Technique - Comment démarre le moteur d'une F1
Démarrer un moteur turbo hybride de Formule 1 à froid nécessite une séquence coordonnée et précise d’actions, mais point de clé de contact !
Photo de: Renault F1
Motorsport.com a discuté du démarrage d’un moteur Renault de Formule 1 avec Bob Bell, l’ex-directeur technique de Renault qui assumera désormais un rôle de conseiller au sein de l'équipe française.
"Démarrer le moteur n’a rien de très compliqué. Il faut essentiellement s’assurer d’avoir les bonnes personnes qui surveillent la télémétrie et être ainsi certain que le moteur se comporte correctement", nous explique Bell. "Un démarrage nécessite beaucoup plus d’intervenants aujourd’hui que par le passé, quand il ne fallait qu'une bouteille d’acétone et un démarreur à air comprimé."
Tout commence par un échauffement. "Nous débutons par un pré-chauffage du moteur afin de l’amener graduellement tout près de sa température de fonctionnement", poursuit Bell. "On peut faire circuler de l’eau chaude à l’intérieur du bloc, ou on peut le faire démarrer et le laisser tourner au ralenti."
Une fois le bloc réchauffé, le responsable du démarreur fait tourner le moteur à vide, c’est-à-dire sans l’allumage, afin de faire circuler l’huile à l’intérieur, et de mettre le circuit de refroidissement, les soupapes pneumatiques et le circuit d’alimentation en essence en pression. Après quelques secondes, l’allumage est actionné, le démarreur est actionné et le moteur démarre. Tout ce qui se passe à l’intérieur du bloc est vu et scruté sur les écrans des ordinateurs. En cas de pépin, appuyer sur un bouton rouge fera stopper le moteur en un clin d’œil.
"Le plus important est de faire progressivement monter le moteur en température. On s’assure qu’il se comporte correctement au ralenti, puis l’ordinateur lance un programme d'échauffement automatique qui fait varier le régime du moteur selon une séquence préétablie", ajoute Bell.
Un circuit hydraulique aux normes aérospatiales
"Une fois le moteur démarré, nous laissons le circuit hydraulique chauffer, car tout ce qu’il actionne, comme la servodirection et les freins électroniques, ne fonctionne pas correctement à froid. Par la suite, nous vérifions le bon fonctionnement de l’embrayage et du passage semi-automatique des vitesses", ajoute-t-il.
Bell confirme que ce fameux circuit hydraulique est une partie cruciale de la monoplace. "Il y a un système hydraulique unique sur la voiture", explique-t-il. "Par contre, la section du circuit qui gère le fonctionnement de la voiture est aussi sensible à la contamination que celle qui gère le moteur. Il faut donc parfaitement filtrer le fluide et éviter toute contamination avec les mêmes standards que ceux de l’industrie aérospatiale. On fait comme dans l’aviation commerciale. C’est déterminant, car ça ne prend pas grand-chose pour qu’un moteur de F1 cesse de tourner correctement…"
Bell ajoute qu’un moteur de F1 peut être vite endommagé. "Il ne faut surtout pas le laisser tourner sans que l’air ne traverse les radiateurs. Si la voiture s’immobilise sur le circuit et que le moteur tourne sans être refroidi, on peut avoir de gros ennuis en moins d’une minute", précise-t-il.
Puisque chaque pilote ne dispose que de trois moteurs pour disputer toute la saison, l’accent est évidemment mis sur la fiabilité mécanique. "Nous ciblons un cycle d’endurance de 7000 km pour chaque moteur", indique Bell.
"Ce serait l'idéal. Mais si un moteur pouvait encaisser 6000 km, ce serait déjà très bien. Il est toutefois très difficile de faire survivre un moteur aussi longtemps, même si ce kilométrage est dérisoire pour une voiture de série. Afin de limiter les coûts, nous assemblons assez peu de moteurs et nous ne les faisons pas tourner sur le banc d’essais pour rien. En conséquence, nous ne disposons pas d'assez de données statistiques pour estimer avec précision la durée de vie de nos moteurs", termine Bell.
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