Opinion

Pourquoi le GP d'Australie va définir la course au titre en MotoGP

Le week-end de Phillip Island permettra de voir si Jorge Martín est capable de rebondir après sa chute en Indonésie et si Pecco Bagnaia s'est relancé pour de bon. Le week-end australien donnera ainsi le ton de la fin de saison.

Jorge Martin, Pramac Racing, Francesco Bagnaia, Ducati Team

Alors qu'il reste cinq courses à disputer en l'espace de six semaines, la lutte pour le titre mondial tourne à un duel entre Pecco Bagnaia et Jorge MartínMarco Bezzecchi est toujours mathématiquement dans la course mais il accuse un retard de 63 points sur le leader après le GP d'Indonésie.

Le bras de fer entre Bagnaia, représentant de l'équipe officielle, et Martín, qui dispose de la même machine chez Pramac, a changé de dimension ces derniers jours. Alors qu'ils évitaient de se mentionner mutuellement, les choses ont changé à Mandalika, et avant le début du week-end, Martín n'a plus caché sa volonté de prendre la tête du championnat.

"Si je peux partir d'ici leader, j'essaierai, je pense que le moment est venu", déclarait-il jeudi, amorçant ce qui allait se passer le samedi. La dynamique en faveur de l'Espagnol l'a vu grignoter peu à peu un retard de 63 points sur Bagnaia au soir de la course sprint du GP de Catalogne, et tout penchait de son côté en début de week-end en Indonésie, notamment quand le Champion en titre n'a pas réussi à se qualifier pour la Q2 vendredi.

Commençait-il à ressentir la pression ? "Seul Pecco le sait", commentait alors Martín, avant d'ajouter : "Ce qui est clair, c'est que ne pas sortir de la Q1 est une erreur." Vendredi soir, Bagnaia affichait une confiance qui allait devenir prémonitoire. "À Jerez, j'étais allé en Q1 et on avait gagné la course le lendemain"soulignait-il"Donc ça ne me fait pas peur, je ne suis pas inquiet. Je sais que le problème que l'on doit régler du côté de l'électronique est plus facile à résoudre."

Samedi matin, Bagnaia n'a pourtant pas réussi à s'extirper de la Q1 et il n'était que 13e sur la grille de départ. Toujours loin de s'inquiéter, il a mené un sprint prudent, conclu à la huitième place et à 5"465 d'un Martín dominateur, qui a pris la tête du championnat pour huit points. Dimanche, la balance a penché du côté de Bagnaia quand il a négocié à la perfection une situation très délicate, sur un circuit très glissant et avec une température de piste qui a dépassé les 60°C : sur les 21 pilotes au départ, ils ne sont que 14 à avoir vu l'arrivée.

Jorge Martin, Pramac Racing

Après avoir dominé le sprint, Jorge Martín est parti à la faute dimanche

Martín a pris un départ spectaculaire qui l'a vu passer immédiatement de la sixième place à la première, mais l'entame de course de Bagnaia a été encore plus impressionnante, puisqu'il a transformé sa 13e place sur la grille en sixième position une boucle plus tard. L'accrochage entre Brad Binder et Luca Marini au deuxième tour lui a permis de remonter au quatrième rang et dès le troisième tour, il a dépassé Fabio Quartararo pour le gain de la troisième place.

Après ce début de course très efficace, Bagnaia a limité sa prise de risques. Martín a fait totalement l'inverse, avec une chute à mi-course alors qu'il menait les débats et comptait près de trois secondes d'avance sur Maverick Viñales. Au 20e tour, ce dernier a été doublé par Bagnaia, qui s'est offert son premier succès depuis près de deux mois.

Bagnaia a répondu à ceux qui doutaient de lui

Cette victoire a redonné à Bagnaia la tête du championnat... et un avantage psychologique à un moment clé du championnat. "Souvent, les gens parlent trop et trop tôt", a-t-il commenté. "Il vaut mieux attendre de voir les résultats et parler ensuite. Je préfère ça."

Après la course sprint, plusieurs pilotes semblaient en effet pencher du côté de Martín. Marc Márquez a précisé qu'il "parierai[t] sur Jorge", voyant plusieurs signaux favorables à son compatriote : "Il n'a pas de pression. Il est sur une moto d'usine mais pas dans l'équipe d'usine. Il ne défend pas le titre."

"S'il gagne le championnat, c'est extraordinaire. S'il termine deuxième, ça ira parce que ce qui serait normal, ce serait que Pecco gagne. À l'heure actuelle, Pecco souffre de défendre son titre, car c'est parfois plus difficile de défendre un titre que d'en gagner un."

"De l'extérieur, je vois Martín vraiment en grande forme", ajoutait Luca Marini, clairement sur la même ligne : "Il me semble imbattable en ce moment. À mon avis, la seule façon pour Pecco de revenir devant et de démontrer qu'il est le numéro 1, c'est de le battre dans un corps-à-corps en course."

Francesco Bagnaia, Ducati Team

Pecco Bagnaia a répondu aux critiques en s'imposant en Indonésie

Toujours aussi serein après avoir gagné le dimanche, Bagnaia s'est étonné de ces commentaires : "Je suis surpris parce que cela vient de pilotes, pas de journalistes, et ils savent à quelle vitesse les choses peuvent changer."

La dynamique était pourtant défavorable au Turinois avant la journée de dimanche. De Barcelone à Motegi, Bagnaia a inscrit 68 points, soit 59 de moins que les 126 de Martín. Même Bezzecchi a fait mieux, avec 82 unités engrangées. La tendance a changé dimanche à Mandalika, Bagnaia ayant repris un avantage de 18 points grâce à sa victoire.

Un jeu d'échecs commence

La lutte devrait durer jusqu'à la finale du championnat à Valence en novembre. La prochaine manche sera la première des cinq étapes encore au programme, avec seulement un week-end de repos jusqu'à la fin de la saison. Ce sera une première occasion pour Martín de prouver qu'en plus de la vitesse pure, il a aussi le mental pour riposter comme son rival a su le faire. Son entourage n'en a aucun doute.

"Jorge a enchaîné 14 courses sans faire la moindre erreur, en reprenant beaucoup de points à Pecco, qu'il a doublé au championnat samedi", a déclaré Gino Borsoi, team manager de l'équipe Pramac, à Motorsport.com, souhaitant minimiser la chute de dimanche : "Après une telle série, une erreur allait forcément arriver, c'est statistique."

"Il sera agacé jusqu'à la première séance en Australie, mais il va l'oublier. Ce qui est évident, c'est qu'il n'a à se rattraper de rien en particulier parce que tout fonctionne pour lui. On part [d'Indonésie] avec l'esprit clair et la sensation qu'à ce stade de la saison, Jorge est le plus fort." Pour l'ancien pilote, le souvenir de Mandalika sera plus bénéfique pour Bagnaia que néfaste pour Martín : "C'est sûrement un tournant pour Pecco, qui a gagné dans un week-end difficile."

Jorge Martin, Pramac Racing, Francesco Bagnaia, Ducati Team

Pecco Bagnaia et Jorge Martín ne se sont plus directement affrontés en piste depuis le GP d'Allemagne

Si Borsoi dit vrai, le duel entre les meilleures versions de Martín et Bagnaia commencera vendredi à Phillip Island, ce qui serait le meilleur scénario pour évaluer l'influence de ce qu'il s'est passé en Indonésie et donnerait le ton pour la fin de la saison. Selon Marini, la différence entre les deux pilotes, qui ont rarement été directement confrontés en piste ces derniers mois, pourrait se faire par la capacité à sauver de gros points dans les moments difficiles.

"À mon avis, il ne faut pas enregistrer de scores vierges. Le problème est qu'aujourd'hui le niveau est tellement élevé que si ça tourne mal pour vous, vous n'arrivez plus à faire cinquième ou quatrième comme c'était le cas il y a six ou sept ans. Aujourd'hui, quand ça tourne mal on fait 12e. Malheureusement, c'est devenu très difficile. Mais il vaut encore mieux faire 12e que zéro point."

"Donc à mon avis, dans un championnat qui a un niveau aussi élevé, il faut parfois savoir se contenter [d'un résultat] et, malheureusement, laisser peut-être une victoire à un adversaire direct pour être premier à la fin de l'année. Un peu comme aux échecs. Il faut penser à ces choses-là pendant la course."

Avec Léna Buffa

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