Le partage des données, l'atout au cœur de la domination Ducati
Ducati a mis en place des méthodes rigoureuses pour recueillir les impressions de ses huit pilotes et partager entre eux toutes les informations. Ces derniers peuvent ainsi étudier chaque piste de progrès, mais restent attentifs à ne pas "se perdre" dans la quantité de données.
Pour la troisième saison, Ducati engage huit motos, soit plus du tiers du plateau et surtout deux fois plus que les autres marques, et même quatre fois plus que Yamaha, qui ne dispose que des machines de son équipe officielle. Ce déséquilibre contribue à la mainmise du constructeur de Borgo Panigale sur le MotoGP, la présence en nombre de Desmosedici permettant de fluidifier le travail pendant les week-ends de compétition.
Ducati cherche autant que possible à faire travailler ses trois équipes partenaires à l'unisson. Si KTM essaie d'intégrer totalement Tech3 dans son développement, Aprilia et Honda commencent à peine à le faire avec leurs équipes satellites : le premier fournit une machine d'usine à Miguel Oliveira et le fera bientôt pour Raúl Fernández chez Trackhouse, tandis que le second associe enfin LCR à ses projets, ce qui était peu le cas l'an passé.
Du côté de Ducati, Pramac bénéficie d'un statut privilégié en ayant les mêmes machines que l'équipe d'usine, mais le partage de données est total avec VR46 et Gresini. Au sein de cette dernière équipe, Álex Márquez décrit un processus "assez simple" qui voit les responsables techniques de la marque faire un tour d'horizon des impressions de chaque pilote à plusieurs reprises pendant le week-end, et les informer des meilleures pistes à suivre.
"Après toutes les séances, Gigi [Dall'Igna, directeur général de Ducati Corse] et son équipe vont voir tous les pilotes pour avoir leurs commentaires, pour discuter avec le pilote mais aussi avec le chef mécanicien et voir ses idées pour la séance suivante, etc", explique l'Espagnol. "Après, on peut tout voir en direct pendant les séances, ce que font les autres, on le voit immédiatement et ils donnent accès à toutes les données. On fait beaucoup d'analyses par la suite, pour comparer les styles, etc. C'est assez facile si on regarde les choses importantes ; sinon on peut aussi se perdre assez facilement."
Il est en effet possible de s'égarer dans la masse d'informations. Ayant lui-même abandonné une Honda pour une Ducati de l'équipe Gresini il y a un an, Álex Márquez a vu son frère, Marc Márquez, suivre le même chemin, et il estime que le sextuple champion du MotoGP a dû s'adapter à cette philosophie très différente de celle qu'il connaissait.
"Dans son ancienne équipe, c'était assez différent mais chez Ducati, c'est assez ouvert et facile. Mais il est aussi d'accord sur le fait que si on regarde trop en profondeur, et tous les pilotes, on peut se perdre quelque part. Il faut essayer de toujours analyser les mêmes pilotes et ne pas se rendre fou avec les chiffres."
Fabio Di Giannantonio
Photo de: Media VR46
Chez VR46, Fabio Di Giannantonio confirme cette tendance à observer en priorité certains pilotes, et note la possibilité de toujours trouver un élément où l'un des sept autres représentants de Ducati a un avantage. "On est huit pilotes sur la Ducati et on est huit pilotes très forts", a souligné l'Italien. "Chacun de nous a vraiment un élément favorable par rapport aux autres, donc en tant que pilote, j'essaye de chiper des choses un peu à tout le monde."
"Après, en réalité, quand on analyse les données, on se concentre au maximum sur un ou deux pilotes pour ne pas créer de confusion. Mais, en fait, chaque pilote de la grille fait certaines choses vraiment dingues alors on essaye tout le temps de regarder un peu tout le monde pour tenter de peaufiner notre pilotage."
Quand on pilote, on le fait instinctivement, or c'est très compliqué d'apporter un changement dans son instinct. C'est très compliqué et, au début, on risque même d'être plus lent.
Si Álex Márquez et Fabio Di Giannantonio se concentrent surtout sur les données de certains pilotes, c'est en raison de sensibilités similaires dans la façon de manier la Ducati. S'aventurer à un copier-coller du plus performant n'aurait pas forcément de sens puisque ce qui fonctionne pour l'un n'aura pas la même efficacité chez un autre.
"Au final, quand on pilote, on le fait instinctivement, or c'est très compliqué d'apporter un changement dans son instinct. C'est très compliqué et, au début, on risque même d'être plus lent. Alors il faut étudier les choses de manière très attentive, comprendre ce qui pourrait être utile ou pas. C'est une analyse un peu longue, que je fais à la maison avec mon entourage et l'équipe peut aussi me donner un coup de main. On essaye de toujours prendre de petites choses comme ça pour peaufiner le pilotage."
L'accès à ces données est un immense avantage mais faire face à sept gros clients disposant également d'une Ducati peut aussi poser un défi difficile à relever. Di Giannantonio préfère voir une "belle stimulation" dans cette concurrence interne : "C'est une belle stimulation. Sincèrement, je ne me sens inférieur à aucun de ces pilotes. Je veux apprendre d'eux mais au final, la vitesse entre nous est très similaire donc j'ai totalement le sentiment de faire partie d'eux. Ce n'est donc qu'une stimulation."
"Avoir comme coéquipier Bez, qui a fait troisième du championnat l'année dernière, c'est quelque chose de très important, de très utile pour moi afin de comprendre où je peux m'améliorer et où il est meilleur que moi. À mon avis, ça n'est qu'une aide supplémentaire."
Avec Léna Buffa
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