Analyse

AlphaTauri sera-t-elle la surprise de 2021 ?

Serait-il possible qu'AlphaTauri soit la grande surprise de la saison 2021 de Formule 1 ? Ce qui a été montré lors du Grand Prix de Bahreïn le suggère clairement.

Pierre Gasly, AlphaTauri AT02

Pierre Gasly, AlphaTauri AT02

Charles Coates / Motorsport Images

Sur le papier, la neuvième place du rookie Yuki Tsunoda au Grand Prix de Bahreïn équivaut à un début de saison solide mais peu spectaculaire pour AlphaTauri. Cependant, le rythme de l'écurie italienne le samedi, pendant les qualifications de cette première épreuve de la saison, a attiré l'attention de ses rivaux. Au terme d'un tour "surprenant", selon les propos du directeur de McLaren Andreas Seidl, Tsunoda a bouclé la Q1 en deuxième position et a impressionné les autres pilotes du milieu de peloton.

Le rythme de l'AT02 sur le circuit de Sakhir était si compétitif que l'écurie a parié sur le pneu medium pour la Q2, ce qui n'aurait pas été envisageable l'an passé. Pierre Gasly a décroché son ticket d'entrée pour la Q3 en se qualifiant huitième mais Tsunoda s'est fait surprendre et a dû se contenter de la 13e place. De retour en tendres pour la Q3, Gasly s'est assuré la cinquième place sur la grille de départ, idéalement placé derrière Max Verstappen, Lewis Hamilton, Valtteri Bottas et Charles Leclerc.

Hélas, les choses ont mal tourné pour le Français le dimanche. Dans les premières boucles du Grand Prix, Gasly a arraché son aileron avant en se rapprochant de Daniel Ricciardo. Au même moment, Tsunoda a perdu des places en conséquence d'un premier départ en F1 bien trop prudent, selon lui. Le Japonais s'est vite repris et son dépassement sur Lance Stroll dans le dernier tour pour conquérir la neuvième place a donné une idée du potentiel qui avait été gâché.

Bahreïn n'était qu'une mise en bouche mais cette pointe de vitesse en qualifications indique clairement qu'AlphaTauri a enfin trouvé la bonne recette cette saison. Il faut dire que l'AT01 de 2020 a été capable de gagner une course, alors ne soyons pas surpris qu'une version modifiée du châssis et que la nouvelle unité de puissance de Honda forment un package encore plus compétitif.

"C'est une combinaison de plusieurs facteurs", explique le directeur technique Jody Egginton. "L'année dernière, nous pensions avoir une bonne voiture mais nous n'étions pas dans une position où nous aurions pu nous hisser [en Q2] avec une gomme plus dure. Je pense que c'est le signe que la voiture fonctionne bien. Tout le monde travaille dur pour développer la voiture, l'unité de puissance a progressé, le châssis également."

"Beaucoup de jeunes ingénieurs de l'équipe se sont améliorés au cours des deux ou trois dernières années. Leur confiance augmente et nous avons une très bonne direction. De plus, Yuki est arrivé et c'est un gars talentueux. Pierre est à l'aise dans l'équipe et apporte une contribution fantastique. Tout se met en place."

"Je ne peux pas assez insister sur le fait que l'équipe d'ingénierie, l'équipe de conception et l'équipe aéro soient toutes en train de mûrir. Nous sommes en train de trouver notre identité et de travailler ensemble pour mettre en place une méthodologie et une philosophie. Je suppose que c'est ce qui arrive lorsque la voiture s'améliore, vous avez cette nouvelle liberté de choix dans le pneu à utiliser en début de course, par exemple."

La continuité est toujours bénéfique, surtout lorsque certains des rivaux d'AlphaTauri ont vécu des changements d'identité, de direction ou de motoriste, tout en limitant les dépenses pour respecter le nouveau plafond budgétaire en Formule 1. L'écurie italienne a même choisi de conserver son train arrière plutôt que de se mettre à niveau avec la boîte de vitesses 2020 de Red Bull, ce qui était autorisé par le règlement.

La seule nouveauté majeure d'AlphaTauri en 2021 est le passage vers une soufflerie 60%, devenant la dernière équipe du plateau à utiliser un modèle à plus grande échelle. Cela a multiplié le travail à Faenza pendant l'hiver mais ce changement devrait prochainement porter ses fruits. Reculer pour mieux sauter, en somme.

D'après Egginton, AlphaTauri s'est bien adapté au changement de soufflerie et a bien progressé dès les premiers tours de roue de l'AT02. "Notre programme consistait simplement à apprendre notre voiture", explique-t-il. "Nous avons passé beaucoup de temps à recueillir des données aérodynamiques car cette voiture a été développée dans notre soufflerie 50%, et depuis nous sommes passés à une soufflerie 60%."

"Il y a beaucoup de corrélation à faire. Nous développons maintenant la voiture dans une soufflerie différente. Elle est née à un endroit, aujourd'hui elle est développée à un autre. Il y a beaucoup de travail sur l'aérodynamique et nous essayons simplement de comprendre la corrélation, quelles sont les différences dues au changement de réglementation et qu'est-ce que Yuki souhaite obtenir de la voiture."

"Et puis, évidemment, il y a la nouvelle version de l'unité de puissance de Honda qui est passée par tous les contrôles, a correspondu à nos attentes et a fonctionné comme nous l'espérions. Dans la période entre les essais de pré-saison et la course, nous avons tout passé en revue."

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Après avoir établi une base solide grâce à de bonnes performances lors des essais de pré-saison de Bahreïn, AlphaTauri a apporté quelques modifications à ses deux monoplaces en marge du premier Grand Prix de la saison 2021. La productivité de l'écurie italienne en essais privés a été d'une grande aide, leurs rivaux ayant connu quelques avaries mécaniques. Au terme des trois journées d'essais, Gasly a effectué plus de tours du circuit de Sakhir que n'importe quel autre pilote.

"Nous avons déjà des mises à jour de prévues", révèle Egginton. "Avec les modifications que nous prévoyons d'apporter, les données aérodynamiques des essais ont permis de définir quel chemin suivre et nous avons simplement accumulé des connaissances sur le comportement de la voiture. Ensuite, [pour le GP de Bahreïn] nous avons apporté une voiture différente, avec quelques petites évolutions. Heureusement, nous avons bouclé les essais avec une voiture plutôt convenable."

"En quittant le circuit, nous nous sommes demandé quelles étaient les faiblesses, ce que nous pouvions faire à ce sujet, où se situaient les autres équipes et comment elles utilisaient leur unité de puissance. Parce que tous les programmes d'essais étaient très différents. Nous avons donc passé beaucoup de temps à chercher des réponses. Il était clair que nous étions dans le coup et il fallait ne pas trop se distraire pour rester concentrés sur nous-mêmes."

Les changements aérodynamiques de 2021 ont eu leur impact sur la performance des dix écuries de la grille. Très certainement, le changement d'échelle de la soufflerie d'AlphaTauri leur a donné un élan supplémentaire.

"Les fonds plats ont changé de façon spectaculaire en raison de la nouvelle réglementation", explique Egginton. "De même pour le diffuseur et le fonctionnement aérodynamique à l'arrière. Tout le monde a essayé de récupérer de l'appui aérodynamique, nous en avons récupéré une bonne partie. Désormais, nous essayons de trouver une plus grande fenêtre de fonctionnement aérodynamique pour travailler sur la voiture, surtout à basse vitesse. Les pilotes pourront mieux exploiter [la voiture] et nous irons plus vite."

"Je pense que nous avons une bonne vision de ce que la voiture a à offrir et cela nous permet d'établir un objectif précis. Il faut développer l'aérodynamique, exploiter davantage les zones de la voiture ayant été affectées par la réglementation et s'assurer que les changements sur le fond plat ne bouleversent pas d'autres zones au fil du développement. Nous aurons de nouveaux éléments à Imola, nous aurons de nouveaux éléments au Portugal, nous aurons de nouveaux éléments en Espagne. C'est progressif, rien qui puisse faire les gros titres. Mais d'ici au GP d'Espagne, nous devrions avoir fait un bon pas en avant."

La mention des Grands Prix à venir met en lumière l'un des principaux problèmes d'AlphaTauri l'an dernier : le manque de constance. L'objectif fixé par l'équipe en 2021 est de reproduire la performance des qualifications de Bahreïn sur les autres circuits du calendrier.

"L'année dernière, nous étions dans le coup", déclare Egginton. "Mais la fluctuation de notre rythme dans le peloton était un peu plus importante que ce que nous voulions. La voiture fonctionnait très bien lors de certains week-ends puis nous avions plus de difficultés lors d'autres. Cet écart de performance s'est réduit en deuxième partie de saison."

"J'étais satisfait du rythme de la voiture en 2020. À certains moments, elle a été très performante. À d'autres moments, nous sommes rentrés à l'usine très déçus. Nous voulons essayer de minimiser [les variations], surtout dans le cœur du peloton parce que c'est très compact. Tout le monde vole des points à tout le monde et on ne peut pas se permettre de perdre des points."

Gasly, une référence pour Tsunoda ?

Les pilotes sont les dernières pièces du puzzle. En dehors de sa demi-saison avec Red Bull en 2019, Gasly est dans l'équipe depuis octobre 2017, ce qui contribue grandement à la continuité tant recherchée par l'écurie. Après une saison 2020 XXL, la confiance et la pointe de vitesse du Français sont au maximum, et au lieu de s'inquiéter d'un retour chez Red Bull, Gasly s'épanouit dans son environnement actuel.

"[Gasly] est performant parce qu'il peut se baser sur l'année dernière", dit Egginton. "La voiture de cette année est une évolution de celle de 2020 et il connaît son comportement, tout comme son équipe d'ingénieurs. Et cela aide Yuki s'il éprouve des difficultés avec certaines choses, il a une référence. Pierre est capable de nous dire en détail ce qui a changé, ce qui est mieux, ce qui est moins bien. Cela nous aide potentiellement à répondre à certaines questions que Yuki pourrait se poser."

Dans le deuxième baquet de l'AT02, Tsunoda apporte un vent de fraîcheur à Faenza. L'équipe sait qu'elle a recruté un pilote déterminé à se faire un nom en Formule 1 et qui n'abandonnera pas cet objectif, qu'importe les circonstances.

"[Tsunoda] est sur une courbe d'apprentissage très raide, comme tout jeune pilote qui arrive dans le monde de la F1", précise Egginton à propos du rookie japonais. "Il progresse pas à pas, absorbe beaucoup d'informations. Il communique bien, travaille bien avec l'équipe d'ingénieurs et nous comprenons ce qu'il attend de la voiture."

"AlphaTauri/Toro Rosso a toujours travaillé avec de jeunes pilotes. Et sans prendre la grosse tête, l'équipe est douée pour ça. Il est honnête de dire que les résultats des pilotes qui sont passés par l'équipe montrent que les ingénieurs sont bons. Nous allons connaître des bons et des mauvais moments mais [Tsunoda] est à la hauteur. Et il a Pierre comme professeur."

Désormais, AlphaTauri se prépare pour sa course à domicile, à Imola. Un circuit que Tsunoda connaît bien pour y avoir roulé à plusieurs reprises avec l'écurie entre 2020 et 2021, et où Gasly s'est qualifié à une impressionnante quatrième place il y a quelques mois. Ce deuxième rendez-vous donnera-t-il une véritable indication du potentiel de l'AT02 ?

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