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La saison où Leclerc a révélé l'étendue de son potentiel

Cela peut paraître étrange, compte tenu de son ascension irrésistible vers le sommet du sport automobile, mais avant la saison 2017 de Formule 2, Charles Leclerc n'avait pas pleinement confirmé son potentiel de superstar.

Départ : Charles Leclerc, PREMA Powerteam en tête

Départ : Charles Leclerc, PREMA Powerteam en tête

FIA Formula 2

Après tout, les jeunes pilotes sont nombreux à disposer de soutiens d'influence et d'expérience, mais ils ne brillent parfois pas autant que leurs performances initiales ne le laissaient imaginer.

Début 2017, Charles Leclerc n'était pas qu'un jeune talent : il venait de remporter le GP3 Series, compétition qui avait déjà propulsé ses précédents Champions Esteban Gutiérrez, Valtteri Bottas, Daniil Kvyat et Esteban Ocon vers la F1. Conclue par un accrochage avec Santino Ferrucci, sa campagne n'avait pas été parfaite – la tâche était notamment compliquée par des séances d'essais libres avec Haas lors de certains week-ends, ce qui requérait de réadapter au GP3 quelques heures plus tard – mais il avait néanmoins démontré une certaine constance et engrangé 162 points en Course 1 (excluant les épreuves à grille inversée). Son plus proche rival, un certain Alexander Albon, n'en avait marqué que 120.

La saison précédente, il s'était classé quatrième de F3 Europe avec le titre de meilleur rookie, au sein d'un plateau très relevé où l'on retrouvait Antonio Giovinazzi, Lance Stroll, George Russell, ce même Albon… Déjà à l'époque, Motorsport.com ne tarissait pas d'éloges sur la prestation du jeune Monégasque au sein d'une écurie Van Amersfoort Racing qui n'était pas forcément la plus compétitive : "Son potentiel a éclipsé tous les pilotes qui ont couru en F3 Europe cette saison. […] Leclerc paraît prêt pour le GP2, mais il semble que le GP3 ou une autre année en F3 soient ses options. Et c'est une bonne chose : si on le laisse se développer à un rythme stable, Leclerc deviendra un pilote automobile exceptionnel."

Membre de la Ferrari Driver Academy à partir de 2016, Leclerc a ainsi rejoint la F2 chez Prema Racing, écurie qui entretient des liens étroits avec la marque au cheval cabré, aux côtés d'un autre protégé de la Scuderia, Antonio Fuoco. À l'époque, personne n'avait remporté le titre GP2/F2 en tant que rookie depuis Nico Hülkenberg en 2009, mais l'on s'attendait néanmoins à ce que Leclerc joue le championnat face à Oliver Rowland – son mentor en Formule Renault ! – et Luca Ghiotto. Contre toute attente, Artem Markelov allait également jouer les trouble-fêtes.

Lors du premier meeting à Bahreïn, Leclerc a signé la pole position lors d'une séance qualificative écourtée, mais n'a pu faire mieux que troisième le samedi, ne parvenant pas à gérer ses pneus de manière optimale. En Course Sprint, le pilote Prema a créé la surprise en effectuant un arrêt au stand à dix tours du but pour chausser des gommes neuves. Enchaînant les tours de qualification – jusqu'à être cinq secondes plus rapide que son coéquipier Fuoco –, il a arraché une époustouflante première victoire en F2, juste devant Ghiotto et Rowland.

Le vainqueur Charles Leclerc, PREMA Racing

Leclerc a ensuite multiplié les poles, parfois d'extrême justesse, parfois avec une demi-seconde d'avance, et s'est imposé en Course Principale à Barcelone, à Bakou, au Red Bull Ring et à Silverstone ; seule sa manche à domicile, en Principauté, a tourné au calvaire. Les rookies ont généralement des difficultés à gérer les pneus Pirelli en F2, mais ce n'était clairement plus un problème pour lui.

Cette série de pole positions n'est pas anecdotique, symbole de la rapidité et de l'esprit de compétition affichés par Leclerc. Aucun pilote n'avait réalisé plus de six poles en une saison de GP2, Stoffel Vandoorne et Pierre Gasly étant parvenus à en signer huit en deux ans. Leclerc, lui, a réalisé le meilleur temps de huit séances qualificatives consécutives, même s'il a été disqualifié en Hongrie en raison d'une infraction technique. Ce qui ne semblait d'ailleurs pas le déstabiliser outre mesure : "À vrai dire, ça ne me dérange pas vraiment, je suis même plutôt content de m'élancer dernier. Plus jeune, j'aimais toujours partir derrière pour remonter, et c'est ce que je devrai faire demain." Il l'a fait avec un certain brio. Sur un Hungaroring où les dépassements sont difficiles, il est passé de la 19e place au départ à la quatrième à l'arrivée.

Surmonter les moments difficiles, Leclerc l'a fait pendant toute la saison. À Silverstone, il s'est imposé malgré un frein en feu avant la course, une fuite d'huile durant l'épreuve et un rétroviseur perdu. À Spa-Francorchamps, il a remporté ce qui était peut-être la plus impressionnante de ses victoires (27 secondes d'avance) avant d'être disqualifié à cause d'une usure excessive du patin. "M'ont-ils pris trop au sérieux quand j'ai dit que j'aimais partir dernier ?" a plaisanté le pilote Prema. Se retrouvant 19e sur la grille pour la Course Sprint, il est de nouveau remonté, cette fois à la cinquième place.

Certes, il y a eu des moments négatifs : son accrochage avec Norman Nato à Monaco a conclu un week-end à domicile désastreux, et il pouvait s'estimer heureux de se tirer sans dégâts d'une touchette avec Albon dans la lutte pour la victoire en Course Sprint, à Abu Dhabi. Il n'empêche qu'il était généralement sensationnel… que ce soit sur la piste ou en dehors.

Nous n'étions pas présents en Principauté et avons contacté Leclerc après la Course Principale pour lui demander s'il voulait discuter et expliquer ce qui s'était passé, sans s'attendre à grand-chose, car nous ne nous étions rencontrés que brièvement lors du rendez-vous précédent en Espagne, et il allait forcément être très occupé à Monaco. Mais nous avons eu une longue discussion sur ce qui s'était mal passé et son intention de rebondir le lendemain. Rares sont les pilotes qui en auraient fait autant.

Charles Leclerc, PREMA Powerteam

Puis il y a eu ce week-end à Bakou où, seulement trois jours après la mort de son père, il a signé la pole et remporté la Course Principale. Seule une infraction sous drapeau jaune lui a coûté un second succès le dimanche, mais il s'est quand même classé deuxième. C'était extrêmement impressionnant lors d'un week-end poignant pour un jeune homme de seulement 19 ans. Ces exploits ne peuvent être minimisés.

Enfin, l'on se rappelle un Jerez à la chaleur étouffante, où Leclerc a sacrifié les pneus prévus pour la Course Sprint afin de s'assurer la pole position en qualifications. Il a ensuite remporté la Course Principale, ce qui lui a valu d'être déjà sacré, mais a été contraint de faire un arrêt au stand le dimanche et n'a pu faire mieux que septième. Un résultat qui l'a franchement agacé, alors qu'il venait d'obtenir le titre le plus important de sa carrière.

Au fil de la saison, Leclerc a été courtois et a donné de son temps, quels que soient ses résultats. Calmement, il traçait son chemin vers la Formule 1 – objectif dont il préférait parler le moins possible. Sa soif de victoire et sa capacité à apprendre de ses erreurs l'ont mené chez Sauber, puis chez Ferrari, et enfin sur la plus haute marche du podium de Monza, tout de rouge vêtu, en 2019. Sous contrat à Maranello jusqu'en 2024, Leclerc va indéniablement devenir l'un des grands noms de l'élite aux côtés de Lewis Hamilton et Max Verstappen, profitant d'un talent déjà tellement évident en cette année 2017.

Charles Leclerc, PREMA Powerteam

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