Interview

Ezpeleta : Avec le coronavirus, "soudain tout est parti en vrille"

À quelques jours du Grand Prix d'Espagne, le promoteur du MotoGP analyse la situation du championnat.

Le panneau du départ retardé

Le panneau du départ retardé

Gold and Goose / Motorsport Images

Le début du premier Grand Prix de la saison MotoGP, le 17 juillet, ne marquera pas seulement l'anniversaire de Carmelo Ezpeleta, mais aussi pour lui un tournant dans l'année, après plus de quatre mois de crise due au coronavirus. Le PDG de Dorna Sports s'est investi afin de sauver la saison 2020 en dépit de la suspension brutale des courses à quelques jours du premier Grand Prix, début mars, et il a été en première ligne afin de définir les conditions dans lesquelles la compétition pourrait être relancée.

Malgré les incertitudes qui perdurent sur la tenue de la saison 2020 et sur les effets de la pandémie à moyen terme, Carmelo Ezpeleta a gagné une première bataille. À quelques jours du retour des motos en piste, il fait le point avec Motorsport.com sur la situation actuelle du championnat. Après les extraits que nous vous avons proposés ces derniers jours, voici cette interview dans son intégralité.

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Quel message allez-vous transmettre à ceux qui se rendront à Jerez ?

Qu'ils doivent être très prudents. Nous avons réalisé un effort immense et ceci est en faveur de tous ceux qui participent au championnat. J'espère que les choses vont changer pour le mieux, mais peut-être vont-elles empirer. Le protocole que nous allons mettre en pratique a été créé au pire moment de la pandémie, et je crois qu'il est valable dans le pire de tous les scénarios. Si nous le respectons, tout ira bien, mais les mesures sont sévères car nous ne sommes pas encore dans les conditions de pouvoir les assouplir.

Il y a encore quelques jours, il semblait même possible qu'il y ait du public à Jerez.

Jerez a évoqué la possibilité qu'un nombre réduit de spectateurs puissent assister au Grand Prix. Mais de notre point de vue, cela aurait été une bombe. Imaginez que 10'000 personnes s'y rendent : il aurait été impossible de tous les contrôler. Je suis ouvert à tout, mais il faut que ce soit raisonnable.

Nous n'allons pas courir après les gens, mais quiconque se ridiculisera et se fera infecter s'en ira.

Carmelo Ezpeleta

Qu'arrivera-t-il à quiconque enfreindrait le protocole ?

Nous n'allons pas courir après les gens, mais quiconque se ridiculisera et se fera infecter s'en ira. Si nous voyons un membre du paddock dans un bar, nous le testerons et si le résultat est positif, nous l'expulserons ainsi que toute autre personne qui aurait pu être infectée. Pour cela, nous utiliserons une application de géolocalisation. Mais je voudrais aussi dire que j'ai une grande confiance dans les gens, je pense que tous ceux qui travaillent dans le championnat sont conscients de la gravité du problème. Nous sortons d'une situation durant laquelle il y a eu des doutes sur notre capacité à nous en sortir. Je sais qu'il sera difficile d'être à Jerez et de ne pas dîner dans certains des lieux qui se trouvent autour du circuit, mais c'était ça ou ne pas pouvoir y aller.

Êtes-vous sûr que toutes les équipes Moto2 et Moto3 pourront terminer l'année ?

Je pense que le facteur économique ne doit pas servir d'excuse, car si tout va bien, nous ferons un minimum de 13 Grands Prix et la Dorna leur paiera ce qu'il faut, sans aucune baisse.

Dans tout ce processus, y a-t-il eu des personnes qui n'ont pas répondu comme vous l'espériez ?

Certains n'ont pas réagi de la bonne manière, mais je m'y attendais. Au bout de 30 ans, nous nous connaissons tous.

Dans tout ce qui s'est passé, qu'est-ce qui a été le pire ?

Le fait que, cette année, la saison s'annonçait passionnante. Et soudain, tout est parti en vrille.

Est-il réaliste de penser que le calendrier aura plus que les 13 courses confirmées jusqu'à présent ?

Eh bien, je ne peux pas le dire pour le moment étant donné qu'il manque plus de 20 jours avant la date limite que nous avons fixée pour prendre cette décision [le 31 juillet, ndlr]. Si nous étions aujourd'hui à cette date limite, je serais obligé de dire que nous ne courrons pas hors d'Europe. C'est la raison pour laquelle nous avons repoussé l'échéance au maximum. Toutes les équipes et tous les pilotes sauront exactement combien de courses il y aura lorsque nous en aurons disputé deux. Il ne serait pas juste de faire durer plus longtemps l'incertitude. Il y aura un maximum de 16 Grands Prix [sans compter le Qatar, où ont couru le Moto2 et le Moto3, ndlr], car nous nous sommes engagés envers les équipes à ce que le championnat ne se termine pas après le 13 décembre.

S'il n'est pas possible de courir en Amérique ou en Asie, existe-t-il la possibilité qu'une épreuve supplémentaire ait lieu en Europe ?

Non, en aucune manière.

Carmelo Ezpeleta, PDG Dorna Sports

Il est curieux que l'année où la F1 semble se destiner à courir au Mugello pour la première fois soit celle où le MotoGP ne s'y rend pas.

Il est normal qu'il en soit ainsi. Nous avons parlé au circuit et ils nous ont dit que la situation était délicate. Le Mugello n'a pas autant de soutien financier que Saint-Marin pour organiser un Grand Prix MotoGP. Il me semble que la F1 y va pour diverses raisons : premièrement, parce que c'est une occasion unique pour Ferrari de courir sur son circuit, et deuxièmement, parce que cela coïncidera avec leur 1000e Grand Prix. J'ai parlé à Ferrari, car ils étaient un peu inquiets par le fait que nous n'y allions pas et je leur ai dit qu'il n'y avait aucun problème. Nous comprenons parfaitement la situation.

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Le roulement entre les cinq Grands Prix espagnols peut-il être modifié après cette pandémie ?

La situation dans le monde à partir de l'année prochaine ne sera pas la même que celle que nous connaissions jusqu'à présent. Je ne suis pas en mesure de dire que le calendrier de 2022 sera celui que nous avions prévu avant le coronavirus. Nous avons les contrats pour les roulements, certains sont signés et d'autres approuvés. Mais je ne sais même pas si nous pourrons disputer 22 Grands Prix. Nous devrons nous adapter aux circonstances, comme nous l'avons fait cette année. Cela dépendra également de la découverte ou non d'un vaccin contre le coronavirus. Si ce n'est pas le cas d'ici là, nous devrons peut-être organiser moins de courses et faire un roulement entre elles. Ce que nous ne ferons pas, c'est dire non à tout. Ce qui est clair, c'est que nous ne pouvons pas nous passer de ce que nous avons de mieux, c'est-à-dire le niveau de compétitivité que l'on voit en piste. Avoir 15 ou 16 motos dans la même seconde, c'est ce que nous devons préserver.

Je ne suis pas en mesure de dire que le calendrier de 2022 sera celui que nous avions prévu avant le coronavirus. Je ne sais même pas si nous pourrons disputer 22 Grands Prix.

Carmelo Ezpeleta

Mais le coronavirus n'a pas non plus mis cela en danger.

Non, mais certains voulaient éliminer l'une des deux motos [par pilote] en MotoGP. Presque personne n'était en faveur de cela. Cela représentait une économie très relative et cela aurait eu un impact très important sur le spectacle. Les courses flag-to-flag sont formidables, de même que le fait qu'un pilote puisse courir le dimanche avec cette deuxième moto s'il est tombé au warm-up. Nous n'avons pas fait d'économie sur ce point et nous ne voulons pas le faire.

Avez-vous envisagé de condenser les Grands Prix sur deux jours ?

Nous avons déjà étudié cela depuis longtemps et ce n'est pas utile. Les économies étaient minimes et cela mettait à risque cet élément sportif que nous ne voulons pas perdre.

Yamaha et Rossi semblent assez optimistes à l'idée de se retrouver en 2021.

Eh bien, s'ils sont optimistes, je le suis encore plus. J'espère qu'ils trouveront un accord, car tout y est. Si les conditions qui lui sont présentées sont intéressantes, il doit continuer parce que ce qu'il veut, c'est courir. Et je pense que Petronas serait ravi d'avoir quelqu'un comme Vale.

Que vous inspire le mouvement antiraciste dont la Formule 1 fait la promotion ?

Être contre le racisme, ce n'est pas seulement être contre ceux qui s'en prennent aux Afro-Américains. Nous, nous n'avons pas ce problème parce que des pilotes de presque toutes les races ont couru ici. Il est évident que nous sommes contre toute forme de racisme et nous l'avons manifesté à maintes reprises.

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