Dani Pedrosa, ou les regrets d'une carrière marquée par la malchance
Dans un long entretien pour Motorsport.com, Dani Pedrosa est revenu avec beaucoup de sincérité sur les regrets qu'il garde en lui après sa carrière.
Photo de: Repsol Media
Dani Pedrosa est souvent considéré comme le pilote le plus méritant n'ayant jamais remporté le championnat MotoGP. Arrivé en 2006 après avoir dominé les catégories 125cc et 250cc, l'Espagnol, qui avait au préalable percé dans les championnats organisés dans son pays et s'était fait remarquer au plus haut niveau, centralisait les espoirs d'un palmarès exceptionnel.
Or, malgré 31 victoires sur 112 podiums et six saisons terminées dans le trio de tête du championnat, Dani Pedrosa n'est jamais devenu Champion du monde MotoGP. Outre le fait qu'il a partagé la piste avec certains des plus grands champions de la discipline, à commencer par Valentino Rossi, mais aussi Jorge Lorenzo qui est arrivé deux ans après lui, le Catalan a surtout subi un nombre incalculable de blessures qui ont souvent freiné ses ambitions.
Dans un entretien récemment accordé au podcast de l'édition espagnole de Motorsport.com, Dani Pedrosa s'est livré sur ces occasions manquées, pointant le manque de chance qui lui a, selon lui, coûté deux ou trois couronnes mondiales.
"Je pense que Jorge mérite ce qu'il a gagné. On ne peut rien lui enlever, bien au contraire", a-t-il expliqué au sujet de Jorge Lorenzo, qui fut longtemps son meilleur ennemi. "Dans mon cas, si seulement deux ou trois choses s'étaient bien passées, j'aurais facilement été deux fois champion du monde, peut-être même trois."
Avec le recul, Dani Pedrosa, bientôt 39 ans, a conscience qu'à l'époque tout n'a pas été fait correctement pour lui permettre de s'épanouir en MotoGP. "Le fait est que ça a été compliqué pour moi, et j'ai aussi commis des erreurs en MotoGP. En 125cc et en 250cc, on faisait très bien les choses, mais ensuite on n'a pas su s'adapter à l'environnement médiatique. On est restés très fermés sur le style qui avait fonctionné pour nous en 125cc et 250cc, mais le MotoGP, c'est différent."
"Il faut entrer dans le jeu des médias parce que les adversaires le font. Et puis, il y avait Valentino Rossi, qui était incontestablement un crack dans ce domaine. Qu'on le veuille ou non, même si on a un caractère différent, comme Casey Stoner, qui était lui aussi différent, très fermé comme moi, il faut savoir gérer un peu cette atmosphère. Or, on ne l'a pas bien fait."
"Je ne dis pas que c'est la cause de tout, mais quand on attend de vous que vous fassiez quelque chose qui est si difficile à réaliser et que, de l'autre côté, vous ne savez pas non plus comment faire quand les choses tournent mal, cela devient de plus en plus lourd à porter."
Aujourd'hui plus serein et bien plus à l'aise avec les médias, Dani Pedrosa reconnaît qu'il aurait gagné à faire preuve "[d']un peu plus de flexibilité mentale pour [s']adapter plus rapidement à ce genre de choses". Il nourrit quelques regrets en ce sens : "J'ai toujours très bien communiqué avec les Japonais et je me suis toujours très bien entendu avec eux au sujet du développement de la moto. En revanche, avec les journalistes, qu'ils soient espagnols ou étrangers, j'ai toujours eu plus de difficultés, je n'ai pas eu cette bonne communication."
Pas de relation avec celui qui l'a découvert, Alberto Puig
Si Pedrosa parle au pluriel de ce qu'il a fait de bien ou de mal, notamment dans sa gestion des médias en MotoGP, c'est qu'il fait référence à celui qui fut son découvreur et qui, pendant une décennie, a été son manager, à savoir Alberto Puig. Ce dernier est aujourd'hui encore l'un des plus hauts responsables du programme Honda, marque à laquelle Pedrosa est resté lié jusqu'à son retrait de la compétition, fin 2018.
Si le binôme semblait fusionnel à l'époque, leur relation s'est terminée de manière assez brutale et ils n'ont plus de contact, d'après l'actuel pilote essayeur KTM. "Cela fait longtemps que nous ne communiquons plus. On ne se parle plus, c'est tout", explique-t-il.
Alberto Puig et Dani Pedrosa
Photo de: Repsol Media
"Je n'ai aucun problème avec lui, absolument aucun. Il n'y a pas grand-chose à ajouter, je veux dire que nous nous sommes séparés et que nous avons cessé de communiquer, mais tout va bien de mon côté", ajoute Pedrosa, tout en admettant qu'à l'époque, la séparation a été difficile : "Oui, un peu. Je parle de moi. Lui, je ne sais pas comment il l'a vécu, mais dans mon cas, oui."
Pas le temps de se réconcilier avec Simoncelli
Souvent vu comme étant dans sa bulle et quelque peu hermétique au monde extérieur lorsqu'il vivait les meilleures années de sa carrière, Dani Pedrosa a connu des moments de tension avec ses adversaires, à commencer par son premier coéquipier en MotoGP, Nicky Hayden. Il y eut aussi son opposition à Marco Simoncelli, passée à la postérité bien malgré lui.
La saison 2011 fut en effet l'une de celles où l'Espagnol pense qu'il aurait pu avoir sa chance. Troisième du Grand Prix d'ouverture, il a fait deuxième ensuite puis a gagné au Portugal et figurait ainsi à cinq points du leader Jorge Lorenzo au championnat, 20 points devant Casey Stoner, qui serait titré cette année-là. En forme, Pedrosa avait ses chances. Mais au quatrième Grand Prix de la saison, au Mans, il a été heurté par Simoncelli qui tentait de le dépasser et il est tombé, se fracturant la clavicule.
Absent plusieurs Grands Prix, il a retrouvé le paddock au Mugello, avec un retard au classement général qui signait déjà la fin de ses espoirs de titre. C'est alors qu'il s'est retrouvé à côté de Simoncelli en conférence de presse et a refusé la main que lui a tendue l'Italien. Une image restée dans la postérité et qui continue de hanter l'Espagnol, alors que Simoncelli allait se tuer moins de quatre mois plus tard.
"On commet tous des erreurs, mais l'important est d'en tirer des leçons quand on fait une erreur ou que l'on réagit d'une manière ou d'une autre. On peut toujours réfléchir et, si on en a l'occasion, on peut demander pardon ou remercier la personne qui nous a aidé à réaliser, à condition d'être conscient que cela nous aide à nous améliorer", explique Pedrosa.
Dani Pedrosa et Marco Simoncelli au GP du Portugal 2011.
Photo de: Repsol Media
"Je pense que j'avais toutes les raisons d'être en colère. Je pense que j'avais toutes les raisons de ne pas lui serrer la main, parce qu'à ce moment-là, il avait été averti par la direction de course, il avait été averti par Stoner, par Jorge. Le seul qui encourageait ce style de pilotage, c'était Valentino Rossi. Au final, c'est moi qui ai eu la mauvaise partie, c'est-à-dire que je me suis cassé la clavicule et que j'ai dû être opéré deux ou trois fois de suite parce qu'on n'arrivait pas à me la réparer correctement. J'ai manqué plusieurs courses, j'ai jeté mon championnat à la poubelle."
"Évidemment, il pouvait dire qu'il était désolé, mais les deux mois d'hôpital avaient été pour moi. À ce moment-là, j'avais à fleur de peau ce qui s'était passé et il m'était difficile de pardonner. C'est quelque chose que l'on métabolise après coup."
Et c'est en Malaisie, lorsque Simoncelli s'est tué, que Pedrosa dit avoir "compris" la meilleure attitude qu'il aurait dû avoir. "Personnellement, je n'ai pas eu le temps de suffisamment le métaboliser, parce que malheureusement, il s'est tué. C'est à ce moment-là, quand on était en Malaisie, que j'ai compris. Juste à ce moment-là, j'ai compris. Et j'y suis allé, je le lui ai dit. Je pense avoir été l'un des premiers à rejoindre son père parce qu'il était dans le box à côté du mien. J'y suis allé en courant et je le lui ai dit."
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