son état dans la nuit du 2 au 3 août, conséquence de la formation d'un œdème cérébral, ne provoque son décès prononcé ce jour. 

Après la mort de Nicky Hayden le 22 mai dernier, c'est donc une nouvelle figure de proue de la compétition moto qui fait ses adieux, et laisse un grand vide derrière elle.

Valentino Rossi fête la 90e victoire de sa carrière avec Angel Nieto

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