Avant Hamilton, une courte histoire des Britanniques chez Ferrari
Lewis Hamilton sera le 11e Britannique à piloter pour la Scuderia Ferrari en Formule 1. Retour sur les histoires de ses prédécesseurs, dont deux ont été Champions en rouge.
Rétro : Dans l'Histoire des sports méca
Sur deux ou quatre roues, replongez-vous dans l'Histoire des sports mécaniques, celle qui a écrit la légende des hommes et des machines durant des décennies.
Mike Hawthorn, le pionnier (1953-1958)
Champion en 1958 - 35 départs avec Ferrari, 3 victoires, 4 poles et 16 podiums
Après avoir tapé dans l'œil d'Enzo Ferrari à seulement 23 ans, Mike Hawthorn fut engagé par la Scuderia Ferrari dès 1953. Le Britannique, toujours équipé de son emblématique nœud papillon, remporta lors de sa première saison en rouge une victoire de prestige, à savoir le Grand Prix de France à Reims, souvent qualifiée de "course du siècle" en raison de l'affrontement entre les armadas Ferrari et Maserati. En 1954, il ajoute le GP d'Espagne à son palmarès, et une troisième place finale chez les pilotes.
L'année 1955 allait à la fois être celle du drame des 24 Heures du Mans, duquel il fut un acteur majeur, mais aussi de la fin de sa première collaboration avec Ferrari. Il retrouva le Commandatore en 1957, après 18 mois compliqués sportivement, terminant quatrième du classement. En 1958, malgré une seule victoire à Reims, malgré des démêlés avec Enzo Ferrari, malgré la perte de son ami et équipier Peter Collins et malgré les quatre succès de Stirling Moss sur sa Vanwall, Hawthorn parviendra à conquérir le titre mondial d'un petit point, devenant le premier Britannique titré en Formule 1 et le dernier sur une voiture à moteur avant, la D246.
Il prit ensuite sa retraite, à seulement 29 ans, mais n'en profita pas longtemps puisqu'il se tua dans un accident de la route le 22 janvier 1959.
Peter Collins, l'ironique destin (1956-1958)
Troisième en 1956 - 20 départs avec Ferrari, 3 victoires et 9 podiums
Sa victoire sur la Targa Florio 1955 avec Stirling Moss sur Mercedes allait ouvrir grand les portes de Ferrari à Peter Collins. Pour sa première saison en rouge, en 1956, il se montra particulièrement prometteur et signa la victoire en Belgique et en France. Vint alors l'ultime manche cette campagne à Monza, où le Britannique allait faire un immense sacrifice. Au 31e tour de l'épreuve, l'abandon de son équipier Juan Manuel Fangio combiné à sa seconde place derrière Moss le plaçaient en Champion du monde virtuel. Pourtant, lors de son arrêt au stand quelques tours plus tard, sans que cela lui soit demandé, il allait laisser sa voiture à l'Argentin, comme cela était permis à l'époque.
"J'ai presque pleuré devant ce geste", déclara Fangio dans un entretien pour Autosport en 1979, finalement sacré après avoir fini second. Pour expliquer son action, Collins déclara ensuite avoir craint qu'en étant champion aussi jeune, il devienne instantanément une célébrité avec les exigences et la pression liées à cela : "Je n'ai que 25 ans et j'ai tout le temps de gagner le championnat par mes propres moyens", avait-il conclu.
L'année suivante, il allait être rejoint par Mike Hawthorn, de retour à Maranello, avec qui il allait très vite bien s'entendre. Il fallut toutefois attendre 1958 pour retrouver une voiture compétitive et cette année-là, les relations jusqu'ici quasi filiales avec Enzo Ferrari se dégradèrent : non seulement le Commandatore lui reprocha un style de vie dissolu, mais en plus Collins abîma volontairement un embrayage lors des 24 Heures du Mans. Il fut viré dans la foulée.
Hawthorn allait alors menacer à deux reprises de ne pas courir pour contraindre Ferrari à réengager Collins, avant et après le GP de France. La mort de leur équipier Luigi Musso à Reims le sécurisa, et il s'offrit même la victoire au terme de ce qui est considéré comme sa plus grande course, lors du GP de Grande-Bretagne. Mais le destin allait finalement rattraper Collins, qui allait se tuer lors de la course du GP d'Allemagne 1958, sur le Nürburgring, à seulement 26 ans.
Tony Brooks, le discret (1959)
Vice-Champion en 1959 - 7 départs avec Ferrari, 2 victoires, 2 poles et 4 podiums
(Ici à gauche, à côté de Stirling Moss)
Pilote tout aussi discret que talentueux, Tony Brooks termina troisième du championnat en 1958 au volant des Vanwall de l'équipe Vandervell. Toutefois, la santé déclinante de Tony Vandervell le contraint à devoir trouver refuge ailleurs pour 1959. Ferrari, qui a vu trois de ses pilotes mourir ou partir à la retraite, l'engagea alors.
Le Britannique ne fera qu'une seule saison sous les couleurs de la Scuderia mais en démontrant malgré tout toute sa classe, notamment en signant la pole puis la victoire en France et en Allemagne. Ferrari n'engageant pas de voiture à Aintree pour le GP de Grande-Bretagne, il concourut sur une Vanwall inscrite par Vandervell. Lors de l'ultime Grand Prix, à Sebring, il pouvait encore devenir champion, toutefois sa troisième place ne fut pas suffisante pour empêcher le sacre de Jack Brabham, qui poussa ce jour-là sa voiture en panne d'essence sur la ligne d'arrivée pour terminer quatrième
Cliff Allison, le méconnu (1959-1960)
Douzième en 1960 - 6 départs avec Ferrari et 1 podium
Cliff Allison n'était pas richement doté et avait gravi les échelons aux forceps. Après une première saison en F1 pour le compte de Lotus en 1958, il est remarqué puis recruté par Ferrari pour 1959. Il brille surtout en Endurance, ses apparitions sporadiques dans le Championnat du monde de Formule 1 cette année-là n'étant pas couronnées d'un grand succès.
En revanche, l'entame de saison 1960 est prometteuse, puisqu'il signe la seconde place du GP d'Argentine qui ouvre la saison, derrière Bruce McLaren. Malheureusement pour lui, quelques mois plus tard, il connaît un grave accident lors des essais du GP de Monaco, seconde épreuve de l'année. Éjecté de sa voiture, il sombrera dans le coma et se réveillera 16 jours plus tard à l'hôpital, en parlant français, une langue pourtant jamais apprise.
Blessé au visage et au bras, il resta sur la touche pendant une année avant de tenter un retour sur une Lotus privée. Mais lors de sa deuxième course, le GP de Belgique 1961, un grave accident à Blanchimont lui brisa les deux jambes. Il décida de mettre un terme à sa carrière.
John Surtees, le polyvalent (1963-1966)
Champion en 1964 - 30 départs avec Ferrari, 4 victoires, 4 poles et 13 podiums
Un Britannique avec sept titres mondiaux qui débarque chez Ferrari ? Ça s'est déjà vu, à la différence que pour John Surtees, ces sacres avaient eu lieu en Championnat du monde moto entre 1956 et 1960. Après plusieurs saisons d'apprentissage de la F1, des qualités déjà claires et un caractère on ne peut plus affirmé, Surtees fit le grand saut vers la Scuderia en 1963. Sa première saison est d'emblée marquée par un succès de prestige avec la victoire sur le redoutable Nürburgring.
La saison 1964 est celle où Surtees va entrer dans l'histoire comme le seul Champion du monde F1 et moto. Armé d'une Ferrari 158 capable de rivaliser avec les Lotus et BRM, il signe deux victoires et se présente en second du classement lors de la finale de Mexico. Là, la chance va lui sourire : d'abord parce que le leader du championnat, Graham Hill, voit sa voiture être endommagée dans un accrochage avec Lorenzo Bandini (pilote Ferrari) et ensuite parce qu'à deux tours de la fin d'une course qu'il menait depuis le départ, Jim Clark allait être victime d'une fuite d'huile. Il faut un ultime coup de pouce de Bandini, qui le laissa passer dans le dernier tour, pour qu'il assure cette couronne mondiale.
En 1965, il n'y a pas grand-chose à faire contre Lotus et Clark mais c'est un tournant pour Surtees qui s'accidente gravement lors d'un test en Endurance à Mosport. En dépit d'importantes blessures, il est bien au rendez-vous pour entamer la saison 1966 et l'emporte même à Spa. En interne, toutefois, la relation est délétère avec le manager Eugenio Dragoni et les 24 Heures du Mans vont sceller le sort de leur relation. Si les circonstances ne sont pas connues avec exactitude tant des versions contradictoires ont été racontées, c'est en tout cas à ce moment-là que Surtees ne s'estimant pas assez soutenu par Enzo Ferrari, décida de partir. Il s'engagea pour Cooper pour la suite de la saison.
Mike Parkes, l'ingénieur (1966-1967)
Huitième en 1966 - 6 départs avec Ferrari, 1 pole et 2 podiums
Mikes Parkes prit son premier départ en Grand Prix à 34 ans seulement, mais pas sans s'être taillé une belle réputation. Le gros de son palmarès sportif avait déjà été constitué avec Ferrari, mais en Endurance. Surtout, il était un ingénieur reconnu et il était notamment à cette époque pilote d'essais et de développement des F1 de la Scuderia. Ses qualités de metteur au point en faisaient un atout mais son désir de prouver sa valeur comme pilote dans le Championnat du monde était plus fort que jamais, ce qu'il ne cachait pas.
Lorsque Surtees quitta le navire au beau milieu de la saison 1966, reprochant d'ailleurs à Parkes de s'être allié à Dragoni dans leur opposition pour assouvir sa propre ambition, l'ingénieur devint un intérimaire de luxe. En dépit d'un châssis modifié pour l'accommoder à sa grande taille, il signa une belle deuxième place en France, performance qu'il réitéra plus tard dans la saison à Monza.
Mais pour le directeur technique de l'époque, Mauro Forghieri, qui était aussi son ami, les 1m93 de Parkes le rendaient trop lourd pour la F1. L'année suivante, il démarra donc comme essayeur avant d'être à nouveau rappelé, cette fois après la mort de Lorenzo Bandini à Monaco. Lors du GP de Belgique, il se blessa grièvement à la tête, avec à la clé un coma d'une semaine, et aux jambes. Il reprit son travail de technicien en 1969 chez Ferrari, mais Enzo refusa de le laisser reprendre la course, le jugeant trop précieux en tant qu'ingénieur. Parkes décida de rompre les liens pour continuer sa passion, en Endurance notamment.
Nigel Mansell, le Lion (1989-1990)
Quatrième en 1989 - 31 départs avec Ferrari, 3 victoires, 3 poles et 11 podiums
Dernier pilote recruté du vivant d'Enzo Ferrari, en août 1988, Nigel Mansell arrive chez Ferrari en 1989 à l'âge de 35 ans et avec déjà neuf saisons de F1 derrière lui. C'est un moment où la Scuderia ne parvient pas à se mettre au niveau des dominations Williams et McLaren.
Les débuts sont rêvés puisque Mansell gagne d'entrée au Brésil et conquiert vite le cœur des fans, qui le surnomment "il leone" (le lion) pour son style de pilotage. Le début de saison sera toutefois grandement marqué par d'importants problèmes de fiabilité liés à la révolutionnaire boîte de vitesse semi-automatique introduite par John Barnard sur la Ferrair 640.
Après un été particulièrement réussi, avec cinq podiums en autant de courses, dont une victoire superbe depuis la 12e place en Hongrie, la fin de saison sera marquée par un de ces "débranchements du cerveau" dont il était coutumier. Après une marche arrière dans les stands, strictement interdite, il reçoit un drapeau noir de la direction de course au Portugal, synonyme d'exclusion de la course. Non seulement il n'obtempère pas (il prétextera ne pas avoir vu le drapeau), mais en plus il s'accroche avec Ayrton Senna, en lutte pour le titre. Il sera suspendu lors du GP suivant.
En 1990, il est d'emblée confronté à un problème de taille : Alain Prost, qui vient d'être sacré, rejoint Ferrari. Le Français devient vite le leader incontesté de l'équipe, tant sur le plan sportif que technique, et séduit en interne. Sportivement, Mansell vit une saison difficile, notamment en termes de fiabilité, alors que Prost remet la Scuderia dans la lutte pour le titre.
Vu la tournure que prennent les choses, le Britannique décide d'arrêter la F1 en fin de saison. Il parviendra tout de même à sauver l'honneur en l'emportant au Portugal, dans un moment où les relations avec Prost sont plus tendues que jamais. Il quitte Maranello en fin de saison, mais reviendra sur sa décision et trouvera refuge chez Williams en 1991, avant d'y être sacré en 1992.
Eddie Irvine, le second rôle (1996-1999)
Vice-champion en 1999 - 65 départs avec Ferrari, 4 victoires et 23 podiums
Recruté par Ferrari pour la saison 1996, le Nord-Irlandais est aligné aux côtés de Michael Schumacher, double Champion du monde en titre. D'emblée, il sait qu'il est attendu dans un rôle de second pilote. Ses premières saisons ne sont pas particulièrement brillantes, au point que son poste est remis en question dès 1997 ; il est malgré tout reconduit pour l'année suivante. Il montre quelques signes de progrès mais demeure loin des performances de Schumacher, clôturant la saison 1998 en quatrième place chez les pilotes.
La chance d'une vie arrive en 1999, dans un contexte de tensions internes avec Jean Todt. Lors de la manche d'ouverture, il signe son tout premier succès en F1 et mène donc pour la première fois le classement pilotes. Le tournant de sa saison arrive en Grande-Bretagne quand Schumacher, qui le devançait de six points au championnat, s'accidente en raison d'un problème de frein et se fracture la jambe droite. Irvine devient alors, de fait, le leader de l'équipe.
Les Ferrari pilotées par Michael Schumacher
Dès le GP qui suit Silverstone, en Autriche, Irvine l'emporte. Et lors de l'épreuve suivante, en Allemagne, le remplaçant de Schumacher, Mika Salo, s'efface pour lui laisser la victoire. Irvine retrouve les commandes du championnat. Le mano à mano avec Mika Häkkinen est bien engagé. C'est dans ce contexte qu'en septembre, il est annoncé qu'Irvine sera pilote Jaguar la saison suivante.
Schumacher revient de blessure lors du GP de Malaisie où, après avoir démontré sa supériorité, il va offrir sur un plateau la victoire à Irvine. Leader du championnat à la veille de l'épreuve finale de Suzuka, Irvine va finalement s'incliner en ne terminant que troisième de l'épreuve, remportée par Häkkinen. Pour deux points, il échoue dans sa quête d'un sacre improbable. Sa seule chance était passée.
Et les autres Britanniques chez Ferrari ?
Jonathan Williams
Derek Bell, Ferrari, et son épouse Pam
Signalons aussi que Jonathan Williams, recruté par Ferrari en 1967 pour courir en F2 et en Can-Am, après avoir impressionné en F3 l'année précédente, a disputé une course avec la Scuderia, lors du GP de Mexico 1967, terminant huitième après être parti 16e. Il quittera l'écurie peu après.
Quant à Derek Bell, il fut recruté en 1967 après avoir lui aussi tapé dans l'oeil d'Enzo Ferrari en F2. engagé dans ce championnat en priorité mais également sur quelques courses d'Endurance, il prit le départ de deux GP en 1968, en abandonnant à chaque fois. Sa carrière s'est ensuite surtout tournée vers l'Endurance, où son palmarès s'est notamment garni de cinq victoires aux 24 Heures du Mans.
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