Pourquoi Ricciardo est une victime collatérale du casse-tête Red Bull

La décision des écuries Red Bull et VCARB d'écarter Daniel Ricciardo en cours de saison n'a rien à voir avec l'idée que ses performances étaient à ce point médiocres qu'un changement immédiat s'imposait.

Laurent Mekies, le patron de la structure italienne, a clairement indiqué le week-end dernier que si l'Australien disposait de la bonne voiture, comme lors du sprint de Miami cette année, sa vitesse pure lui permettait d'en tirer le meilleur parti.

Au contraire, les grandes manœuvres qui ont déclenché le départ de Ricciardo de la F1 et qui ont permis à Liam Lawson de retrouver un cockpit en compétition s'expliquent en grande partie par le fait que Red Bull avait besoin de prendre les devants sur le dossier des pilotes en vue de 2026.

Si nous revenons un peu en arrière, il faut se rappeler que le retour de Ricciardo chez VCARB l'année dernière était en fin de compte un test pour rejoindre Red Bull. Sergio Pérez ayant connu des difficultés au cours de la seconde moitié de l'année 2023, Red Bull savait que si l'Australien affichait la même vitesse que lors du test effectué après le GP de Grande-Bretagne au volant de la RB19 l'année dernière, il serait une solution de confort si son titulaire mexicain ne parvenait pas à élever son niveau de jeu.

Mais les choses n'ont pas débuté sous les meilleurs auspices puisque Ricciardo s'est cassé le poignet à Zandvoort, ouvrant ainsi la voie à Lawson, qui a impressionné au cours des cinq courses qu'il a disputées avec l'équipe. Puis, alors que Pérez était en grande difficulté au début de l'année 2024, l'inconstance de Ricciardo l'a empêché de convaincre Red Bull qu'il apporterait automatiquement une amélioration de ses performances s'il faisait son retour à Milton Keynes.

Il y a eu une très brève période autour des GP de Hongrie et de Belgique, cette saison, où Ricciardo semblait tout de même être en lice pour ce baquet alors que Red Bull perdait espoir en Pérez, mais une fois que l'équipe s'est engagée à maintenir le Mexicain, les événements qui se sont déroulés cette semaine ont été gravés dans le marbre.

Sergio Pérez devant Daniel Ricciardo lors du GP d'Émilie-Romagne.

Photo de: Sam Bloxham / Motorsport Images

Ce qui plane dans l'esprit des dirigeants de Red Bull, c'est la question de savoir quoi faire avec ses pilotes pour 2026 - même si, en théorie, Max Verstappen et Pérez ont tous les deux un contrat. Cependant, il est impossible de garantir à 100% leur présence à ce moment-là.

Verstappen pourrait rejoindre une autre équipe ou quitter complètement la F1, tandis que Pérez se doit d'être plus performant pour sécuriser sa place. Ces éventualités font que Red Bull ne peut pas prendre le risque de ne pas avoir d'autres options de premier plan sur la table s'il faut se tourner vers un plan B.

L'équipe doit s'assurer de couvrir ses arrières sur deux fronts. Tout d'abord, elle doit garder un œil sur les meilleurs talents des autres équipes - c'est pourquoi le directeur de Red Bull Racing, Christian Horner, a joué les trouble-fêtes en déclarant que George Russell pourrait être une cible pour lui à l'avenir.

Mais ce dont Red Bull a surtout besoin, c'est de savoir qui est le plus apte parmi son pool de jeunes pilotes actuel - et le seul moyen d'en être sûr, c'est d'entamer les comparaisons dès maintenant.

Ricciardo n'étant pas une option à long terme, Red Bull ne pouvait pas vraiment attendre le début de l'année 2025 pour réintégrer Lawson et obtenir un verdict définitif sur ses performances par rapport à Yuki Tsunoda.

Si la situation de Pérez ne s'améliore pas d'ici à la fin de la campagne, Red Bull doit déterminer avec certitude qui constituera la meilleure solution de remplacement en cas de besoin.

Liam Lawson, Visa Cash App RB F1 Team

Photo de: Alastair Staley / Motorsport Images

Il est assez clair que Red Bull ne pense pas que Tsunoda soit le bon profil aux côtés de Verstappen, mais lancer Lawson sans qu'il ait effectué une série de courses digne de ce nom pour montrer son potentiel reviendrait à prendre un gros risque. De plus, si Pérez s'en va et que Lawson n'est pas à la hauteur, Red Bull pourrait alors se retrouver à la recherche de deux pilotes....

Ainsi, s'il aurait été sympathique de laisser à Ricciardo l'opportunité d'une tournée d'adieux pour finir la saison, le temps ne joue pas en faveur de Red Bull. C'est pourquoi la firme a besoin de s'assurer au plus vite du profil de Lawson pour savoir où le situer : est-il promis à une place dans le vaisseau-amiral ou a-t-il besoin de plus de temps pour progresser ?

Il y a aussi le débat sur ce qu'il faut faire avec les autres pilotes junior. Isack Hadjar fait du bon travail en F2 et frappe à la porte de la F1, tandis qu'Ayumu Iwasa accumule les podiums en Super Formula.

Comme l'a précisé Helmut Marko, conseiller en sport auto de Red Bull, dans une vidéo publié par Motorsport-Total.com, publication affiliée à Motorsport.com, il s'agit d'une problématique plus large. "Ricciardo a été rappelé avec la possibilité pour lui de rejoindre Red Bull Racing s'il avait affiché les performances requises chez Racing Bulls", a-t-il ainsi expliqué. 

"Mais il faut voir les choses dans un contexte plus large. Nous avons pas mal de jeunes pilotes. C'est le cas d'Hadjar, de Lawson. C'est aussi le cas d'Iwasa, sans établir de classement. Nous devons nous tourner vers l'avenir. Et nous voulons aussi faire des comparaisons : où se situe Lawson par rapport à Yuki ? Ensuite, pour l'avenir, à quoi ressemblera le duo de pilotes pour nos deux équipes ?"

Voilà donc ce qui se joue. Le remaniement opéré par Red Bull pour le Grand Prix des États-Unis n'a pas pour but d'améliorer les résultats actuels, mais plutôt de préparer ce qui se passera dans 18 mois.