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Édito - Clap de fin pour la Formule V8 3.5

Des championnats se créent, certains se transforment, d'autres s'éteignent. La Formule V8 3.5 va officiellement disparaître, et ce n'est pas une surprise.

Konstantin Tereschenko, SMP Racing by AVF, devance Alfonso Celis Jr, Fortec Motorsports, Diego Menchaca, Fortec Motorsports, et Roy Nissany, Lotus

Konstantin Tereschenko, SMP Racing by AVF, devance Alfonso Celis Jr, Fortec Motorsports, Diego Menchaca, Fortec Motorsports, et Roy Nissany, Lotus

Sebastiaan Rozendaal / Dutch Photo Agency

Car il n'y avait probablement pas de place pour la Formule V8 3.5 dans la pyramide des formules de promotion qu'est en train de façonner la FIA. Faisant partie des World Series by Renault de 2005 à 2015, la catégorie est montée en puissance jusqu'à des saisons 2012 et 2013 où son plateau était certainement plus alléchant que celui du GP2 rival, très fourni de surcroît, avec 26 monoplaces sur la grille.

Cependant, les conditions économiques ne sont plus ce qu'elles étaient, et il est de plus en plus difficile pour les écuries de trouver des pilotes disposant des moyens budgétaires nécessaires pour financer une saison à un tel niveau. Ce n'est pas spécifique à la F3.5, mais elle en a bien plus pâti que le GP2, le GP3 ou la F3 Europe.

Nelson Mason, Teo Martin Motorsport

Le retrait du soutien de Renault, fin 2015, allait forcément être difficile à surmonter, mais la société RPM, organisatrice de la compétition depuis sa fondation en 1998, a persévéré, souhaitant maintenir une alternative à bas coût (du moins par rapport à la GP2/F2, pour une monoplace à puissance similaire) pour les moins fortunés. Mais il est bien difficile de survivre dans ce contexte. Le GP3 bénéficie de la protection de la FOM ; la F3 Europe de celle de la FIA ; la Formule 2 jouit des deux. La Formule V8 3.5 a mené sa barque tant bien que mal dans un environnement qui ne lui était pas favorable.

On ne peut s'empêcher de penser que les nouvelles conditions d'obtention de la Super Licence ont précipité la chute du championnat. Lorsque la FIA a dévoilé sa première ébauche d'un barème de points en janvier 2015, avec la nécessité d'en accumuler 40 sur les trois dernières saisons pour être éligible au précieux sésame en 2016, la F3.5 a eu la mauvaise surprise de découvrir que son Champion ne pouvait en obtenir que 30, alors qu'à l'échelon inférieur, la F3 Europe soutenue par la FIA en octroyait 40. Et pourtant, la Formule Renault 3.5 sortait d'une campagne 2014 où Carlos Sainz avait remporté une superbe bataille à quatre pour le titre face à Pierre Gasly, Roberto Merhi et Oliver Rowland. Déjà trois d'entre eux sont devenus pilotes de F1 !

Le barème a été révisé six mois plus tard, accordant cinq points supplémentaires au champion de F3.5, mais en septembre dernier, une nouvelle modification a été annoncée : le titre de F3.5 est passé de 35 à 20 points. Deux mois plus tard, la discipline met la clé sous la porte, faute d'inscriptions suffisantes pour 2018. C'est une conséquence évidente de l'affaiblissement du championnat, mais l'évolution du barème de Super Licence n'a-t-elle pas accéléré l'inévitable ?

Pierre Gasly
Pierre Gasly et Oliver Rowland, rivaux de la Formule Renault 2.0 au GP2 !

Souvenirs marquants

Je ne vous le cacherai pas, je suis trop jeune pour avoir connu les débuts du championnat. Quand Fernando Alonso a gagné le titre de Formula Nissan, en 1999, je ne regardais encore que la Formule 1. F1 que l'Ibère fut le deuxième pilote à atteindre après être passé par la Formule Nissan, son compatriote Marc Gené ayant remporté cette dernière dès 1998. Depuis, 25 autres les ont suivis jusqu'à l'élite, dont Heikki Kovalainen, Robert Kubica, Sebastian Vettel et Daniel Ricciardo.

Parmi les souvenirs que l'on gardera, il y a 2006 et le sacre d'Alx Danielsson, qui a surmonté l'adversité après un grave accident dans le virage de Blanchimont, à Spa. Ce crash marquait la mi-saison, le Suédois pointait hors du top 10 au général, mais il n'empêche qu'il a pu fêter le titre... trois mois après l'avoir remporté, attendant la confirmation de la disqualification de son rival Pastor Maldonado à Misano !

Alex Danielsson

Il y a les trois années passées par un grand espoir français dans ce championnat de 2002 à 2004, un certain Franck Montagny : deux fois Champion, une fois vice-Champion, 15 pole positions, 20 victoires, même si cela n'a finalement pas abouti sur la carrière à laquelle on pouvait s'attendre en Formule 1.

Il y a ces finales au suspense à couper le souffle. Mikhail Aleshin qui chipe le titre à Daniel Ricciardo en le dépassant dans l'avant-dernier tour de la saison 2010, à Barcelone. Les coéquipiers Jean-Éric Vergne et Robert Wickens qui s'accrochent au premier virage de la dernière course, sur le même tracé : le Canadien est contraint à l'abandon, ce qui donne une opportunité en or au Français d'être sacré s'il finit dans le top 5, mais ce dernier est ensuite percuté par Fairuz Fauzy. Jules Bianchi qui signe un superbe dépassement sur son rival Robin Frijns, là aussi au premier virage du Circuit de Catalunya, avant que le Néerlandais ne l'éjecte dans les graviers au freinage suivant. Frijns est pénalisé, mais l'abandon de Bianchi lui suffit pour être titré. Sans oublier cet étonnant retournement de situation en 2016, où Tom Dillmann exécute parfaitement une stratégie audacieuse pour remonter jusqu'à la première place et être couronné face à Louis Delétraz.

Bataille entre Daniel Ricciardo et Jean-Eric Vergne
Daniel Ricciardo et Jean-Éric Vergne au coude-à-coude

Je retiens également des performances individuelles. Précisément lors de la course où Bianchi et Frijns s'accrochent, c'est un étincelant António Félix da Costa qui s'impose avec 28 secondes d'avance. L'année suivante, Nico Müller impressionne encore davantage avec un écart similaire à son avantage au Hungaroring, mais sous la pluie. Les exemples sont nombreux.

Belle voiture, la Dallara T12 utilisée depuis 2012 était très appréciée, tandis que le comportement de sa devancière, la T08, ne faisait pas l'unanimité. La T12 aura connu un beau cycle de vie, et avec ses 530 ch et son appui aéro sans direction assistée, Kevin Magnussen la trouvait même plus difficile à piloter qu'une F1 ! Une monoplace formatrice, en somme.

Chacun gardera ses propres souvenirs de la F3.5. Les miens seront en tout cas ceux d'un paddock accueillant, où il faisait bon travailler, avec l'opportunité de remarquer des futurs grands du sport automobile avant qu'ils ne soient sous le feu des projecteurs. L'extinction de la Formule V8 3.5 était inéluctable, mais la discipline aura laissé sa marque.

Nico Müller remporte la victoire

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