Fernando Alonso, la quête incessante du respect
Fernando Alonso se bat toujours aussi intensément en Formule 1, alors qu’il dispute en 2024 sa 21e saison complète dans la discipline.
Photo de: Steve Etherington / Motorsport Images
Il lui a fallu un passage par le Championnat du monde d’Endurance − où il a remporté le titre mondial et les 24 Heures du Mans −, l’IndyCar ou encore le Dakar pour continuer, à 40 ans passés, à toujours autant apprécier la Formule 1, dans laquelle il s’investit inlassablement. Fernando Alonso est encore bien là, engagé et demandeur du meilleur auprès des gens avec qui il travaille comme au premier jour, comme si le reste de sa carrière en dépendait. Toujours affamé, le pilote espagnol a conscience du catalyseur qu’il peut être et de la portée de ses propos lorsqu’il s’adresse à la presse ou directement à ses interlocuteurs du paddock ou de son équipe.
Après tout ce temps au plus haut niveau, Alonso n’a pas le palmarès d’autres pilotes arrivés après lui, comme Lewis Hamilton, Max Verstappen ou Sebastian Vettel, et certains "seconds" se sont forgé, pendant ce qui auraient pu être ses propres années de pic sportif, des palmarès statistiques intéressants en roulant avec les forces dominatrices qu’ont été Red Bull et Mercedes. Pas forcément en nombre de succès, mais en taux de victoires et de podiums par GP disputés.
Le temps passe, et Alonso demeure le septième pilote le plus victorieux de l’Histoire de la F1 avec ses 32 succès − un compteur qui demeure cependant bloqué depuis le GP d’Espagne 2013, il y a maintenant plus de dix ans. Même si celui des podiums a repris avec Aston Martin l’an dernier, la première marche continue à se refuser à lui. Alors que Lewis Hamilton et Max Verstappen ont remporté en moyenne une course sur trois à laquelle ils ont participé, la statistique d’Alonso affiche 8%, plus proche donc de celle d’une autre icone de la discipline ayant fait de vieux os qu’est Kimi Räikkönen.
Photo de groupe des rookies de la saison 2001 : Kimi Räikkönen, Juan Pablo Montoya, Fernando Alonso et Enrique Bernoldi
Au sens strict, Fernando Alonso, avec ses deux couronnes mondiales, aimerait certainement faire partie de cette catégorie des dix plus grands, dans laquelle l’on place communément Lewis Hamilton, Michael Schumacher, Max Verstappen, Alain Prost, Ayrton Senna, Jackie Stewart, Jim Clark, Stirling Moss, Alberto Ascari et bien entendu Juan Manuel Fangio.
Il est passé à quelques points de pouvoir compter cinq trophées pilotes dans son musée personnel. Mais sans doute la légende de l’Espagnol repose-t-elle finalement de plus en plus sur son statut historique dans la F1 contemporaine, ainsi que sur son caractère, sa vista et cette détermination sans faille, montrée à tous les moments de sa carrière, pour le meilleur et pour le pire. Une forme de racer pur, qui vit sa passion et se différencie d’une jeune génération plus formatée.
"En 2018, quand j'ai arrêté, j'ai senti que c'était tout simplement trop prévisible, la domination de Mercedes était trop importante pour vraiment apprécier de faire partie de la grille. Nous n'étions que des acteurs dans le film de Mercedes, incapables de nous battre à aucun moment", explique-t-il dans une interview accordée au Financial Times.
"Je pense que, 20 ans plus tard, certains de [mes] objectifs ont été atteints avec les championnats. Je peux encore réaliser de bonnes choses lorsque j'ai le bon équipement. Même lorsque la voiture n'est pas à 100%, ils doivent toujours garder un œil sur moi. Je serai toujours un battant. Je n'ai pas changé d'approche", estime Alonso.
"Je ressens toujours la même chose", poursuit-il, lorsqu’il lui est demandé s’il se retrouve dans les propos qu’il avait à ses 20 ans, lorsqu’il disait vouloir laisser une marque dans le sport. "Aujourd'hui, j'espère que lorsque vous rencontrez un pilote, il a ce respect, sachant que vous étiez un grand compétiteur et quelqu'un qui n'abandonne pas."
Une icône mais pas une pièce de musée
Fernando Alonso est à n’en pas douter une icône. Il a connu nombre de types de motorisations de F1 moderne, nombre de formats de qualifications, de barèmes de points ; il est de ces pilotes ayant pu apprécier la F1 aux fournisseurs pneumatiques différents et aux arrêts ravitaillements en carburant, aux marques de cigarettes sur les pontons, et régie par l’ancien grand manitou du sport, Bernie Ecclestone, et le puissant "Piranha Club", ces directeurs d’équipes emblématiques dont ne restent que quelques rares éminences dans le paddock. Il prendra cette saison le départ de son 400e Grand Prix, et il se sent toujours autant à sa place une fois dans le baquet.
"L'intérieur de la voiture n'a pas beaucoup changé ; quand je ferme la visière, c'est exactement la même chose qu'il y a 20 ans", décrit-il. "J'apprécie un peu plus tout ce qui se passe en dehors de la voiture, le contact avec les fans. Même les événements organisés par les sponsors, que je n'aimais pas avant, me donnaient l'impression d'être une distraction. Maintenant, je les apprécie un peu plus. J'ai l'impression que cela fait partie du travail."
Fernando Alonso a accroché les 24 Heures du Mans à son palmarès.
Quant au fait de ne pas toujours évoluer dans la voiture lui permettant de gagner, ce qui a finalement plus été la réalité de sa carrière en F1, il est modéré par le fait que son statut d’icône lui a justement permis d’obtenir immédiatement les meilleures conditions pour remporter par deux fois les 24 Heures du Mans avec Toyota, en Endurance.
"Cela fait partie du sport. Je l'ai appris tout au long de ma carrière. Au début, il était difficile de faire face, de se sentir motivé après une chose qui vous arrivait, ou un échec. Vous aviez l'impression que ce n'était pas juste, que ce n'était pas équitable. Mais à la fin, vous comprenez que cela fait partie du jeu, du sport ; la NBA, le football, c'est la même chose. J'ai appris cela avec le temps."
"J'avais d'autres défis en tête avec Le Mans et des choses plus attrayantes. Je suis donc parti. Mais en 2021, après avoir remporté le Championnat du monde d'Endurance et le Mans, j'ai senti qu'il y avait un plus grand défi à relever : essayer de revenir en F1 et de réussir à nouveau."
Un défi que relève Alonso, qui se souhaite aussi mentor de Lance Stroll, le protégé d’Aston Martin. Le rêve du propriétaire de l'écurie, Lawrence Stroll, serait de faire gagner son fils, dont l'enthousiasme n'est pas connu pour être si communicatif.
"Il y a certainement des différences. Je pense que l'ancienne génération était un peu plus authentique", estime Alonso. "Ils étaient différents dans leur caractère, dans leur façon d'aborder la course et la vie. C'étaient des compétiteurs très durs. Aujourd'hui, je dirais qu'ils sont très talentueux − peut-être plus qu'avant grâce à toute la préparation, aux académies, au travail en simulateur, à la technologie et aux données dont ils disposent pour s'améliorer et apprendre rapidement. Ils arrivent en F1 mieux préparés."
"Mais en dehors de la piste ou sans le casque, ils sont peut-être un peu les mêmes et plus timides dans leur façon d'aborder les choses. Ils ont des gens qui parlent pour eux, pour la direction, pour les médias, pour la forme physique. Ils sont bien préparés, mais ils ont peut-être perdu un peu de leur personnalité."
VIDÉO - Les victoires de Fernando Alonso
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