Tech3 se donne jusqu'à la pause estivale pour former son line-up 2022

Les performances de Danilo Petrucci et d'Iker Lecuona sont scrutées à la loupe en ce début de championnat, les prétendants ne manquant pas pour les KTM qui leur sont confiées chez Tech3. Hervé Poncharal souhaite toutefois temporiser et éviter toute décision précipitée.

Danilo Petrucci, KTM Tech3, Iker Lecuona, KTM Tech3, et leur équipe

Gold and Goose / Motorsport Images

L.B., Le Mans - À l'instar des deux pilotes qui forment l'équipe officielle KTM, Danilo Petrucci et Iker Lecuona, binôme du team Tech3, disposent tous deux d'un contrat pour la saison 2021 agrémenté d'une option pour conserver leur place en 2022. Une situation qui les contraint à faire leurs preuves rapidement en ce début de championnat, alors que le marché s'affole déjà pour les guidons restant à confirmer en vue de l'an prochain. Pas simple dans un contexte où les performances globales des KTM ont faibli en comparaison d'une saison 2020 grandiose, marquée par les trois premières victoires du groupe, dont deux obtenues par Tech3.

Pour comprendre le line-up actuel de l'équipe française, il faut se souvenir qu'il est le fruit de deux situations imprévues, les départs de l'équipe officielle de Johann Zarco en 2019 et de Pol Espargaró en 2020. La place laissée vacante par le Français avait en effet conduit au passage de Brad Binder de Tech3 au team d'usine, ouvrant dès lors un guidon à pourvoir dans l'équipe française à un stade avancé de l'année. C'est sur Iker Lecuona, qui venait de signer pour le team Ajo en Moto2, qu'Hervé Poncharal avait porté son dévolu, obtenant la promotion de l'Espagnol au sein de l'organisation Red Bull KTM. Quelques mois plus tard, le choix de Pol Espargaró de rejoindre Honda a poussé le constructeur à recruter un nouveau pilote d'expérience, en l'occurrence Danilo Petrucci, et de le placer chez Tech3 afin de reformer dans son équipe principale le binôme Binder-Oliveira.

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Petrucci, l'un des deux seuls pilotes à changer de constructeur durant l'intersaison, a logiquement subi les conséquences de la réduction drastique des essais hivernaux, lui qui court après le temps pour désapprendre la Ducati et trouver ses marques sur la KTM. Une adaptation qui, pour le moment, se révèle compliquée. "Danilo doit s'habituer, alors qu'il avait quasiment toujours roulé sur une Ducati. La moto a toujours eu des pilotes au gabarit assez petit, or il est plutôt grand et costaud. Il y a beaucoup de paramètres nouveaux à digérer pour lui", rappelle Hervé Poncharal à Motorsport.com, plutôt déçu par ce qu'il a été possible de réaliser lors du test post-course de Jerez, rare journée de travail permettant de se détacher du rythme effréné des Grands Prix. "On espérait faire un gros pas en avant", admet-il, "mais on n'a rien trouvé, ni lui en feeling, ni nous en réglages pouvant lui donner ce genre de feeling et faire en sorte qu'il se sente plus à l'aise."

Danilo Petrucci, KTM Tech3

La baisse sensible des performances globales des RC16 en ce début de championnat n'aide pas à embellir le tableau, alors que les forces en présence ont sensiblement évolué et que le pneu préféré des KTM a été retiré de l'allocation, obligeant à s'adapter. "Quand on se souvient de la deuxième moitié de la saison 2020 et que l'on regarde les quatre premières courses de 2021, pour Tech3 la réalité est difficile", admet le patron français. Et le classement très compact peut par ailleurs se révéler injuste au vu du nombre de places que coûte une perte de trois petits dixièmes. "Danilo se sent de mieux en mieux, mais aujourd'hui, vu le contexte hyper serré, ce n'est pas suffisant. Mais il n'y a pas que Danilo : l'année dernière, il y avait une KTM sur le podium quasiment à chaque course ; là, on n'en a pas encore fait et la meilleure position c'est cinquième à Portimão. Donc il faut qu'on continue de bosser. Ça n'est pas facile, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais c'est pareil pour tout le monde."

Ne pas surréagir sous l'effet de la pression

Les pilotes qui n'ont pas encore de place assurée pour 2022 ont peu de temps, en effet. Le rythme imposé par des contrats courts est rude, pressé par les attentes des investisseurs et l'éclosion de jeunes pilotes qui tapent à la porte pour tenter de s'adjuger ces machines qui ont prouvé leur capacité à gagner des courses parmi l'élite. Hervé Poncharal ne veut toutefois pas précipiter une décision alors que seules quatre courses ont été disputées, sur trois pistes différentes. "Tout le monde surréagit au présent, c'est évident", souligne-t-il, désireux d'atténuer la pression. "Ma position est d'essayer de temporiser. Mon rôle est aussi de faire comprendre qu'on ne peut pas juger sur trois courses. J'ai toujours dit qu'un pilote rapide c'est aussi un pilote heureux, qui se sent soutenu."

Danilo Petrucci est assurément l'un des pilotes chez qui les aléas du moral se lisent de façon limpide, et c'est précisément dans une volonté de lui redonner confiance en lui qu'Hervé Poncharal s'efforce de le mettre à l'aise. "L'année dernière, j'ai vu qu'il n'avait pas la banane. Il m'a dit qu'il était heureux que l'on travaille ensemble, qu'il avait envie de retrouver une famille, de se sentir désiré, soutenu, et notre but dans l'équipe Tech3 c'est de lui donner ce feeling. Mais évidemment, les résultats comptent aussi, et voir des courbes de résultats plates est peut-être un peu déprimant pour lui. Nous essayons donc sans arrêt d'instiller du positif."

"C'est obligatoire qu'il y ait de la pression et que le mercato s'ouvre relativement tôt, parce qu'on connaît l'importance du pilote dans notre sport, il est prépondérant", souligne-t-il. "Il n'y a pas beaucoup de pilotes qui sont capables d'être vraiment des leaders, ils sont donc évidemment au centre du mercato et il faut déjà se positionner relativement tôt, sans quoi ils vont partir ailleurs."

Malgré tout, Hervé Poncharal veut attendre le mois prochain pour évaluer l'adaptation de Danilo Petrucci : "Je pense que les choses seront beaucoup plus claires aux alentours de Barcelone, Assen." Il se donne les mêmes délais pour son deuxième pilote, Iker Lecuona. Arrivé une saison plus tôt sur la KTM, l'Espagnol partait avec un autre désavantage, celui de jouir d'une expérience globale beaucoup plus faible et de découvrir totalement la catégorie reine avec ce recrutement tardif.

"Dès qu'il est arrivé, ça a bien fonctionné, tout le monde était content et il progressait bien", se souvient le Français. Seulement, à une fin de saison manquée à cause du COVID-19 fait suite un début de championnat "plus difficile que ce qu'on pensait" pour lui. "Mais c'est plus difficile aussi pour Binder et pour Oliveira. Il y a des paramètres qui font que, pour l'instant, la famille KTM est un peu moins performante qu'elle l'était fin 2020", rappelle Poncharal.

Iker Lecuona, KTM Tech3

Les performances pures ne sont toutefois pas le seul critère de jugement. "Ce ne sont pas que les résultats. C'est une manière de travailler, une attitude. Il faut regarder si l'imput technique fonctionne, s'ils ont envie, s'il y a une progression", explique-t-il. "Est-ce que le pilote a la volonté, l'envie ? Est-ce qu'il a l'esprit constructif ? Est-ce qu'il est techniquement suffisamment intelligent ? Est-ce qu'il évolue ?" Dans le cas de Lecuona, c'est donc bien une évolution plus nette qui est attendue en comparaison des signaux positifs de 2020, et là aussi la manche d'Assen, fin juin, est perçue comme le délai limite pour que le pilote prouve qu'il est à la hauteur.

"C'est le MotoGP, ils sont une vingtaine sur la grille, donc chaque place représente quelque chose et il faut la mériter", ajoute Hervé Poncharal, réaliste. Fidèle à ses habitudes, le Français met dont sa patte dans l'évaluation à laquelle sont confrontés ses pilotes, et particulièrement dans son rythme, mais il ne sera pas seul décisionnaire : "C'est une décision collégiale, dans laquelle sont impliqués Red Bull, KTM et Tech3." Des choix logiques se dégagent déjà parmi les prétendants, ceux dont dispose l'organisation Red Bull KTM, présente à tous les échelons des petites catégories. "Ce sont ceux qui ont le plus de sens, parce que c'est le fruit de l'investissement de Red Bull et de KTM et c'est le but de cette filière. […] Dans le contexte actuel, tout le monde parle de Fernández et d'Acosta, un peu moins de Remy mais il a maintenant le profil pour pouvoir éventuellement monter en MotoGP", observe Poncharal, qui a déjà fait courir l'Australien en Moto2. Actuel leader du championnat, Gardner ne devance que de quelques points son coéquipier, Raúl Fernández, rookie dans la catégorie et déjà vainqueur cette année. Quant à Pedro Acosta, dont les débuts en Moto3 sont stupéfiants, il est déjà au cœur de spéculations portant sur un éventuel transfert vers le MotoGP.

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