Il y a 110 ans, Renault remportait le premier Grand Prix de l'Histoire

La marque au Losange a inscrit son nom au palmarès du premier Grand Prix de l'ACF, disputé au Mans les 26 et 27 juin 1906, et conclu par la victoire du Hongrois Ferenc Szisz devant la Fiat de Felice Nazzaro.

Ferenc Szisz, Renault AK

Renault Sport

La compétition automobile elle-même était née en 1895 lorsque, après un premier "concours" de régularité entre Paris et Rouen organisé en 1894, une trentaine de pilotes (accompagnés de leur mécanicien) se lançaient à l'assaut d'un parcours monumental long de 1178 km reliant Paris à Bordeaux, et retour. Pour l'histoire, Emile Levassor passait la ligne d'arrivée en tête, sur sa Panhard et Levassor.

Les courses de ville à ville se développèrent alors en cette fin de XIXe siècle, et la compétition, d'abord limitée aux fabricants français, alors pionniers en la matière, commençait à prendre une dimension internationale à l'arrivée du XXe siècle, sous l'impulsion de l'Américain James Gordon Bennett, propriétaire du New York Herald, qui lançait l'idée d'une Coupe des nations organisée chaque année, et qui réunirait les meilleurs constructeurs de chaque pays avec, pour la première fois, des courses disputées sur des parcours en boucle (des tours encore longs de plusieurs centaines de kilomètres toutefois).

Les marques tricolores (Panhard & Levassor, Mors, Charron notamment), étaient ainsi rejointes par les Britanniques (Wolseley, Napier), alors que Mercedes effectuait son entrée dans la ronde à l'occasion de l'édition 1903 de la Coupe Gordon Bennett, un an avant l'arrivée de Fiat en 1904.

Mais c'est bien la France qui dominait encore largement une industrie automobile encore naissante. Frustré de voir les fabricants tricolores bridés à l'échelon international - les inscriptions par pays étaient limitées dans la Coupe Gordon Bennett -, l'Automobile Club de France, né en 1895, décidait d'organiser sa propre compétition automobile internationale, sans limitation d'engagements nationaux. L'épreuve, baptisée "Grand Prix de l'ACF", se tiendrait dans la région du Mans, dont la candidature avait été préférée à celle de Fontainebleau. 

Voiture d'époque-2006-cen-tm-0005
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Photo de: Edit J. Bariller

Une appellation "Grand Prix" issue des courses hippiques

À noter que le terme "Grand Prix" a en fait été utilisé pour la première fois à l'occasion du "Grand Prix de Pau" 1901, une épreuve qui venait clôturer "La Semaine de Pau", qui proposait alors une série d'épreuves automobiles organisées sur un tracé long de 300 kilomètres autour de la cité béarnaise. L'appellation était elle-même inspirée des courses hippiques, et instaurée par l'américain William Knapp Thorn, jockey de renom et Palois d'adoption, qui fut l'un des fondateurs de l'Automobile Club basco-béarnais.

Le Circuit de la Sarthe, premier du nom, consistait ainsi en un triangle d'une centaine de kilomètres de long, reliant les villes du Mans, La Ferté Bernard, Saint-Calais puis retour au Mans, sur un tracé recouvert pour l'occasion d'une couche de goudron pour éviter les risques de poussières excessive sur le parcours.

Comme on s'y attendait, les marques françaises arrivent en masse du côté de la Sarthe pour y briguer la victoire à l'occasion de cette compétition disputée sur deux journées, les 26 et 27 juin 1906. Darracq, Clément-Bayard, Panhard & Levassor, Renault, Hotchkiss, Gobron-Brillié, Lorraine-Dietrich ou encore Brasier constituent ainsi la majorité du contingent au départ, rejoints pour l'occasion par les Italiens de Fiat et Itala, ainsi que les Allemands de Mercedes, alors que les Britanniques boudent un format auxquels ils ne sont pas favorables. 

Voiture d'époque-2006-cen-tm-0012
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Photo de: Edit J. Bariller

Ferenc Szisz, le mécanicien devenu pilote

Les pilotes, toujours flanqués de leur mécanicien à leurs côtés, ne partent pas encore groupés - il faudra attendre le Grand Prix de l'ACF 1922 à Strasbourg pour voir l'introduction d'une première véritable grille de départ -, mais à intervalles réguliers, à la manière de pilotes de rallye. Le circuit de 103,18 km exactement est à parcourir six fois par jour sur les deux journées au programme, soit une distance totale de 1238 km pour chaque machine.

Sous un soleil de plomb, et des températures caniculaires (plus de 40°C), Paul Baras (Brasier) prend les devants et s'empare de la tête du classement à l'issue du premier passage. Au 3e tour, il est devancé par Ferenc Szisz (photo), chef du département essais chez Renault et fer de lance de l'écurie de course de la marque au Losange, qui boucle la première journée en tête sur sa Renault AK devant la Clément-Bayard d'Albert Clément et la Fiat 130 HP Corsa de Felice Nazzaro, alors qu'une douzaine de concurrents a déjà renoncé.

Le lendemain, Ferenc Scisz (accompagné de son mécanicien, dénommé... Marcel Marteau) conforte son avance pour décrocher la victoire en… 12 heures 14 minutes et 7, 4 secondes, soit une vitesse moyenne de 101,195 km/h sur l'ensemble des deux journées. Le pilote hongrois, ancien mécanicien du "patron" Louis Renault évidemment présent dans la Sarthe pour ce jour de gloire, s'impose ainsi avec plus de 32 minutes d'avance sur la Fiat de Felice Nazzaro, alors qu'Albert Clément complète le podium après avoir perdu une position lors de cette deuxième étape. Onze pilotes sont classés, sur les 32 au départ, le dernier, un certain "Mariaux", accusant 4h34 de retard sur le vainqueur au volant de sa Mercedes. 

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Photo de: Edit J. Bariller

Épilogue en 2006... et en 2008

Après ce triomphe tricolore au Mans, le Grand Prix de l'ACF allait ensuite consacrer Felice Nazzaro, qui prenait sa revanche en 1907 pour imposer sa Fiat du côté de Dieppe, avant le triomphe de la Mercedes de Christian Lautenschlager en 1908, toujours à Dieppe.

Le Grand Prix de l'ACF, disputé sous l'appellation Grand Prix de France à partir de 1968, s'est disputé sur une vingtaine de terrains différents, d'abord sur des tracés temporaires, comme Dieppe, Amiens, Lyon, Strasbourg ou Tours, avant de se tenir sur des circuits permanents comme Monthléry à partir des années 20, puis Reims, Rouen-les-Essarts, Charade, Le Mans, le Circuit Paul-Ricard, Dijon-Prenois, puis enfin Magny-Cours à partir de 1991, et une dernière édition du Grand Prix de France remontant déjà à 2008, et conclue par la victoire de la Ferrari de Felipe Massa. 

A noter que la Renault AK de 1906 a été ressortie en 2006 pour les cent ans du premier Grand Prix de l'ACF, en compagnie d'autres véhicules de l'époque, à l'occasion d'une célébration spéciale sur parcours reprenant le même tracé que la course de 1906. 

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Photo de: Eric Gilbert 

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