Pourquoi les courses sprint inquiètent certains pilotes

Danger, kilométrage au cours des week-end, durée des essais, stress... Les courses sprint du MotoGP suscitent des inquiétudes auprès de certains pilotes.

Aleix Espargaro, Aprilia Racing

Aleix Espargaro, Aprilia Racing

MotoGP

Les courses sprint du MotoGP, prévues à chaque week-end de Grand Prix à partir de la saison 2023, ne font pas l'unanimité parmi les pilotes. Ces derniers ont d'abord pris la nouvelle avec un certain scepticisme, d'autant que nombre d'entre eux ont été informés du projet par la presse. Ils se sont pour la plupart montrés plus enthousiastes après une réunion de la Commission de sécurité au cours de laquelle la Dorna a clarifié ses intentions et livré les premiers détails sur le déroulement des week-ends.

"Tout était [plus clair] après la Commission de sécurité", a confirmé Pol Espargaró, qui n'avait pas masqué ses critiques avant cette réunion. "Si vous m'aviez interrogé avant ou après, mes propos auraient pas mal changé parce que [même si] on ne m'a pas dit quoi dire, on m'a informé de toute la situation. Avec toutes les informations, on voit les choses sous un nouvel angle. [Vendredi] j'étais totalement opposé mais [maintenant], je vois des bénéfices à faire cela, compte tenu de la façon dont ils me l'ont expliqué et dont ils veulent le faire. Si je mets tout cela dans la balance, je veux essayer, je veux voir ce qu'il va se passer."

Son grand frère, Aleix Espargaró, reste dubitatif et associe surtout les courses sprint à une augmentation du danger. Il peine aussi à croire certaines promesses faites par les instances dirigeantes au cours de cette réunion, notamment sur le maintien d'un kilométrage similaire à celui des week-ends actuels. "Je veux vraiment croire que le management du championnat pense que c'est la meilleure chose pour le spectacle, pour la compétition, pour la popularité de la catégorie", a déclaré le pilote Aprilia. "Je ne partage pas cette idée mais ce n'est que mon avis."

"Je pense que ce n'est pas la solution, que le risque sera trop élevé. Je pense que 44 courses en MotoGP, c'est trop. Ils disent qu'il y aura autant de temps en piste et que rien ne va changer. Ce sont des conneries parce que ce n'est pas la même chose de faire les EL4 ou une course avec des points. Mais je vais essayer. Il faut s'adapter au championnat, ils font ce qu'ils veulent et on doit s'adapter. Il faut essayer, peut-être que c'est une bonne solution."

Aleix Espargaro, Aprilia Racing Team, Brad Binder, Red Bull KTM Factory Racing, et Alex Rins, Team Suzuki MotoGP

Aleix Espargaró pendant la course du Red Bull Ring

Le nouveau programme des Grands Prix doit encore être finalisé mais les essais devraient être allongés le vendredi, avant une séance d'une demi-heure le samedi matin suivie des qualifications. L'après-midi, la course sprint devrait durer moins d'une demi-heure. "C'est le même kilométrage, mais si on fait 14 tours en EL4 et en course, le niveau de danger ou l'énergie nécessaire ne sont pas les mêmes", a souligné Fabio Quartararo, l'opposant le plus véhément aux courses sprint.

Nettement plus favorable au concept, Joan Mir s'inquiète néanmoins de l'accumulation de fatigue : "D'un côté, j'aime ça parce que le vendredi aura plus d'intérêt maintenant", a estimé le Champion du monde 2020. "On verra directement si on entre en Q2, ça sera bien. Le samedi matin, on aura les EL3 puis les qualifications, je n'aime pas trop ça, mais si on fait 24 courses, [avec certaines] hors d'Europe et des doubles manches, ça sera dur physiquement. C'est dur. Mais il faut essayer !"

Baz s'amuse de ces craintes

Loris Baz, ancien pilote du MotoGP aujourd'hui engagé dans la catégorie WorldSBK avec ses trois courses par week-end, prend avec humour la réticence de ses anciens camarades et les appelle à embrasser ce nouveau format. "Des pilotes de course se plaignant de faire des courses..." a ironisé le Français sur Twitter, accompagnant son message d'un emoji levant les yeux aux ciel. "Nous avons trois courses en WorldSBK et j'aimerais en avoir quatre. Si vous n'aimez pas les courses, devenez pilotes d'essais."

Aleix Espargaró n'a pas tardé à réagir, estimant les comparaisons directes entre les deux championnats impossibles : "Ce que tu dis n'est pas juste, je suis impatient de tester le nouveau format et j'espère que ça sera plus fun à suivre pour les passionnés, mais comparer l'effort physique d'une MotoGP à une Superbike, de la part d'un pilote qui a déjà piloté une MotoGP, ça n'a pas le moindre sens..."

 

Baz a assuré à Espargaró qu'il apprécierait ce dédoublement des courses et le Catalan lui a fait part de son espoir que cela soit vrai, tout en restant sur la réserve : "Une MotoGP demande plus de temps de réglage et ce sera très exigeant, mais on va essayer et s'amuser !"

Moins de temps pour régler les motos et plus de stress

Au delà du simple aspect physique, le nouveau format pourrait en effet compliquer le travail de chaque membre des équipes, contraints de trouver les bons réglages plus rapidement avant les qualifications puis la course sprint, d'autant plus que le warm-up devrait disparaître et enlever une opportunité de peaufiner la préparation du Grand Prix.

Luca Marini estime que la demi-heure d'essais du samedi matin sera "une séance merdique pour essayer des choses" et qu'il sera nécessaire de vite mettre le doigt sur la meilleure configuration. "J'espère être l'un de ceux qui aura des réglages dès le début de la saison, pour ne plus rien toucher de la première à la dernière course", a précisé le pilote VR46. "Je pense que c'est ce qui fera la différence parce qu'on n'aura pas le temps [de tester des choses]."

Pol Espargaró prédit une augmentation de la nervosité dans les garages en 2023 : "C'est sûr que ça sera beaucoup plus stressant psychologiquement, pour nous, les mécaniciens, les ingénieurs, les techniciens... Ça sera plus stressant pour nous tous. Les pilotes ont besoin d'être prêts pour ça. Toutes les équipes de mécaniciens doivent se préparer."

"Ça sera plus dur pour tout le monde, psychologiquement et physiquement, et on prendra plus de risques en gagnant autant d'argent, moi, les pilotes et aussi les mécaniciens", a souligné celui qui disputera cette saison 2023 pour Tech3. 

Dès les premières révélations sur le nouveau format, Pol Espargaró s'était déjà interrogé sur ce travail plus dense sans hausse de son salaire, mais il estime désormais qu'un succès des courses sprint pourrait répondre à cette problématique : "Si on peut améliorer le spectacle, l'argent va arriver d'une autre façon. Il y aura une croissance pour les pilotes et les équipes donc les sponsors voudront investir dans ce championnat."

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