Opinion

Le retour inattendu d'Audi, promesse d'un nouvel âge d'or

Audi a annoncé travailler sur un retour aux 24 Heures du Mans : on pourrait donc enfin assister à la lutte que l'on avait espérée en 2012, entre le constructeur allemand, Peugeot et Toyota. Ce choix vient aussi crédibiliser la formule LMDh, dans laquelle d'autres marques pourraient s'engouffrer ultérieurement.

Audi R18 e-tron quattro 2016

Photo de: Audi Communications Motorsport

Compte tenu de la crise mondiale qui frappe actuellement, je suis certain de ne pas être le seul à espérer qu'une machine à voyager dans le temps me ramène vers une période plus heureuse. Mon rêve est devenu réalité lundi, en tout cas pour ce qui est de la discipline que j'aime, quand Audi a annoncé son retour en Endurance. J'ai eu l'impression de me retrouver à l'hiver 2011-2012, une époque à laquelle on s'attendait à une lutte à trois entre Audi, Peugeot et Toyota dans le tout nouveau championnat FIA WEC qui allait naître l'année suivante.

C'était une période passionnante pour l'Endurance au niveau mondial. Il y avait Audi et Peugeot, qui s'étaient affrontés pendant cinq ans aux 24 Heures du Mans ainsi qu'en Intercontinental Le Mans Cup, et un autre grand nom rejoignait le LMP1, Toyota, pour des courses de développement en 2012 avant un programme complet la saison suivante. Porsche avait déjà annoncé son arrivée pour 2014 et l'Endurance était à la mode, nous permettant de prédire que nous étions à l'aube d'une nouvelle ère.

Il s'est avéré que Peugeot était absent lors du début de cette ère, à Sebring en mars 2012. Le constructeur avait annoncé son retrait brutal deux mois avant le coup d'envoi de la saison, mettant prématurément fin à son programme avec la nouvelle 908 Hybrid4. Néanmoins, avec ou sans Peugeot, nous avons eu notre âge d'or. En partie grâce à Toyota, qui redoubla d'efforts pour anticiper son programme et participer au WEC plus tôt que prévu. Désormais, l'on peut dire que cette lutte à trois que nous n'avons jamais connue aura lieu plus de dix ans après. Toyota et Peugeot seront sur la grille avec des LM Hypercars tandis qu'Audi, treize fois vainqueur au Mans, le sera avec un prototype LMDh conçu autour d'un châssis LMP2.

Toyota Hypercar

Audi n'a pas annoncé de date pour son retour au sommet de l'Endurance, ce qui sera alors une première depuis 2016. Ma compréhension est toutefois que ce sera pour 2023, année lors de laquelle la catégorie LMDh intégrera réellement l'IMSA WeatherTech SportsCar Championship. Peugeot rejoindra le WEC à l'horizon 2022, donc en 2023 nous verrons ces trois constructeurs majeurs de l'Endurance aux 24 Heures du Mans et ailleurs.

Porsche y pense également. La marque qui, comme Audi, appartient au groupe Volkswagen, n'a jamais caché son intérêt pour le LMDh, qui lui permettrait d'aligner la même monture en WEC et en IMSA. Porsche a déjà révélé que des études et une évaluation étaient en cours, affirmant que l'on pouvait s'attendre à avoir bientôt des nouvelles. L'idée de diviser les programmes sportifs des marques du groupe Volkswagen en fonction des disciplines peut être écartée. Ce n'est pas pour laisser la voie libre à Porsche qu'Audi va quitter la Formule E fin 2021 ; et Porsche ne va pas laisser de côté l'Endurance pour dégager le chemin à Audi.

Lors de son annonce cette semaine, Audi ne s'est pas particulièrement attardé sur les motifs justifiant son retrait de la Formule E pour privilégier un engagement sur le Dakar et en Endurance. Lorsque l'on a essayé de poser la question pour avoir des informations supplémentaires, la réponse a été : "Nous ferons de nouvelles annonces en temps voulu".

Porsche 2017 919 Hybrid

Non seulement Audi n'a pas précisé la date de son retour en Endurance, mais la marque n'a pas non plus donné de détails sur son approche. Y aura-t-il une équipe d'usine à part entière comme par le passé avec Joest ? Ou bien est-ce que le modèle adopté sera le même que pour son programme GT3, en vendant des voitures à des clients et en soutenant plus fortement les meilleurs d'entre eux sur les grandes épreuves ? D'après moi, il devrait s'agir d'un juste milieu entre ces deux solutions.

Dans son communiqué, Audi dit vouloir "franchir une nouvelle étape dans l'électrification du sport automobile" via son engagement sur le Dakar en 2022 avec un "prototype novateur", mais ne motive pas son retrait de la Formule E. Il semble que la discipline n'ait pas les faveurs du nouveau patron de la marque, Markus Duesmann, pour la simple raison que les voitures ne sont pas reconnaissables et ne le seront jamais tant que la FE et la FIA martèleront que la technologie est plus importante que l'apparence. C'est là que réside la beauté de la future réglementation en Endurance, telle qu'elle est définie pour l'avenir. Que ce soit en LMH ou en LMDh, les autos qui évolueront en WEC et en IMSA pourront ressembler à des voitures de série vendues par les constructeurs.

Toyota prépare son Hypercar pour la saison prochaine et les premiers essais ont eu lieu au mois d'octobre. Dans le même temps, la marque développe une nouvelle sportive pour la route, directement inspirée du concept GT Super Sport dévoilé en janvier 2018. Peugeot, pour sa part, a insisté sur le fait que la possibilité de jouer sur l'esthétique de l'Hypercar était un critère important. Quant au LMDh, il prolonge les principes mis en place avec la catégorie DPi de l'IMSA en 2017, avec des prototypes qui devraient toutefois être plus harmonieux, sans donner l'impression que des appendices stylistiques y ont été ajoutés.

Quand ils s'engagent en compétition, les constructeurs ont besoin de faire passer un message. Les grands noms du LMP1 ont utilisé la catégorie pour promouvoir leur savoir-faire technologique en matière d'hybride, mais à la télévision, il n'y a rien de mieux qu'une voiture de course qui ressemble à une voiture que les gens peuvent acheter. Sur ce sujet, nous avons probablement tous été aveugles, mais les coûts du LMP1 hybride sont rapidement devenus hors de contrôle. Les instances et les constructeurs l'ont certainement été aussi. N'oublions pas que nous parlions à un moment donné d'avoir des voitures équipées de trois systèmes hybrides, et d'un "kilomètre électrique" à parcourir après chaque arrêt au stand sans avoir recours au moteur à combustion.

Toyota Hypercar

Lorsque le WEC a vu le jour, personne ne pouvait prédire à quel point le monde changerait en si peu de temps. Nous n'avions qu'une vague idée de la direction prise vers l'électrification, mais certainement pas conscience du scandale qui allait exploser avec le Dieselgate autour de la marque Volkswagen, ni du COVID quelques années plus tard. Les annonces autour de la catégorie LMDh en janvier dernier étaient plus opportunes que ce que nous aurions jamais imaginé. Cela offre une perspective efficace en matière de coûts pour participer aux épreuves majeures de l'Endurance que sont les 24 Heures du Mans, les 24 Heures de Daytona et les 12 Heures de Sebring, qui plus est avec des autos qui reprennent l'identité d'une marque.

Audi a mordu à l'hameçon, et il ne fait aucun doute que d'autres suivront. Nous sommes quasiment sûrs de voir Porsche débarquer, et Honda/Acura a clairement l'intention de poursuivre son engagement en IMSA, même si cela doit encore être confirmé. Ferrari a joué un rôle majeur dans l'élaboration de la réglementation, faisant naître un espoir pour un engagement de sa part, ou d'une autre marque de Fiat Chrysler. Et il ne faut pas non plus oublier les aspirations de Glickenhaus et ByKolles, qui conçoivent des LMH en vue de l'année prochaine.

Si comme moi vous êtes passionné d'Endurance, vous serez enthousiasmé, peut-être même plus qu'il y a neuf ans. Nous sommes peut-être réellement à l'aube d'un nouvel âge d'or pour l'Endurance. Alors si je peux de nouveau utiliser cette machine à voyager dans le temps, je veux immédiatement rejoindre le mois de janvier 2023.

Audi LMP1

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