Drive to Survive va-t-il trop loin dans ses libertés scénaristiques ?

Alors que l'engouement monte avant le premier Grand Prix de 2022, cette semaine, les fans ont pu revivre la saison précédente grâce à la série Drive to Survive sur Netflix. Mais dans quelle mesure la plateforme américaine a-t-elle pris ses aises en termes de créativité ?

Un caméraman filme Charles Leclerc, Ferrari SF21 dans la voie des stands

Photo de: Mark Sutton / Motorsport Images

La quatrième saison de la série-documentaire Netflix Drive to Survive est arrivée sur nos écrans vendredi dernier, en plein milieu des essais hivernaux de Bahreïn. L'occasion de revivre l'extraordinaire championnat de 2021 et d'en découvrir les coulisses. Pourtant, les fans ont plus que jamais noté les faux raccords ou les modifications dans la chronologie des éléments, ce qui en a frustré (ou déçu) plus d'un.

C'est d'ailleurs pour cette raison que Max Verstappen annonçait, en octobre dernier, qu'il avait refusé de prendre part à cette saison de Drive to Survive, désignant les rivalités montrées comme étant "fausses". Comme nous le notions dans notre avis sur la saison 4, son absence se remarque et enlève de l'intérêt à la série. Les commentaires de Verstappen lors de cette annonce avaient ravivé le débat sur la liberté que prenait Netflix dans Drive to Survive. La même semaine, j'écrivais qu'il n'y avait rien de mal à ce que la plateforme américaine mette son grain de sel dans le scénario, étant donné le succès colossal de la série et son impact sur la F1 dans son ensemble, avec des millions de nouveaux fans pour la discipline. Mais avec la sortie de la nouvelle saison, ce sentiment a quelque peu changé.

À Bahreïn, Verstappen a été clair : le Néerlandais restera sur sa décision de snober la série, ajoutant néanmoins qu'il la "regardera probablement pour voir à quel point c'est exagéré". Mais le Champion du monde n'est pas le seul à être sceptique. Même avant la parution des nouveaux épisodes la semaine dernière, les fans se demandaient comment seraient gérés les événements de la fin de la saison 2021. Lando Norris allait jusqu'à déclarer que la gestion de la voiture de sécurité à Abu Dhabi avait été influencée par la télévision. Pas de quoi donner une bonne image de la série, donc... Depuis, les mèmes et les montages sur YouTube moquant la série se sont multipliés, en reprenant des faux raccords ou des images faussement dramatiques.

L'un des exemples les plus marquants est celui de la rivalité entre les coéquipiers McLaren, Lando Norris et Carlos Sainz, contée dans un épisode de la saison 3. Alors que l'amitié entre les deux pilotes était connue de tous, cet épisode semblait créer des tensions là où il n'y en avait aucune. "Je crois que dans le cas de Lando et moi, ils ont poussé un petit peu trop loin", déclarait Sainz. "Tous les fans qui connaissent la Formule 1 − et ils sont nombreux, surtout maintenant, car nous sommes tellement suivis dans le monde entier − savent que Netflix est probablement allé un peu trop loin avec Lando et moi. Mais je suis sûr que Netflix le sait, et ils sont capable de corriger et juger les erreurs. Ils vont s'adapter et peut-être essayer de rendre la série plus réaliste dans ce sens."

Il est évident que certains scènes sont dépeintes de façon à faire avancer l'intrigue, étant donné que les caméras de Netflix ne peuvent être présentes à la majorité des réunions qui ont lieu. Deux exemples récents : Christian Horner qui appelle Sergio Pérez à la fin de la saison 3 pour lui dire "bienvenue chez Red Bull" (comme si c'était à ce moment que le Mexicain l'apprenait), ou bien la réunion entre Toto Wolff et George Russell à Zandvoort pour annoncer que le Britannique obtenait le baquet Mercedes pour 2022 (au moins deux semaines après que le pilote Williams ait été mis au courant de la nouvelle, puisqu'il l'a su avant le Grand Prix de Belgique).

 

Dans cette saison, l'absence de Verstappen laisse la parole à Christian Horner, qui s'attaque continuellement à ses rivaux, Toto Wolff et Mercedes en général. Beaucoup de scènes le montrent en train de tenir des commentaires après avoir vu Lewis Hamilton ou son patron sur des écrans, mais bien évidemment, il est impossible de savoir comment ces images ont été montées.

"La saison dernière était extrêmement intense, et au final, une série-documentaire comme Drive to Survive est une émission de télé", explique Horner. "Ils prennent des extraits d'une bataille qui dure une saison entière et les montent pour en faire un programme télé. Bien sûr, l'effet est que les audiences de la Formule 1 ont explosé. Mais on ne doit pas oublier que tout est fait pour divertir. Bien sûr, des éléments sont utilisés dans ce sens, et parfois ils ne proviennent même pas de la course en question."

"Il y a bien évidemment des commentaires et des choses ici et là qui ne sont pas à leur place", ajoute quant à lui Lando Norris. "Quand cela vous concerne, peut-être que vous n'êtes pas totalement d'accord car cela peut vous faire dire quelque chose, à un moment donné, qui n'est absolument pas vrai." Un exemple cité par le pilote McLaren : l'une des deux courses à Spielberg, relayée dans la troisième saison, lors d'un duel avec son coéquipier de l'époque. "Il y a un moment où Sainz et moi sommes à deux dans le premier virage, nous ne sommes même pas proches et je clame qu'il m'a poussé à l'extérieur, alors que c'était sur une autre course. Il y a peut-être un peu trop de choses comme ça, et je ne pense pas être d'accord avec cela."

Bien que cette dramatisation augmentée ne soit pas perceptible par les fans occasionnels qui ne consomment de la F1 que via Drive to Survive, le danger est que d'autres pilotes et écuries fassent le même choix que Verstappen et décident de se retirer. Après tout, Netflix a besoin de ces personnalités pour que sa série soit un succès, sans quoi elle perdrait tout son sens. Pour le moment, cette crainte ne semble pas fondée car les avantages de Drive to Survive comblent largement ses défauts.

"C'est toujours excitant et bon pour tout le monde", relativise Norris. "Tant qu'ils ne vont pas trop loin et qu'ils ne font pas faire à quelqu'un quelque chose qu'il n'a pas fait − car je pense que ce serait trop − alors c'est bon." Son compère Carlos Sainz partage ce point de vue. "Je pense toujours que Netflix est une bonne chose pour moi et pour la marque Formule 1", souligne l'Espagnol. "Je resterai présent dans la série s'ils souhaitent me revoir dedans."

Cela a toujours été compliqué pour Netflix de trouver le juste équilibre, entre relater des faits réels et dramatiser les scènes pour les rendre plus excitantes et divertissantes pour les fans occasionnels. Beaucoup de critiques sur la série viennent de cet aspect : Netflix vise un certain public, qui n'est pas le fan hardcore de F1. Mais cette série est devenue une part important de l'image du championnat, et comme les spectateurs occasionnels de la saison 1 sont devenus plus impliqués et connaisseurs, s'assurer que cet équilibre ne penche pas trop du côté de la dramaturgie doit devenir une priorité absolue pour les saisons à venir.

Lire aussi :

Rejoignez la communauté Motorsport

Commentez cet article

Voir aussi :

Article précédent La bagarre avec Hamilton à Bahreïn rend Gasly optimiste
Article suivant Pas d'astérisque à côté du titre de Verstappen, juge Brundle

Meilleurs commentaires

Il n'y a pas de commentaire pour le moment. Souhaitez-vous en écrire un ?

Abonnez-vous gratuitement

  • Accédez rapidement à vos articles favoris

  • Gérez les alertes sur les infos de dernière minute et vos pilotes préférés

  • Donnez votre avis en commentant l'article

Motorsport Prime

Découvrez du contenu premium
S'abonner

Édition

France