Márquez veut bannir le holeshot device : "Ça n'a pas de sens"

Le variateur de hauteur n'a aucun intérêt pour le spectacle selon Marc Márquez, favorable à une interdiction du système. Fabio Quartararo et Joan Mir appuient le #93 mais le clan Ducati défend le dispositif.

Marc Marquez, Repsol Honda Team

Marc Márquez célèbre ses dix ans en MotoGP, une catégorie dont le développement technique l'inquiète de plus en plus. L'Espagnol a été le témoin de l'évolution des machines au cours de la dernière décennie, entre technologies de plus en plus abouties et avènement de l'aérodynamique, devenu un élément fondamental de la performance. Selon Márquez, les gains en appui ont amélioré la stabilité mais compliqué les dépassements puisque les ailerons ont augmenté la sensibilité des motos aux turbulences, privant selon lui le public de beaux duels en piste.

"Quand je suis arrivé, sans les ailerons, franchement c’était mieux pour le show", a déclaré le pilote Repsol Honda en conférence de presse à Losail. "On pouvait plus facilement dépasser, on sentait plus l'aspiration, si on suivait quelqu'un on le sentait plus, c'était plus facile. Maintenant si vous suivez quelqu'un, la moto vous secoue bizarrement. Sans les ailerons, la moto était plus difficile à piloter et on pouvait plus facilement partir à la faute, par contre c'était plus facile pour dépasser. Maintenant, c'est plus facile de piloter, il est plus difficile de faire des erreurs, il faut toujours être très précis et doux, mais pour dépasser et suivre quelqu'un c'est beaucoup plus difficile."

Mais l'aérodynamique n'est pas la principale cible de Marc Márquez, surtout inquiet du développement incessant du holeshot device. Lorsque Ducati l'a introduit en 2018, ce dispositif était destiné à abaisser la moto au départ pour offrir un meilleur envol. Il s'est depuis généralisé sur les motos pour devenir utilisable sur les deux roues mais également après le départ, pour abaisser l'arrière dans les phases d'accélération. Au cours des tests de pré-saison, Ducati a franchi un cap avec un système également utilisable à l'avant durant un tour.

Márquez s'inquiète des performances de plus en plus élevées mais aussi des nombreuses actions imposées aux pilotes : "Pour moi, c'est quelque chose qu'il faudra enlever à l'avenir. Je l'ai déjà dit l'année dernière quand je suis revenu de blessure, mais je pense que tous les pilotes doivent être unis parce que les constructeurs en veulent toujours plus, plus, plus. Maintenant, il y a le holeshot [device], plus de bascule sur l'arrière, plus de vitesse et plus de bascule l'avant, au point que c'est même difficile d'enclencher la première pendant la procédure de départ. Pour moi, on n'y gagne rien en termes de show."

"Certes, on a des prototypes mais le holeshot n'est pas nécessaire pour les motos de route. Pour ce qui est de l'aéro, j'étais d'accord, parce que l'aéro c'est toujours sympa et c'est quelque chose de nouveau, mais avec le système holeshot… On est tout le temps en train de chercher à agrandir les voies de dégagement, on arrive plus vite aux points de freinage et on freine plus tard car avec le holeshot on le peut. Pour l'avenir, ça n'a pas de sens."

Fabio Quartararo

Fabio Quartararo

Sans être aussi vindicatif, Fabio Quartararo a également jugé l'expansion constante du holeshot device nuisible pour le pilotage : "Pour moi, ça commence à être trop", a estimé le Champion du monde en titre. "En 2019, c'était juste la procédure au départ : passer sur le neutre, appuyer sur le bouton du launch control et partir. Maintenant, il y a trop de choses à contrôler. Au final, il y a un gain, mais pour moi, ça commence à être trop."

"Je suis d'accord avec Fabio", a renchéri Joan Mir. "Ça commence à être trop. À chaque fois on arrive plus vite en bout de ligne droite. On arrivera vite aux 370 km/h et les tracés sont les mêmes. Les performances s'améliorent. À l'accélération, c'est plus dur de faire la différence. Si on l'utilise, c'est évidemment plus facile mais je pense que ce n'est pas la meilleure chose pour la sécurité."

Ducati défend son innovation

Le son de cloche est tout autre chez Ducati, l'une des marques les plus promptes à lancer des innovations comme le holeshot device, mais aussi à simplifier son utilisation. Sur la Desmosedici, le pilote peut l'activer avant le virage et la moto s'abaissera automatiquement à l'accélération, ce qui n'est pas encore le cas sur le système utilisé par Suzuki. "Moi je n'ai qu'un bouton sur lequel appuyer alors ça n'est pas trop", a relativisé Pecco Bagnaia.

Interrogé sur le sujet au cours du test de Mandalika, Johann Zarco avait également minimisé les risques : "Dangereux, je ne pense pas du tout que ça le soit", avait confié le Français. "Ça nous fait accélérer plus mais ce n'est pas dans des endroits vraiment dangereux. Tout est droit. Maintenant, avec l'aéro on est encore plus sûrs quand on prend de la vitesse. Et même, ce device peut parfois aider donc ça reste intéressant."

Concernant les manipulations à effectuer pour activer le système, Zarco a concédé qu'un temps d'apprentissage s'impose mais que les automatismes viennent vite, d'autant plus que le gain de performance est évident : "C'est vrai que ça devient de vrais dragsters les MotoGP ! À chacun son style. Il y en a qui aiment bien l'activer au freinage, d'autres dans le virage, d'autres à la sortie du virage. Moi, je suis plutôt du genre à l'activer au moment où je relâche mon corps au point de corde. Ça dépend vraiment du style."

"C'est un coup à prendre. Au début, on se dit que ça va être tellement trop de choses à penser que ça va nous faire perdre du temps en pilotage, mais quand on commence à l'utiliser correctement, ça apporte tellement sur les accélérations qu'on se force à l'utiliser. Et après, ça devient un peu automatique et c'est bien de voir ce qu'on peut faire quand on s'adapte."

Zarco ne semble donc pas favorable à une interdiction : "C'est dur à dire. Comment le limiter, est-on déjà au bout du truc, est-ce qu'on peut faire mieux ? Je ne sais pas. Ça reste un développement intéressant. Si tu vois le matos, c'est impressionnant. Par contre, les mécanos pourraient avoir une prime. Ce n'est plus le même boulot qu'il y a quatre ans, c'est plus long."

Maverick Viñales a livré une opinion similaire. Tout en concédant que les actions à faire sur la moto sont devenues trop nombreuses, le pilote Aprilia, marque également agressive dans le développement du variateur de hauteur, voit du bon : "Je pense qu'à l'accélération c'est bien plus sûr avec le holeshot, parce que je me souviens que, parfois, dans des virages comme le dernier d'Austin où on accélère en partant de zéro, le mur est très proche, mais avec le device l'avant a beaucoup plus de contact au sol", a-t-il expliqué ce jeudi. "Maintenant ça va trop loin, il y a trop de choses, mais je pense quand même qu'au moins à l'arrière, c'est beaucoup plus sûr pour le départ et l'accélération."

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Avec Léna Buffa

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