Pol Espargaró : "De retour chez KTM, je suis là où je devrais être"
Son sourire est vite revenu et son pilotage a retrouvé son naturel : Pol Espargaró vit avec soulagement son retour dans le groupe KTM, et voilà que ses ambitions remontent en flèche après deux années de souffrance sur la Honda.
Pol Espargaró ouvre un nouveau chapitre dans sa carrière en rejoignant un programme à l'image nouvelle, celle du constructeur espagnol GasGas, qui cache en réalité des retrouvailles pures et dures avec le groupe KTM. L'enthousiasme qui les entoure est à la hauteur du choc qu'avait été son départ lorsqu'il s'était laissé séduire par les sirènes de Honda, lui qui avait jusqu'alors mené le développement de la RC16 et l'avait aidée à franchir toutes les premières étapes de sa progression en MotoGP.
"C'est super que Pol soit de retour dans notre groupe", se réjouit Pit Beirer, directeur du Motorsport à la fois chez GasGas et KTM, qui évoque volontiers une "famille" KTM. "En quelque sorte, nous lui 'devons' quelque chose parce que nous étions en train de monter un projet dingue et alors qu'il avait atteint un certain niveau et [que nous] avions déjà commencé à gagner des Grands Prix, il nous a quittés."
Le divorce a beau avoir été brutal, il semble avoir été mené avec suffisamment d'intelligence pour que le pilote et le groupe autrichien finissent par se retrouver. "Il existe une connexion spéciale avec lui sachant que, chez KTM, nous avons entamé cette aventure avec lui", pointe Pit Beirer auprès du site officiel du MotoGP. "Le perdre il y a deux ans a été un peu comme perdre un enfant, ça a été très douloureux, mais nous avons réussi à tout le temps maintenir une très bonne relation. Nous l'avons suivi et avons continué à lui souhaiter le meilleur, même s'il était ailleurs. Et finalement, nous l'avons fait revenir."
"Lorsqu'on traverse des moments difficiles avec les gens, ça rapproche énormément", souligne Pol Espargaró. "Quand j'étais chez KTM, on a vraiment pataugé de nombreuses fois durant quatre ans, quand on avait du mal. Il y a beaucoup de têtes connues ; pareil chez Tech3 parce que j'ai commencé avec eux. J'étais bien plus jeune et stupide que maintenant ! [rires] Alors c'est super de revenir chez eux et de voir quelle a été ma progression en tant que pilote et en tant qu'homme."
Certes, il retrouve de vieilles connaissances, mais Pol Espargaró veut voir ce retour comme un renouveau, lui qui est à présent porteur d'un projet à l'identité différente, sous les couleurs de GasGas. Surtout, c'est fort de l'expérience acquise durant ses deux années d'éloignement chez Honda qu'il revient, au guidon d'une RC16 qu'il a retrouvée avec un réel soulagement. "À Valence, j'ai juste senti l'ADN de la moto. Et quand cela correspond à votre propre ADN, ça vous fait vous sentir hyper bien. J'ai vraiment adoré piloter cette moto", se réjouit-il.
"Lorsqu'on passe beaucoup de temps avec une marque, ou qu'on grandit en MotoGP avec elle, il est très difficile de changer. Je sens que j'ai grandi avec KTM, je suis devenu ce que je suis en MotoGP avec KTM. Je n'étais pas à l'aise chez Yamaha quand j'ai commencé. Puis j'ai passé quatre ans chez KTM, j'y ai appris tout ce que je connais. Ensuite, chez Honda, j'ai essayé mais la situation n'était clairement pas simple. Maintenant que je suis de retour chez KTM, je sens que je suis là où je devrais être. Je suis très chanceux."
Pol Espargaró a retrouvé avec bonheur les caractéristiques de pilotage de la KTM, en adéquation avec son style
Et lorsqu'il s'agit de décrire l'aspect fondamental du pilotage qui lui a tant manqué durant ses deux ans sur la RC213V, au point de l'avoir mis face à une page blanche, comme s'il devait soudain tout réapprendre, Pol Espargaró devient intarissable. "L'une des choses dont j'ai le plus besoin pour piloter et stopper une moto, c'est le frein arrière", explique-t-il. "On ne peut pas uniquement manier la moto avec l'avant, il faut pas mal l'aider. Le pilote n'a pas juste besoin de frein moteur, il utilise aussi beaucoup la pédale du frein arrière. J'étais habitué à faire ça chez KTM et maintenant je le fais de façon assez naturelle. Le problème c'est que ces deux dernières années, je ne pouvais pas utiliser le frein arrière. Rien." Et d'illustrer : "C'est comme si vous, les journalistes, vous écriviez de la main gauche au lieu de la droite. Certes, vous pouvez le faire, mais pas aussi vite et pas avec la même confiance. C'est ce qui m'est arrivé."
"Parfois, je pouvais être rapide ; durant la pré-saison, j'avais pu beaucoup utiliser le frein arrière, par exemple, mais ensuite je l'ai à nouveau perdu, progressivement, et mes résultats ont baissé en même temps. En réalité, durant la pré-saison et en début de saison, j'étais plus rapide que les autres, [...] j'étais plus rapide que Marc [Márquez], parce que j'arrivais à utiliser le frein arrière alors qu'ils n'étaient pas habitués à le faire. Ils regardaient mes données en disant qu'ils devaient réapprendre à piloter parce que c'était différent. Ensuite, j'ai peu à peu perdu cela et ils ont gagné d'autres choses, et ça m'a agacé."
"Chez GasGas, la situation est différente, la moto se pilote avec le frein arrière en entrée de virage et l'avant subit donc moins de pression. Les ingénieurs Ducati [recrutés par KTM] aussi nous ont dit que c'était la voie à suivre. En appuyant sur l'arrière, on libère un peu plus l'avant pour tourner. Quand on met de la pression sur l'avant en entrée de virage, il s'oriente vers le bas et jamais vers la sortie."
L'espoir de mener le groupe KTM
Tandis qu'il décrivait, en marge du test de Sepang, le pilotage de cette moto qui lui correspond bien plus que celle qu'il a tenté de dompter durant deux ans, son frère Aleix, qui passait par-là, s'est fendu d'une boutade loin d'être anodine. "Il a plus souri là que pendant toute la saison dernière !" a lancé l'aîné, premier témoin du moral en berne de Pol ces deux dernières années, lui habituellement si solaire.
Plus à l'aise au guidon et son moral à présent reboosté, Pol Espargaró a bien l'intention de frapper fort cette année. "Je veux être le gars qui va mener l'usine. Je veux être celui que le constructeur voit comme le pilote le mieux classé de l'usine ! Voilà ce que je veux. Je n'aime pas entrer dans les questions politiques. Vous savez, je suis un pilote, je veux être le plus rapide, le plus sauvage, et essayer d'être au sommet [autant] que possible. Bien sûr, à mon âge, je n'ai pas la folie des jeunes pilotes. Je pense qu'avec l'âge il y a autre chose qui vient, à savoir l'expérience, et je crois que je peux l'utiliser pour être le plus rapide."
Associé au rookie Augusto Fernández, Pol Espargaró fait figure de capitaine du team Tech3 et du projet GasGas
Pit Beirer voit chez Pol Espargaró le profil idéal pour porter le projet de GasGas : "C'est un battant. Son état d'esprit positif et sa façon de motiver toute l'équipe et tous ceux qui l'entourent vont être tout simplement formidables pour le projet GasGas. Et puis, bien sûr, cela aide l'identité espagnole de la marque qu'il soit à bord."
"Je ne pense pas que ce qu'il a en tête ce soit simplement de participer et de faire monter lentement une marque !" sourit le responsable allemand. "Nous nous engageons pour obtenir des résultats et je pense que nous sommes prêts. Pol est prêt. Pour ce qui est d'Augusto [Fernández, son coéquipier], nous devons lui donner du temps, bien sûr, et il va falloir qu'il progresse petit à petit dans la catégorie. En ayant Pol, avec toute son expérience, je pense que le team peut entamer la saison en force."
Doté de la même machine que les pilotes KTM, il est perçu comme étant sur un pied d'égalité avec Brad Binder et Jack Miller, et personne ne se fait d'illusions sur ses ambitions. "Il veut montrer à l'équipe orange ce que le projet rouge, de GasGas, peut faire", constate Pit Beirer, "alors j'ai le sentiment que viendra un moment dans la saison où nous aurons une forte bagarre entre les deux équipes de la famille."
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