USA, nouvelles équipes, TV : la vision d'Ecclestone revue par Liberty Media

Les thématiques de l'implantation de la F1 aux États-Unis, des nouvelles équipes et de l'accroissement du marché sur les plateformes de diffusion ont été traitées de manière à la fois visionnaire et différente par les forces régissant la discipline ces dernières années. Rappel et comparaison des systèmes Bernie Ecclestone et Liberty Media.

Bernie Ecclestone, Président émérite de la F1

Photo de: Mark Sutton / Motorsport Images

La riche actualité de la F1 donne de plus en plus de visibilité au marché américain et à ses acteurs, comme les promoteurs de nouvelles courses (Miami, Las Vegas) ou, plus récemment, au géant qu’est Ford. Elle est aussi actuellement bien animée par la candidature d’Andretti-Cadillac pour une entrée comme onzième équipe, au point de susciter de fortes tensions politiques entre Liberty Media et la FIA !

La F1 a changé dans sa manière de se présenter au marché et à ses partenaires actuels et à venir. Faisant force commune avec les équipes et les acteurs qui s’y engagent, elle montre son engagement. La présentation de la Red Bull, de laquelle on ne sait finalement que très peu, est pour ainsi dire devenue l’anecdote de cet évènement, dont la force était bien l’annonce du retour de l’ovale bleu, et plus largement, la place des États-Unis dans l’agenda de la discipline reine sur les prochaines décennies.

Prenons dès lors un peu de recul et regardons comment cette situation contemporaine permet de mettre en contraste l’approche actuelle avec celle d’une époque pas si lointaine quand, il y a une douzaine d’années, ces thématiques étaient déjà des sujets de grandes sorties médiatiques de la part de Bernie Ecclestone, alors grand manitou de la F1.

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Les équipes "éclopées" !

Nous sommes en 2010, et la presse F1 s’en donne à cœur joie avec l’expression employée par Ecclestone au sujet des petites équipes arrivant pour faire le nombre sur un plateau ayant perdu en pleine crise économique et politique Renault, Toyota, Honda, BMW ou encore Bridgestone. 

Les projets low-cost alors fortement soutenus par Max Mosley et la FIA que sont Virgin Racing, Hispania Racing Team et Lotus, qui ont tous remporté la timbale d’un accès à la F1 notamment de par leur choix de la motorisation… Ford Cosworth, reçoivent alors le savoureux label "d’équipes éclopées" de la part d’Ecclestone, qui militait alors pour une F1 forte à sept ou huit équipes emblématiques pouvant aligner jusqu’à trois autos… une idée qui a récemment été réentendue dans une interview de Juan Pablo Montoya accordée à Motorsport.com.

Pire, le grand argentier de la F1, alors âgé de 80 ans, ne cache à l'époque pas le fait qu’il considère que de telles entrées pour venir fréquenter les géants que sont Ferrari, McLaren, Mercedes ou encore Red Bull, sont tout simplement une honte pour la discipline reine et l’idée qu’il se fait de celle-ci en termes d’attractivité. "Nous devons nous débarrasser de quelques-uns de ces éclopés", lançait-il ainsi, ajoutant : "Ils ne font rien pour nous. Ils sont une source d'embarras. Lotus est la seule équipe qui semble bonne et qu'il serait bon de garder." On connait l’imbroglio dans lequel s’embarqueront pourtant les ayant-droits sur l’utilisation du nom Lotus, également employé par Enstone.

Le problème, pour Ecclestone, est alors que ces équipes prennent au mot la politique menée par Mosley et limitent les dépenses à un niveau encore jamais-vu en F1. "Virgin investit 23 millions de dollars dans son équipe chaque année", déclarait-il ainsi, comparant la somme aux 160 millions que Toro Rosso recevait de sa société-mère, Red Bull, pour une équipe elle aussi modeste.

Narain Karthikeyan au volant d'une HRT.

Narain Karthikeyan au volant d'une HRT.

Bernie n’avait pas renoncé aux USA

À l’inverse, Ecclestone avait beau connaître les difficultés d’une implantation sérieuse aux États-Unis et le passif récent de la F1 sur ce territoire qui semblait ne jurer que par les courses IndyCar et NASCAR, son intérêt pour le continent nord-américain demeurait important.

La F1 peinait à renouveler ses accords avec Tony George, promoteur de la course d’Indianapolis, et Ecclestone ne tarissait pas d’éloges à son sujet en espérant pouvoir maintenir l'épreuve au calendrier, tout en annonçant disposer d’autres options : "Tony a fait du bon travail pour nous, il a fait tout ce que nous avons demandé. Top niveau, rien à dire. Peut-être que nous n’aurons pas besoin de faire de changement ; peut-être que l’on peut ajouter une course… D’autres endroits nous demandent."

L’autre endroit en question, celui qui intéressait réellement Ecclestone, s’appelait Las Vegas, et semblait alors un projet bien fou. Les promoteurs avec lesquels discutait le Britannique se montraient alors réticents à accéder aux demandes financières importantes d’Ecclestone, estimant que le rapport de force était plutôt équilibré compte tenu de l’attractivité mondiale d’un nom comme Las Vegas et de la situation de la F1 par rapport à sa place aux États-Unis.

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Plutôt que de mettre en concurrence les courses américaines les unes contre les autres, Ecclestone changeait alors son fusil d’épaule dans ses prises de parole de manière (pas si) subtile. Il rappelait régulièrement que les places au calendrier étaient limitées, que même l’inclusion éventuelle de dates additionnelles nécessitait un solide dossier pour les candidats, compte tenu de l’intérêt de la F1 pour de nouveaux marchés : la Chine, la Corée du Sud, l’Inde et Singapour n’illustraient-ils pas la soif de certaines contrées pour accéder au prestige de la F1 sans conditions ? "Ils sont prêts à rendre les choses possibles", saluait Ecclestone à propos de ces  "gouvernements qui mettent les sous".

Au-delà de la présence de courses américaines au calendrier, c’est à la diffusion et l’entrée dans les foyers de la F1 sur les écrans TV qu’Ecclestone savait la dépendance importante aux États-Unis pour éveiller une communauté de fans. Il mettait alors sous pression SpeedTV, Fox et ABC, peu intéressé qu’il était par le numérique et les modes émergeant de diffusion des médias. Le fait que Liberty Media ait ouvert des vannes extraordinaires avec ESPN aux États-Unis et surtout Netflix sur le sol américain et bien au-delà illustre bien aujourd’hui l’immense compréhension des axes de développement du repreneur des droits de la F1, qui a immédiatement fait de l’accessibilité une priorité sans pour autant dévaluer l’offre faite aux chaines de télévision.

Le prochain chapitre de l’expansion de la F1 aux États-Unis, et plus globalement sur des marchés encore peu touchés et chargés de potentiel, passe justement encore une fois par Netflix, et son positionnement de plus en plus agressif sur la diffusion de contenus en direct, notamment dans le domaine sportif. En dépit de la complexité de la mise en place d’un deal concurrentiel à sa propre offre F1 TV et aux clients de Liberty que sont les chaînes de télévision qui paient pour les droits de diffusion nationaux de la F1, il serait fou pour la discipline de ne pas envisager très sérieusement la libération des droits de diffusion des courses en direct ou en différé de manière immersive à un acteur comme Netflix, qui pénètre dans des centaines de millions de foyers dans le monde et touche des tranches d’âge encore peu mobilisées par Liberty Media. C'est aussi cette promesse qui intéresse tant les constructeurs comme Ford aujourd'hui…

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