Découverte - Au cœur du travail électronique en LMP2

Dans les locaux d'Onroak Automotive situés au Mans, Motorsport.com a rencontré Lucas Berger, responsable du département électronique, qui planche actuellement sur la future Ligier JS P217.

#43 RGR Sport by Morand Ligier JSP2 - Nissan: Ricardo Gonzalez, Filipe Albuquerque, Bruno Senna

Photo de: Vision Sport Agency

À l’aube de l’entrée en vigueur d’une nouvelle règlementation, en 2017, le plateau du LMP2 en Endurance ne s’est probablement jamais aussi bien porté. Il suffit de se pencher sur le plateau des engagés en WEC comme en ELMS cette année pour s’en convaincre. Pour les dirigeants de l’ACO et du FIA WEC, c’est un pari en passe d’être réussi. Les quatre constructeurs sélectionnés - Onroak Automotive, ORECA, Riley/Multimatic et Dallara - se préparent à cette échéance, avec des modèles qui seront présentés en fin d’année, conformément au plan de marche établi par la FIA, l’ACO et l’IMSA.

On sait que chaque constructeur a des critères techniques imposés pour la conception de son prototype LMP2 2017, tandis que les équipes seront contraintes d’utiliser un moteur unique. Ce dernier sera fourni par Gibson Technology, couplé à des boîtiers électroniques fabriqués par Cosworth. Il n’empêche que la part d’électronique sur laquelle peuvent agir chacun des quatre constructeurs reste majeure. C’est ce qu’a pu constater Motorsport.com en rendant visite à Lucas Berger, responsable du département électronique sur le site manceau d’Onroak Automotive. Rencontre. 

 

Pour commencer, comment peut-on définir votre champ d’intervention et la part d’implication de l’électronique dans un prototype LMP2 ? 

"Notre part va vraiment du phare et de la pompe à essence - c’est-à-dire le fonctionnement basique de la voiture - au capteur de l’accéléromètre ou à un capteur un peu plus poussé qui va vraiment jouer sur la performance de la voiture. Il y a l’électronique mais il y a aussi tout ce qui est électrique avec la partie puissance : le démarreur, l’alternateur, etc. Il n’y a que la partie moteur qui n’est pas faite ici [au Mans] car on est dépendants d’un motoriste, qui nous fournit un moteur avec un calculateur moteur, ses propres capteurs, et il faut qu’on brode autour de ça."

"Sur la [future] JS P217, c’est un peu différent car tous les boitiers électroniques sont imposés par la FIA et l’ACO. C’est-à-dire que le client va acheter une voiture sans moteur ni électronique, et en parallèle, il ira acheter tout le package avec tous les boitiers principaux directement chez Cosworth. De notre côté, on aura conçu la voiture pour accueillir tous ces boîtiers et faire en sorte qu’elle fonctionne. On a donc un cahier des charges plus précis, où tous les boîtiers sont imposés, et c’est à nous de faire le nécessaire pour que tous les boîtiers communiquent entre eux, pour dessiner les faisceaux, concevoir dans la voiture à quel endroit passe le faisceau, avec quelle longueur, quels connecteurs, etc." 

Est-ce que cela signifie qu’il y a plus ou moins de travail par rapport à la voiture précédente ? 

"On pourrait penser, au premier abord, que c’est moins de travail, car la phase de pré-étude est faite par la FIA et l’ACO qui nous imposent tous les boîtiers électroniques. Jusqu’à présent, on choisissait des boîtiers en fonction de nos objectifs et de notre philosophie de voiture ; là on nous impose une base de travail, et c'est à nous d'en tirer le meilleur parti. Le boulot est donc différent."

 

Lucas Berger, responsable du département électronique d'Onroak Automotive
Lucas Berger, responsable du département électronique d'Onroak Automotive

Photo de: Onroak Automotive

 

Malgré ce qui est imposé par les instances, est-ce qu’il y a encore de la place pour créer des différences avec les trois autres constructeurs dans un domaine comme celui-ci ? 

"Moins, forcément. Le volant par exemple est imposé, on aura tous le même. Après ce sera à nous d’affecter tel bouton à telle action plutôt qu’à une autre. On va faire le sticker qui va aller dessus, le côté design du volant. Mais c’est sûr que visuellement et techniquement ce sera compliqué de se différencier. Il y aura toujours des moyens de le faire, car on a quand même une certaine liberté ; on a un boîtier de base, eux vont se réserver des fonctions par rapport à l’utilisation moteur, après c’est à nous de gérer au mieux la liberté qu'il nous reste. Mais c’est sûr qu’elle sera moindre que jusqu’à présent."

Quelles sont les zones, sur le plan électronique, où il y a de la performance et de la fiabilité à aller chercher ? 

"Ce qui est un peu compliqué, c’est de réussir à faire un bon ratio entre le prix, la fiabilité et la performance, sachant qu’au final tout va un peu impacter la performance à un moment donné : certaines pièces plus que d’autres, mais par exemple un alternateur avec un bon rendement va moins prendre d’énergie au moteur, donc ce sera forcément plus de puissance qui sera disponible aux roues ; les phares vont être plus ou moins performants ou puissants. Ce ne sera pas forcément de la performance directe mais ça va amener du confort au pilote, qui indirectement va amener de la performance. Il faut réussir à faire l’équilibre entre tout ça. Après il y a des pièces comme le démarreur, qui ne va pas être un gain de performance pure ; par contre un problème de démarreur ou de fiabilité peut rapidement engendrer de très grosses contre-performances."

Revenons-en au projet de la JS P217, à quel moment vous entrez en jeu dans le processus de conception de la voiture et quelle est votre place aux côtés du bureau d’étude ? 

"Je fonctionne un peu en parallèle, dans le sens où eux conçoivent la partie aéro/mécanique mais connaissent quand même les critères électriques et électroniques d’une voiture. Après, à moi de mon côté d’essayer de voir par rapport au règlement et aux différents boîtiers ce qui est faisable, puis d’aller faire le lien avec eux : leur dire "Attention, quand vous travaillez dans cette zone de la voiture, moi j’aimerais faire ça". Ce sont des choix que l’on fait en commun, qu’on décide en réunion, mais c’est à moi d’aller aussi voir avec eux à quel moment je vais avoir besoin d’eux pour intégrer l’électronique, et inversement, eux viennent me voir. C’est du travail en parallèle, aussi parce que les informations n’arrivent pas en même temps : on a des deadlines différentes,  eux par exemple doivent avancer rapidement par rapport à l’aéro car les pièces de carrosserie sont les plus longues à fabriquer, mais par contre je suis encore incapable de dire où je vais placer mon faisceau tant que le concept final de la voiture n'est pas abouti." 

 

Ingénieurs Onroak Automotive - Ligier JS P2
Ingénieurs Onroak Automotive - Ligier JS P2

Photo de: DPPI

 

Malgré ce travail parallèle, est-ce que le travail du bureau d’étude et de la partie électronique ont démarré en même temps pour la JS P217 ? 

"Oui, pratiquement. Dès le début on a différentes choses à tester, dans le sens où eux vont essayer plusieurs configurations aéro, soit en CFD soit en soufflerie, et moi de mon côté je vais tester plusieurs phares différents, plusieurs types de capteurs, etc... On avance sur des domaines différents, mais dans le même ordre. Parce qu’on a des échelons qui sont imposés par l’ACO et la FIA, on est sensé avancer à un rythme à peu près défini. On est sur des sujets différents mais au final tout doit être prêt à temps pour mettre la voiture sur la piste ! "

Combien de personnes sont impliquées sur l’électronique ? 

"Nous sommes deux, David Le Cleac'h m'a rejoint en début d'année. Pour les anciennes voitures on arrivait encore un peu en interne à assurer une partie de la production des pièces, ce qui devient de plus en plus compliquée car les projets s’enchaînent et il y a de plus en plus de voitures, donc on sous-traite de plus en plus. On ne fait plus que de l’étude, un peu de fabrication pour la partie développement et de l'assistance aux clients. Aussi nous avons l'aide des ingénieurs data de la partie exploitation, qui vont nous aider sur tout ce qui est configuration, toute la partie logiciel."

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